Juste un collègue...

Le plongeon

Je sors peu à peu du sommeil, en sentant qu'on me serre.

Damian... C'est lui qui me serre.

Je suis complètement lovée dans ses bras... Mais je n'ai pas envie d'en sortir. Surtout que je comprends que c'est parce qu'on atterrit, qu'il me tient comme ça. Il sait que j'ai peur, alors il fait ça pour calmer mon anxiété.

J'admets que c'est efficace. Son étreinte m'apaise, je veux garder les yeux fermés et rester encore un peu dans ce paradis interdit.

Je ressens la chaleur de sa peau, mon front posé sur le muscle de son cou. J'espère que je ne lui ai pas bavé dessus... sa belle chemise blanche serait foutue.

Son bras enlace mon corps, et je me rends compte que ma main est carrément posée sur la sienne. Mon sommeil m'a fait faire tout ce dont mon corps a envie en étant aussi proche de lui. Et bien sûr, Damian n'a rien fait pour empêcher ça. Il l'a même encouragé, mais je ne peux pas lui en vouloir, il m'a clairement exprimé ses intentions envers moi.

J'ai l'impression d'être au volant d'une voiture et de conduire à toute vitesse pour consciemment foncer dans le mur, en laissant Damian répondre à mon immense besoin de le retrouver.

Cette histoire est ma malédiction.

Suis-je allée trop loin pour faire machine arrière maintenant ? Je suis déjà allée suffisamment loin pour souffrir à nouveau. Quoiqu'il se passe, à ce stade, j'aurai mal, de toute façon.

« Caro... » Il chuchote, pensant devoir me réveiller.

Oui... Parce que je fais semblant d'être encore ensommeillée, pour pouvoir encore profiter de ma bêtise. Je me redresse doucement et regarde si je n'ai pas trop saccagé son vêtement, puis je reprends ma place, me préparant à quitter l'appareil.

« Pardon, Damian.
- Tout va bien. On va dire que c'était le médicament. »

Il me fait un sourire complice, et je le remercie du regard, admettant mon embarras, à nouveau.

Je suis en colère... contre moi-même. Je ne lui en veux même pas, à lui. Il n'a rien fait de mal, techniquement. Je traîne cette rancune depuis tellement d'années... Mais je me refuse d'oublier. Je ne dois pas oublier à quel point il m'a détruite, et peut le faire encore.

Nous descendons de l'avion et nous nous rendons à Cannes avec une voiture louée par l'entreprise. Il n'y a qu'une quarantaine de kilomètres à parcourir. Ça me laisse l'occasion d'en savoir plus sur son petit garçon et leur vie à deux. Damian est plutôt attendrissant quand il parle de son fils, et il semble vraiment heureux d'être père.

Il est déjà tard dans l'après-midi.

L'attente à l'aéroport est toujours assez longue avec toutes les formalités avant d'embarquer, puis le temps du vol et des autres procédures après l'atterrissage... Il est déjà dix-huit heures trente, lorsque nous arrivons.

C'est un bel hôtel, pas trop grand et à l'aspect ancien, ce qui lui donne un certain charme. Le séminaire commence demain, dans une sorte de palace d'un grand groupe hôtelier, à quelques rue d'ici.

Beaucoup de nos confrères ont préféré loger là-bas directement. Pour ma part, je serais bien plus à l'aise dans ce joli petit coin plus authentique.
Il fait encore très chaud, même à cette heure-là.

Cette canicule n'en fini pas... Je vois la plage par les baies vitrées pendant qu'on attend à la réception. La mer est belle et tentante... Je veux aller me baigner.

Damian remarque que je regarde le rivage, rêveuse, et me propose :
« Vas-y. Va profiter.
Tu peux aller te changer dans les commodités là-bas, elles sont certainement prévues pour ça. Je m'occupe des chambres.
- C'est vrai ?
- Oui, vas-y.
- Oh... Merci. J'avoue que je n'ai qu'une envie, c'est de plonger dans cette eau turquoise.
- C'est sûr que Paris ne nous manquera pas ici. Va nager, je te rejoindrai plus tard.
- Tu t'occupes des chambres ? Deux chambres séparées, hein ? Pas d'entourloupe, M. Markovic !
- Hahaha, deux chambres, oui. Mais l'une à côté de l'autre. Je te l'ai dit, ici je veillerai a ce que personne ne tente quoique ce soit.
-... J'ai survécu jusqu'ici sans garde du corps, tu sais ? Bien, fais comme tu veux. Et je pourrais aussi te surveiller, comme ça !»