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        Ses pieds ne cessaient de brutaliser les feuilles mortes, ses orteils accrochant des brindilles qui se collaient par la suite sur ses talons. Il titubait, boitait, il avait mal. Tout son corps lui criait de s'arrêter, ses muscles le suppliant de se reposer, il était déraisonnable.

    Seul et frigorifié, même ses mains qui encerclaient ses coudes, pour tenter de maintenir une certaine chaleur dans le creux de son ventre, ne l'aidaient plus. Uniquement la pluie et sa mâchoire tremblante perturbaient un potentiel silence de mort à travers ces arbres qui l'entouraient, le dominaient. Il sanglotait parfois, en traînant sa patte folle qui le lançait chaque moment que son poids pesait dessus. Il se sentait si lourd. Il ne savait même pas où il allait, où il avait été emporté et où la chercher. Il avait peur de comment il allait la retrouver, où il la rencontrerait à nouveau. Pourtant, il partait à sa recherche, déterminé à rester tous les deux quoi qu'il arrive.

    Il slalomait aveuglément entre les troncs ruisselant de petites gouttelettes, ses épaules venant parfois s'égratigner contre des écorces en perdant l'équilibre, lui rappelant que ce n'était pas un rêve. Que son corps meurtri n'était pas le fruit de son imagination, que son dos brûlant et picotant chaque fois que la pluie le touchait était bel et bien un cauchemar éveillé dont il ne se réveillerait pas. Elle n'était même pas là pour le rassurer, lui promettre qu'ils s'en sortiraient, qu'il n'avait pas à s'en faire.

    Parce qu'ils avaient été séparés.

    Cette fatalité eût raison de sa force et ses genoux flanchèrent. Ses mains heurtant presque aussitôt le sol glacé, des brindilles lui piquant involontairement la peau qu'il avait l'impression d'à peine sentir à côté de son dos. Incapable de reprendre son souffle, sa tête tournait, ses coudes lâchaient, son nez tapait la terre collante, et un nouveau sanglot lui bloqua l'arrivée d'air présente autour de lui. Il suffoquait et ça lui faisait tout drôle. Il n'avait jamais expérimenté une telle chose et il aurait aimé ne jamais avoir eu à le faire. Il l'avait perdu, il se retrouvait seul dans un endroit totalement inconnu, il avait mal et il se sentait impuissant. Incomplet fut le mot exact. Il avait bien tout perdu à ce moment-là.

    Son corps s'effondra véritablement sur les feuilles fraîches, ses muscles tressaillant de manière incessante, ses poumons en constante recherche d'oxygène. Il n'entendit même pas les bruits de pas s'approcher, des voix s'élever ça et là tandis que ses paupières se fermaient d'elles-mêmes. Il savait que les sons étaient plus forts à mesure que ça se rapprochait de lui. Il eût vaguement conscience qu'on le touchait, le retournait sur le dos. Il était, de toute façon, incapable de bouger. Il se sentait si loin, comme s'il était spectateur aveugle de ce qu'il se passait, de ce qu'ils faisaient de lui.

– Il est viv...; féminin, masculin ? Aucune idée.

– Appel.. vit...

– On doit... depe... du nerf... un deux... douce...

    Impossible d'entendre distinctement ce qu'ils disaient, impossible de déterminer à qui appartenait ces voix, il n'en connaissait aucune. C'était étrange, il ne se sentait pas en danger. Pourtant son instinct lui hurlait que c'était n'était pas normal. Mais qu'est-ce qui n'était pas normal ?

    Puis il n'eut plus si froid. Ses oreilles ne bourdonnaient plus, c'était si reposant ! Et pourtant il était incapable de se détendre. Ses muscles restaient contractés, certains tremblant douloureusement. À un moment, long ou court, sa tête cessa enfin de tourner, sauf que cette fois-ci c'était sa gorge qui le brûlait affreusement. À s'y concentrer un peu plus, il cru sentir quelque chose d'inconnu passer à travers sa trachée, indolore et non solide. C'était sûrement la raison des brûlures. Enfin... Si c'en étaient.

Déchu  (réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant