Il repensait à leur rivalité. Toutes ces fois où ils ne s'étaient pas supportés sur la piste et en dehors. Avec le recul, il trouvait cela plutôt amusant. Les batailles sur la pistes, les joutes verbales en dehors, aujourd'hui il se rendait compte que sans cela, tout serait différent. Le fameux « inchident » lui revenait en mémoire et avec lui les nombreuses conférences de presse ponctuées de balles perdues.
Il repensait aux accolades après une course plus ou moins bonne. Il se rendait compte à quel point son humeur en dépendait. Il se disait que c'était un moyen comme un autre de se redonner du courage avant ou après un combat sur la piste et que celles qu'ils partageaient étaient différentes de celles que pouvaient lui faire les autres pilotes ou son propre coéquipier.
Il repensait à cette année, où ils se battaient pour la première place du championnat et comment ça s'était terminé. Il se sentait fier d'avoir tout donné face à lui sans jamais s'apitoyer sur son sort. Au fond de lui, il se souvenait comment sa propre écurie avait lâché la bataille et au combien il leur en voulait mais il se disait que cela n'avait plus d'importance.
Mais ses souvenirs n'étaient pas tous en lien avec son sport.
Il repensait à toutes ces discussion plus ou moins privées. Il s'étonnait au début de la proximité qu'ils pouvaient avoir mais s'en était vite accoutumé. Il appréciait. Il savourait ce genre de moments sans l'avouer réellement.
Il repensait à leur premier baiser. Il se souvenait parfaitement des sensations que ça lui avait procuré et du bonheur qu'il avait ressenti en comprenant que ses sentiments étaient réciproques. Comment il s'était senti si stressé quand il avait avoué ce qu'il ressentait à son égard.
Il repensait à sa première rencontre avec sa nouvelle belle-famille. Il avait encore en mémoire l'accueil si chaleureux qu'ils lui avaient tous réservé (à l'exception de son beau-père mais il ne s'en formalisait pas). Il savait quelles relations chacun entretenait avec lui et le respectait entièrement. Il se remémorait aussi la joie sur le visage de sa mère quand il lui avait présenté son bien-aimé et la façon dont l'avait charrié son frère sur le sujet. Il ne lui en voulait pas, il savait que c'était pour le faire rire.
Il repensait aux soirées passées en tête à tête, à regarder des films ou à parler de tout et de rien. Dieu qu'il appréciait ces moments. C'était pour eux une façon de se retrouver, en dehors de la piste et loin des caméras si insistantes. Il se souvenait de l'attention avec laquelle il écoutait les histoires de jeunesse qu'il lui racontait et de son rire si spécial quand quelque chose l'amusait.
Il repensait à leur premier « je t'aime ». C'était simple mais puissant. Il s'était étonné de se surprendre à espérer l'entendre une nouvelle fois, jusqu'au moment où ce fut le cas. Pour lui, l'entendre de la bouche de celui qu'il aimait valait toutes les richesses et toutes les victoires du monde et il avait hâte de le lui dire à nouveau.
Lorsque l'hymne néerlandaise retentissait dans le ciel de Zandvoort, voilà ce que se disait le pilote monégasque en observant son bien-aimé, une fois de plus sur la plus haute marche du podium.