Juste un collègue...

Quand le passé revient nous hanter

Ok... La vie me hait.

J'ai quitté un job que j'aimais, pour me retrouver en face de lui.

On est juste douze millions en île de France... dont deux millions à Paris, mais il est là. En chair et en os, à deux mètres de ma personne scandalisée.

Je remarque que tout le monde est surpris qu'on se connaissent déjà... Alors je réponds, contenant ma rage intérieure.

« Salut... Damian. »

Le boss réagit avec enthousiasme :
« Eh ben, des retrouvailles ! Quelle chance, c'est parfait !

Alors, Carolina, voici effectivement Damian, un autre chargé de com marketing et média. Vous allez pouvoir faire équipe de manière efficace assez rapidement, alors !
Haha, le monde est petit. »

Oui... le monde est très petit... minuscule.

J'ai les yeux braqués sur Damian qui s'assoit, en m'observant aussi. Je vois même qu'il regarde ma main gauche... Je suis sûre qu'il constate que je n'ai pas d'alliance.

J'ai déjà envie de lui cracher au visage.

Putain, ça ne fait que trois secondes qu'on est face à face après neufs années sans se voir et il commence déjà son manège...

Mais de ce fait, je ne peux pas m'empêcher non plus de regarder aussi sa main. Et je vois qu'il n'a pas d'alliance non plus, mais... une marque de bronzage à l'annulaire qui laisse penser qu'il en portait une.

Donc :
Soit, il a été marié et il est séparé depuis peu.
Soit, il est marié et tente de le cacher...

Connaissant le bougre, je suis presque certaine que la deuxième hypothèse est la bonne.

Mon regard enragé contraste avec son air satisfait. Il est beaucoup trop content de me revoir... Il ne sait pas que je vais me faire un plaisir de calmer sa joie rapidement.

J'entends que la réunion commence mais je sais que lui comme moi sommes trop troublés pour écouter.
Je baisse les yeux sur mes fiches en faisant semblant de m'y intéresser.

Damian... J'ai tellement pleuré à cause de toi.
J'ai eu tellement mal, j'ai mis tellement de temps à me remettre sur pied après toi...

Même s'il est encore plus dangereusement beau qu'avant, avec son allure d'homme accompli, sa barbe finement taillée et son costume hors de prix, je sais qui il est.

Je n'oublierai jamais à quel point il peut détruire un cœur avec son nom gravé dessus, sans aucun scrupule.

...J'étais malade de lui... malade dans tous les sens du terme.

Et je me sens tout à coup totalement vulnérable d'être à nouveau face à lui, même après toutes ces années.

Il a bousillé toute ma confiance pour ce premier jour que j'attendais tant...
Je ne veux que m'enfuir, maintenant. Trop chamboulée par tous les souvenirs de cette souffrance ravivée.

Non...

Non, je suis ici, parce que je le mérite.

Je ne foutrais pas cette opportunité en l'air à cause de lui. Il ne représente plus rien à mes yeux... plus rien.

Aujourd'hui, il n'est qu'un étranger. Il est là, mais il n'est rien.

Un simple collègue... oui, il est juste un collègue.
Juste un collègue...

« Carolina, à toi l'honneur, on t'écoute ! »
Merde.

Le directeur me donne la parole maintenant, alors que je n'ai absolument rien suivi de ce qu'ils ont dit jusqu'ici.