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        Sa vie n'avait pas beaucoup changé depuis qu'il était arrivé.

    De ce que lui avait dit Aheen, c'était le week-end et généralement ils ne sortaient pas. Sauf s'ils devaient faire des courses ou que l'adolescent partait voir des amis, ayant le permis et le véhicule pour se déplacer quand et où bon lui semblait.

    Lors des repas, Lucien ne parlait pas plus, il écoutait plutôt ce qu'il se disait. Des potins sur des personnes que les deux relatifs connaissaient, quelques anecdotes que le noiraud racontait par-ci par-là, avec des noms qui revenaient souvent. Lucien assimilait les informations plus ou moins importantes, comme si elles allaient lui servir à quelque chose plus tard.

    Puis, lors du dîner du dimanche, Aheen avait demandé à son oncle s'il lui en avait parlé. D'abord perdu face à la question floue du jeune homme, Lucien s'était mit à réfléchir à vitesse grand X de la moindre chose dont le docteur lui aurait, manifestement, touché un mot. Sauf que rien ne lui venait.

    C'était donc comme cela que le jeune homme se retrouvait dans son lit, allongé sur le dos, à douter de la décision du plus vieux quant au fait de l'envoyer dans le lycée que fréquentait son neveu. C'était si soudain qu'il n'avait pas refusé. À vrai dire, il commençait à se sentir malade de devoir rester constamment enfermé dans les mêmes pièces. Il était nauséeux de ne pas savoir que faire, quoi penser, quoi se rappeler. Le pire étant qu'il commençait même à oublier le garçon qu'il avait vu. Ses traits devenaient moins distincts, son sourire partait en fumée. Son seul souvenir un peu positif se fanait. Et cela l'attristait.

    Il soupira, se tourna sur le côté, cachant son nez dans son coude et ferma les yeux. Il se demandait ce qui allait se passer demain. S'il se rappellerait de quelque chose, si une personne allait lui évoquer un souvenir, une émotion, si un élève ou un enseignant allait se souvenir de lui. Comment allait-il réagir ? Comment allait-il expliquer sa vie oubliée, sa mémoire absente ?

    On toqua à sa porte, alors que ses paupières commençaient à se fermer. Lucien alluma la petite lampe de chevet sur sa gauche avant que la personne n'entre. C'était le neveu, habillé de son jogging noir, les bras soutenant du tissu blanc, ainsi que foncé, il avait ouvert assez la porte pour pouvoir pénétrer dans la chambre d'invité.

– C'est un uniforme obligatoire; l'informa-t-il; comme on doit faire à quelque chose près la même taille, je te file celui-là en attendant qu'on t'en passe des nouveaux.

    L'amnésique hocha la tête, signe de remerciement. Il déposa les affaires sur la chaise de bureau, à peine décalée de la table. Lucien entendit le jeune homme murmurer quelque chose, un "ok" certainement, avant de faire demi-tour. S'attendant à ce que celui-ci rejoigne sa chambre, Lucien s'apprêtait à éteindre sa petite lampe.

– Demain on part à 8h30.

    Puis ferma définitivement le battant sur un silence.

    Lucien se rappelait d'avoir éteint l'ampoule, néanmoins il ne se souvenait pas de s'être endormi, ni même de son rêve.

    Et encore moins de quand le soleil avait commencé à pointer le bout de son nez, de la première minute où les oiseaux avaient commencé leur journée. La sienne débuta lorsqu'il entendit gratter à sa porte, et de distinguer son nom suivit d'une phrase lui indiquant qu'il valait mieux qu'il bouge son popotin dès maintenant. Lucien se sentait reposé mais stressé, son corps était relâché et détendu. Or son ventre avait commencé à prendre le dessus sur son agréable condition. Et ce, dès lors qu'il se rappela les plans de cette journée. Rien que le fait de rencontrer de nouvelles personnes lui tordait les tripes de bonne matinée.

Déchu  (réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant