Retour à la case départ. Lucien était dans la même chambre, avec ces mêmes draps blancs d'un monotone affligeant, cette immense fenêtre qui présentait la même vue de bâtiments et le soleil qui disparaissait derrière. Autant dire qu'il était aussi dégoûté qu'affligé d'être ici !
Lorsque monsieur Zliot est arrivé, il y a trois jours, Lucien ne faisait pas fière mine. Les questions s'étaient enchaînées. Allait-il bien ? Que lui est-il arrivé ? Que s'était-il passé ? Lucien n'avait répondu à aucune. Il s'était ensuite fait embarquer par le médecin jusqu'à sa voiture, Aheen sur leurs talons, les affaires du noiraud avec lui. Lucien n'avait pas recroisé Neeve. Il était vraiment parti. Et cela l'attristait vraiment.
Lucien passait maintenant ses journées et ses soirées devant la vitre de sa chambre. Il n'avait pas envie de descendre. À quoi bon ? Personne ne l'attendait pour prendre de ses nouvelles ! Jamais personne n'était venu pour lui. Il était mauvaise langue, Aheen était venu, il y a deux jours. Uniquement pour lui passer les cours rattrapés par Nahara. Il s'en était allé à peine après avoir posé les feuilles sur le siège à l'autre bout de la chambre.
En arrivant à l'hôpital, ses plaies avaient été immédiatement désinfectées et partiellement soignées, avant d'être bandées puis changées deux fois par jour. La douleur s'était atténuée, le troisième jour ce n'était plus que des tiraillements ! Mais puisqu'il ne bougeait que pour respirer, il ne les sentait pas vraiment.
On ne l'avait pas rebranché au cardioscope après sa nouvelle première nuit ici. Un point positif à être enfermé dans sa chambre, personne ne le pistait !
Son esprit allait ça et là, jamais longtemps sur le même sujet. À part sur celui de Neeve. Lucien n'avait pas compris pourquoi le garçon s'en était allé quand Lucien lui avait demandé comment il aurait pu l'aider. Neeve n'avait manifestement pas quémandé de ses nouvelles et ne comptait pas le faire.
À part la présence du médecin, et la contrainte de voir Aheen, il refusait qui que ce soit de venir dans sa chambre. Chaque infirmière le rendait nerveux, il détestait cet endroit et ne voulait en aucun cas se coltiner les soignants étrangers en plus pendant son séjour. Déjà qu'il était à durée indéterminée...
Lucien s'était aussi demandé ce qu'il avait aperçu, pendant son inconscience jusqu'à l'infirmerie du lycée. Ces flashs, ces voix sans résonances, cette sensation désagréable au fond de lui qui l'avait poussé à se battre pour ouvrir les yeux. Qu'était-ce ? Des souvenirs ? Des événements passés qu'il avait fait exprès d'oublier après sa perte de mémoire ? Mais pourquoi ? N'ayant pas la moindre réponse, il avait simplement mis cela sur le fait qu'il s'était sûrement imaginé sa course jusqu'à l'infirmerie avec Aheen et Neeve. C'était ce qu'il y avait de plus logique à cet instant précis. Malgré tout, se ressasser cela pour essayer de mettre un doigt sur quelque chose de précis ne lui procurait que migraine et fatigue immense. Il abandonna rapidement.
Il resta tout de même fixé à cette fenêtre, à observer les oiseaux voler en se demandant ce que cela faisait, de parcourir le ciel sans insouciance.
Le quatrième jour, un spécialiste est venu. Le nom de son métier avait échappé à Lucien et il n'avait montré son dos que parce qu'il faisait confiance à monsieur Zliot. Ça avait été à contre-cœur qu'il avait retiré sa chemise de soin blanche, laissant l'air ambiant venir lui chatouiller le ventre et les épaules. Immédiatement, le spécialiste s'était affairé à observer ses plaies, les frôler de ses doigts gantés. Il avait tout bonnement détesté cela. Il ne saurait l'expliquer, mais il aurait aimé que cela reste entre monsieur Zliot et lui uniquement. Pourtant le verbaliser avait été impossible.