Epilogue : #015E26

8 1 0
                                    

        Je ne pensais pas que j'aurais été aussi surpris de ma vie. C'est vrai quoi ! On m'a annoncé, il y a deux jours, que j'avais frôlé la mort, que j'étais apparemment un sorcier depuis le début, que la sœur de mon ange voulait ma peau sans raison apparente et que Aheen m'avait sauvé d'un ensevelissement éternel et douloureux. Aurais-je oublié de mentionner que j'étais difficile à tuer ? Il y avait tellement de choses à dire sur ma vie maintenant !

    Pourtant j'étais là, dans le salon à dessiner mes pensées depuis mon réveil. À vrai dire, je n'avais pas réellement dormi. Je n'étais pas épuisé et je voulais plaquer mes émotions dans mon carnet.

    J'avais négocié ma sortie de l'hôpital, dans lequel je m'étais trouvé à mon insu, à condition que Lucien reste avec moi, chez moi. Je n'avais pas rechigné le moins du monde ! Certes, ma maison était sans dessus-dessous, la quasi-totalité de mes meubles étaient détruits voire complètement réduits en poussière mais Lucien et Rith n'avaient pas perdu un seul instant avant de nettoyer le bazar que Aheen avait fait.

    En parlant de lui, je n'étais définitivement pas prêt de le revoir ! Il avait tué ma tante, et impossible de retrouver son corps. J'étais encore en deuil. Puis il y avait de quoi, je l'avais vu se faire tuer sous mes yeux. Je crois bien avoir meurtri la pauvre épaule de Lucien lorsqu'il me l'avait annoncé.

    Lucien... Il était si avenant, si compréhensif et si... lui. Il me laissait de l'espace, m'écoutait ou apaisait mes maux. Il n'était pas bien bavard, de toute manière. Je n'allais pas tirer grand chose de croustillant de mon bel immortel.

    Je mentirai si je disais que je n'étais pas encore en train de le croquer. D'après mes coups de crayons et mon esprit vagabond, il lisait, toute aile sortie, et du blanc sur les épaules. Si je devais décrire son visage, j'y passerai des heures ! Alors je préférais dire qu'il était angélique et hypnotisant, moins beau que le réel, sans grande surprise.

    En parlant du loup, il glissa ses doigts sur mon épaule et caressa doucement mes cheveux, électrisant ma colonne sans pitié. Son souffle contre mon oreille en se penchant me rendit tout chose.

– Tu ne dors pas ?

    Et quelle voix ! Je ne vous dis pas à quel point elle était plaisante, vous vous en doutez. Rauque et douce, un combo parfait pour mes écoutilles !

– Non; dis-je; je ne trouve pas le sommeil.

– Alors tu dessines ?

    Je fermai précipitamment mon carnet, bloquant mon crayon à l'intérieur et prétextai-je :

– Ce n'est pas encore parfait.

    Alors que c'était juste pour cacher le fait que c'était lui. Le rouge m'était monté aux joues, juste l'histoire d'une faible pigmentation de tomate.

– Et toi, tu ne dors pas non plus ?

    Je me tournais vers le visage endormi de Lucien, la trace de l'oreiller sur la joue et les cheveux défiant les lois de la gravité. Il s'accroupit devant mes genoux et secoua la tête.

– J'ai fait un mauvais rêve; avoua-t-il.

– À propos de quoi ?; m'enquis-je aussitôt.

    Il hésita, les paupières closes et la bouche visiblement pâteuse. J'avais l'envie presque irrépressible de passer ma main dans ses cheveux. Lucien finit par secouer la tête et posa son front sur mes genoux. J'avais le bas ventre en feu et mes espoirs de trouver le sommeil partirent en fumée. J'avais devant les yeux un magnifique tableau.

– Tu ne veux pas me dire ?; tentai-je.

– Je ne veux plus y penser.

    Et j'aurais pu rester pour l'éternité ainsi, à passer mes doigts dans ses cheveux de jais, sentant son souffle calme et posé sur mes genoux, le seul bruit de mon cœur battant à l'unisson du sien. Mon ange dans les bras. 

Déchu  (réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant