4: Pirates

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Je suis réveillé par mon mal de mer qui refait soudainement surface.
Il fait jour dehors, les quelques rayons qui passent à travers les vitres sales suffisent à peine à éclairer la cabine.
Je m'assois en espérant que mes nausées vont miraculeusement disparaître.
Je me sens tout collant et répugnant, j'ai du sang et des larmes séchées sur la moitié du visage. Comme j'aimerais prendre un bain... J'essuie d'un revers de main le filet de bave au coin de ma bouche.

"Tu es réveillé, parfait. J'ai du boulot pour toi.

-Seigneur dieu !"

Je pose une main sur mon cœur, j'ai cru faire un arrêt. Je me tourne vers la voix, c'est le capitaine. Il est assit à son bureau.
Comment j'ai pu le rater ? Sa présence ne passe pourtant pas inaperçue.

"Tu peux simplement m'appeler Capitaine comme les autres."

Ha. Ha. Très drôle.
Je ne peux m'empêcher de me montrer ironique, mais j'ai l'impression qu'il a lu en moi.
Il se lève et se poste juste devant moi. Bon, je devrais peut-être me lever...
Je me mets debout pour lui faire face, mais tout ce que je vois c'est ses larges épaules à hauteur de mes yeux.
Il semble attendre quelque chose de ma part, heureusement pour moi je suis assez vif d'esprit.

"Oui Capitaine.

-Bien. Tu as faim ?"

Oh que oui, je n'ai rien avalé depuis mon dernier repas avec le lieutenant. Paix à son âme.
Je hoche la tête.
Il se penche à ma hauteur, ses yeux gris accrochent mon regard. C'en est presque envoûtant.

"Tu vas devoir travailler pour ta pitance."

Je hoche la tête sans réfléchir. Je n'ai pas vraiment le choix, mais honnêtement, avec un regard comme le sien je n'aurais pas pu le contredire.
Il porte une main à son oreille.

"J'entends rien.

-Oui Capitaine."

Satisfait, il pose sa grosse main dans mes cheveux et me décoiffe encore plus que je ne l'étais déjà. Il me prend pour un gamin, c'est un peu humiliant...je ne suis pas si jeune.

"Je te félicite, tu es monté au grade de moussaillon."

Je fais la moue, c'est vraiment pas le rêve d'être mousse, mais me traiter de "moussaillon" c'est carrément dégradant !
Il s'attend peut-être à ce que je le remercie ? Quel toupet !
Il m'emmène vers la porte qu'il rabat du pied et me pousse sur le pont.
Je manque de m'affaler face contre terre.
Tout l'équipage suspend son travail pour me regarder.
À ma suite, le Capitaine prend la parole.

"Matty va s'occuper des corvées désormais, je vous le laisse. Et par pitié donnez lui des vêtements."

Je suis rouge de honte, ils se mettent tous à rire de mon allure pendant que le capitaine retourne à sa cabine et s'y enferme.
Je n'ai même plus mon chemisier déchiré pour me cacher.
L'un des matelots me jette une loque en riant.

"Enfile ça fillette !"

Je ne fais pas attention à cette ridicule qualification qu'il me donne.
Je déplie le tissu, c'est une chemise jaunie par le temps, et beaucoup trop grande pour moi, mais je ne vais pas faire le difficile. Je l'enfile et un autre derrière moi me hurle quelque chose.

Moussaillon [BxB]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant