Chapitre 4 : Gabriel

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-Je suis rentré !
-Ah mon fils préféré ! Alors, cette journée ?
- Papa, je suis ton seul fils.
- C'est pour ça que tu es mon préféré.
- Laisse tomber. La journée, comme d'hab. J'ai eu une interro en français et je pense avoir bien réussi. Et il y a une nouvelle aussi, Cindha. Elle est dans ma classe.
- Bonne journée, donc. Et cette Cindha à l'air de t'avoir tapé dans l'œil !
- Depuis quand tu parles comme ça, toi ?
- C'est comme ça qu'on dit quand une personne te fascine, non ?
- Oui, si tu veux. Et sinon, toi ça va ?
- Bof. Je ne sais pas à quoi ressemblera cette planète dans dix ans...
- Pourquoi tu dis ça ?
- Regarde autour de toi, fiston. La planète souffre. Et la cause, c'est nous. Regarde les arbres, les plantes et les animaux, ils partent les uns après les autres pour laisser place aux immeubles, à un énième centre commercial ou encore à une nouvelle route. Les températures ne cessent d'augmenter au fil des années, l'eau potable se fait de plus en plus rare et l'air devient de plus en plus chargé en dioxyde de carbone. On est dans une période de transition. Personne ne sait ce qui va se passer, personne ne connaît l'avenir de cette planète.
- Et toi, qu'en penses-tu ?
- De quoi ?
- D'après toi, que va devenir cette planète ?
- Sans doute une poubelle géante. D'ici quelques années, si on ne fait rien, on ne sera peut-être plus là.
- Tu veux dire que l'espèce humaine va disparaître ?
- Il y a de forte chance, l'espèce humaine et toutes les autres formes de vies présentes aujourd'hui sur Terre.
- Que peut-on faire pour changer notre destin ?
- Peut-on seulement le changer ? Je crois qu'il est trop tard pour revenir en arrière. Nous sommes dans une impasse.
- Alors quoi ? On va laisser la planète mourir sans rien faire ?
- La planète, elle, survivra. Mais pas nous, pas les zèbres, les chats ou encore les roses. Tu sais, au fond, nous ne représentons qu'une seconde dans la vie de la planète Terre. Le schéma des dinosaures est en train de se reproduire, au détail près que ce ne sera pas une météorite ou un phénomène naturel qui causera notre perte. Peut-être que la Terre n'aura plus le même climat quand nous ne serons plus là, peut-être qu'une autre forme de vie se développera à sa surface dans des millions d'années... On ne sait pas et on ne saura jamais.
- Tu n'as pas vraiment répondu à ma question. Pourquoi personne ne fait rien pour empêcher cela ?
- Admettons qu'il y est une solution pour pallier ce problème, ce qui est peu probable, cela demanderait de l'argent, beaucoup d'argent. Et du changement. Nous sommes plusieurs milliards d'humains sur Terre, et chacun d'eux devrait participer à cette solution. Tu t'imagines dire aux habitants de ne plus utiliser la voiture, de ne plus regarder la télé...? Moi, non. Ce serait passer pour un fou. Même si tu leur disais ce qui est en train de se passer, ils te croiraient pas, ou nieraient la réalité. Et puis, aucun dirigeant ne veut prendre la responsabilité de ce projet. Cela entraînerait des guerres, des massacres, des révoltes...
- Si je résume ce que tu es en train de dire, personne ne fait rien pour une question d'argent, de politique et de pouvoir ?
- En simplifiant au maximum la situation, c'est à peu près ça oui. Les dirigeants, et surtout le prince et son père, préfèrent fermer les yeux sur ce qui se passe. Ils font comme si de rien était.
- Ce ne sont que des...
- Des idiots ? Oui, ils ont trop d'estime et d'égo pour penser une seconde aux autres. Crois moi, si je le pouvais, je nous sauverai. Mais ma parole ne vaut rien. Peut-être qu'au fond, on mérite ce qui nous arrive.
- C'est quand même triste, non, de se dire que l'on est en train de se tuer à petits feux, en regardant la braise prendre du volume et de la force, sans rien faire ?
- Le principal défaut de l'être humain ressort dans ce que tu es en train de dire. L'être humain est un être lâche, égoïste et qui a tendance à se défiler à la première difficulté venue.
- Tu m'as enlevé ma joie. Je me sens vide, maintenant. Comme une coquille sans contenue.
- Il est parfois important de voir la réalité en face pour ne pas se faire de fausses illusions.
- Sans doute. Même si des fois, je préférerai rester insouciant.
- Allez, on arrête la déprime ! Je vais préparer le repas, je t'appelle quand c'est prêt.
-Ok, merci.

La fille aux yeux verts Où les histoires vivent. Découvrez maintenant