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– Tu ne dors pas encore ?

    Lucien, à califourchon sur une chaise du salon, n'avait cessé d'observer la nuit tombant rapidement sur la haie qui cachait le jardin. Il avait entendu rentrer monsieur Zliot. A peine un coup d'œil sur l'horloge près de la grande télévision au premier cliquetis de clé, il était une heure du matin passée. Le crépuscule avait pointé le bout de son nez vers dix sept heures, tapant plus sur les six heures du soir.

    Il secoua la tête en le regardant distraitement se déchausser. Le sommeil l'avait quelque peu effleuré mais pas vraiment appelé. Morphée avait à faire avant de l'emmener.

    Glannon soupira bruyamment en retirant sa veste épaisse, il la rangeait avec aussi peu de discrétion.

– Tu as école demain.

    Néanmoins Lucien n'esquiverait pas cette fois-ci. Il y avait trop de points sans réponse, tout autant que des explications peu claires.

– Ça attendra; répondit-il calmement.

    L'hôte s'était réfugié dans la cuisine sans le regarder.

– L'établissement va finir par refuser que tu reviennes à force; résonna sa voix.

    Oui, certainement. Or c'était le cadet de ses tracas.

– Tu as pensé à Neeve ? Aheen sera aussi absent, il n'aura plus grand monde pour l'épauler.

    Lucien avait fini par lui aussi rejoindre la cuisine éclairée. Monsieur Zliot vidait un récipient en verre dans la poubelle avant de le déposer dans l'évier et de le mettre à tremper.

– Aheen reviendra, il s'en remettra; esquiva Lucien avec un petit pincement au cœur.

– Ce n'est pas pareil, tu le sais.

– Rith lui expliquera.

– Il aura du mal à s'en remettre.

– Je viens à peine d'arriver; lui fit remarquer Lucien.

    A aucun moment le docteur n'avait relevé les yeux vers lui. Il gardait obstinément son menton à hauteur de table et de ses mains, même s'il ne faisait rien de particulier. Il se mit à rire, comme si la réflexion du noiraud était absurde.

– Et toi, alors ? Comment le vivras-tu ?

    Ce fut à cet instant que leurs regards se croisèrent, lorsqu'il avait posé à plat ses mains sur la table, ainsi que le sujet. De manière subtile, que Lucien ne perçut pas vraiment. Les bras croisés, ledit garçon le fixait un instant.

– Pourquoi s'en préoccuper ?

– On sait tous les deux que ton indifférence n'ira pas loin.

    L'indifférence n'y était pas, il mettait de la distance. Nuance.

– Enfin, Lucien; s'indigna presque l'adulte; tu es constamment collé à lui, tu as même brisé une porte pour voler à son secours.

    Nahara avait parlé, évidemment.

– Ne me fais pas croire que tu ne sens plus rien face à ça.

– C'est lui qui cherche ma présence; le reprit Lucien sur la défensive.

    Oui, il ne voulait pas admettre le contraire sinon il finirait vraiment par lui coller aux basque's de manière consciente. Il essayait déjà de digérer le fait que s'éloigner semblait nécessaire, si Glannon brûlait ses nouvelles résolutions, il n'irait pas plus loin que le bout de son nez.

– Tu vas t'en plaindre ?; siffla le docteur.

    Il n'en croyait pas un mot.

– Dites-moi comment vous pouvez en être si certain ?; demanda Lucien en plissant les paupières.

Déchu  (réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant