Chapitre 13 : Cindha

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Une heure de pause. Je n'en peux plus. Je suis à deux doigts de tout lâcher. Je me sens encore plus étrangère qu'avant. Mais, maintenant, j'ai une bonne raison d'avoir cette sensation. Écrire. Voilà ce dont j'ai besoin. Confier mes peurs, mes doutes, mes sentiments à quelqu'un, ou plutôt à quelque chose. Je sors mon Journal, m'assoie confortablement sur un banc, et commence une nouvelle page.

"Cher Journal,

Aujourd'hui, ça ne va pas. Je me sens mal, j'ai comme une boule dans l'estomac qui me comprime le ventre. Je me sens seule. Terriblement seule. Pas dans le sens physique, non, j'ai des amis, enfin deux pour être honnête, mais plutôt dans le sens psychologique. J'ai compris d'où vient ce sentiment de solitude, cette sensation d'être différente, mais ce n'est pas pour autant que je me sens mieux. Beaucoup de questions, d'interrogations se posent dans ma tête, sans que je puisse y répondre. La première, c'est d'où vient ce pouvoir, pourquoi je l'ai, et est-ce que je suis la seule comme ça, ou est-ce qu'il y en a, comme moi, qui se cache ? Ce qui est le pire dans cette situation, c'est que je ne sais rien. Pourtant, au fond de moi, je sais comment trouver les réponses à mes questions, mais j'essaie de me convaincre que ce n'est pas la solution. Gabriel a raison, je dois savoir qui sont mes parents. Comment, je ne sais pas, mais je sais avec certitude que c'est eux qui détiennent la clé de la porte à laquelle je me heurte."

Qu'est que ça fait du bien d'écrire ! C'est une façon pour moi d'extérioriser ce que je ressens, et parfois cela me permet de prendre du recul vis à vis de certaines situations que je vis. Et puis, je trouve cela plus facile, de me confier à du papier qu'à une personne qui peut juger, critiquer ce que je dis, ou pense.

-Tu viens Cindha ? On doit passer voir le prof d'histoire pour lui rendre le travail avant d'aller en français.
- J'arrive. Tu as pensé à le prendre ?
- Oui c'est bon.
- Parfait. Allons-y.

J'aperçois Maeve nous dévisager, mais je décide de ne pas y prêter attention.

-Voici notre travail, monsieur.
- Parfait. Posez-le sur les autres.
- Au revoir, M. Rou.
- À demain.

-Donc aujourd'hui nous allons continuer le cours de la dernière fois qui portait sur le fantastique et l'imaginaire. Sur cette heure, nous allons approfondir la notion du surnaturel. Quelqu'un pourrait-il me donner la définition de ce mot ? Oui, Maeve ?
- Le nom surnaturel désigne ce qui ne peut s'expliquer par les lois qui encadrent la nature, et par conséquent, ce monde.
- Très bien. Yannis, donne moi un exemple pour illustrer ce que vient de dire ta camarade.
- Mmmh…Je ne trouve pas.
- Ce n'est pas si compliqué ! Allez, fais un petit effort !
- Heu….On pourrait imaginer une personne capable de faire pousser des arbres ?
- Un jardinier est capable de faire ça.
- Bonne remarque, David. Précise ton idée, Yannis.
- Alors…il ferait pousser ces arbres…avec sa pensée ?
- Bien. Et est-ce que quelqu'un peut m'expliquer pourquoi ce genre de choses n'est pas possible dans notre monde ?

Je ne me sens pas bien. J'ai la tête qui tourne, et j'ai l'impression de tanguer.

-Cindha, ça va ?
- Non.
- Madame, Cindha ne va pas bien, elle semble malade.
- Cindha, qu'est que tu as ?
- J'ai mal au crâne, et envie de vomir.
- Maeve, tu veux bien l'accompagner à l'infirmerie, s'il te plaît ?
- Oui, madame.

Je sens Maeve m'aider à me relever. Je la distingue vaguement, à côté de moi, en train de me guider dans les couloirs du lycée, silencieux à cette heure-ci.

-Qu'est-ce que tu as ?
- Rien, j'ai dû attraper un coup de froid cette nuit.

Je vois Maeve plisser des yeux, l'air peu convaincu. Il faut dire que mon excuse est peu crédible.

-Bonjour les filles. Que se passe-t-il ?
- C'est Cindha, elle a mal à la tête, et est nauséeuse.
- Très bien. Je vais m'occuper d'elle. Tu peux rentrer en cours. Tu viens de quelle classe ?
- Seconde 1.
- C'est donc ton dernier cours, c'est bien ça ?
- Oui. On finit à quinze heures.
- Très bien. Bon alors, tu nous fais une petite grippe ?
- Je ne sais pas, je me sens…fatiguée.
- Tu as mal dormi la nuit dernière ?
- Heu…oui. J'ai eu dû mal à trouver le sommeil.
- Tu étais stressée, anxieuse, triste…?
- Plutôt anxieuse, et triste aussi.
- Tu veux me dire pourquoi ?
- Je préfère garder ça pour moi, désolée.
- C'est tout-à-fait ton droit. Est-ce que tu veux te reposer ? J'ai un lit vide dans la pièce d'à côté.
- Je veux bien, merci.
- Allez, viens.

La journée est enfin terminée ! J'ai vraiment cru que ce moment n'arriverait jamais. Et encore, j'ai fini à quinze heures.
Je le rattrape et lui fais face. Il semble encore surpris que je vienne lui parler de moi même, à croire qu'il me prend pour une fille associable.

-Salut !
- On s'est déjà vu aujourd'hui.
- Tu peux venir chez moi ce soir vers dix huit heures ?
- Oui, tu veux quoi ?
-  Bon écoute, j'ai besoin de ton aide.
- Ok. Dans quel domaine ?
- Tu avais raison.
- Tu peux détailler s'il te plaît ?
- Tu as raison. Je dois retrouver mes parents. Et j'ai besoin de toi pour y arriver.


La fille aux yeux verts Où les histoires vivent. Découvrez maintenant