Allyson
Mes yeux restent fermés, figés par la peur de voir son poing s'abattre sur mon visage. Mais je réalise peu à peu qu'il a arrêté son geste. Il ne veut pas me faire de mal. J'ouvre lentement les yeux, hésitante, pour comprendre ce qu'il se passe... et ce que je découvre me surprend. Il a baissé son poing. Par choix. Pour ne pas me blesser. Il me regarde avec inquiétude, ses yeux plantés dans les miens. Je détourne le regard pour fuir son regard insistant, mais il continue de me fixer, ce qui me met terriblement mal à l'aise. Il s'approche doucement, ne laissant que quelques centimètres entre nos corps. Je dois lever la tête pour croiser ses yeux, pendant que lui baisse la sienne pour me voir. Sa respiration est aussi saccadée que la mienne, rapide, instable.
J'avance ma main vers son bras sans oser le toucher. Mais c'est lui qui comble la distance, posant doucement ma main sur sa peau. Il inspire profondément, observe ce contact silencieux, puis lève son autre main et la pose délicatement sur mon visage.
— Arrête ça, je t'en supplie, murmuré-je les larmes aux yeux.
— Ça quoi ?
— Te battre... Pourquoi autant de violence ?
— C'est pour me défouler, Miller.
Quelques larmes coulent sur mes joues. Il les essuie du bout de son pouce. Je recule brusquement, retirant ma main de son bras, et m'éloigne à grands pas. Je traverse les couloirs pour sortir de l'établissement, croisant des regards posés sur moi, curieux, insistants. Je ne les regarde pas. Ce sont que des abrutis. Allez-vous faire foutre. Je continue de marcher sans destination précise. Je m'arrête finalement devant une ruelle où se trouve un magasin de guitares. J'entre, attirée comme par un appel silencieux.
Mes yeux balayent les instruments, et je m'arrête sur une guitare en particulier. Elle me semble familière. Elle ressemble à celle de mon père...
Je la prends en main et commence à jouer Wonderwall d'Oasis. Ce morceau me réchauffe le cœur. C'est cette passion que je partageais avec lui. Les notes sonnent juste, comme une évidence. Je souris, portée par les souvenirs. Sous ma paume, je sens le bois, abîmé, griffé. Je retourne la guitare... Mon cœur s'arrête.
Les initiales P.M. y sont gravées. Pierre Miller. Le guitariste le plus connu d'Italie. Mon père.
Je me demande encore pourquoi il a décidé d'en finir. Il m'avait, moi... mais il a préféré rejoindre ma sœur, dans ce monde meilleur, me laissant seule avec le diable... ma mère.
Je cours jusqu'au comptoir et m'adresse à l'homme de la caisse :
— Où avez-vous trouvé cette guitare ?
— Une femme nous l'a vendue. Mille dollars.
— Comment s'appelait cette femme ?
— Alicia Miller.
Oh la garce... Je sors un chèque de deux mille dollars, volé dans le sac de ma mère, et rachète la guitare sans hésiter. Je quitte le magasin, l'instrument serré contre moi. Il est l'heure de rentrer. Les cours sont finis depuis plus de trente minutes.
J'entre dans la maison en entendant les hurlements de ma mère et de mon beau-père. Je fronce les sourcils, confuse, et demande ce qu'il se passe. Ma mère me fusille du regard. Mon beau-père, lui, me regarde avec douceur. Il murmure quelque chose à ma mère, puis se tourne vers moi.
— Ma puce, monte là-haut voir ton frère. Je viens te voir dès que j'ai fini de parler avec ta mère.
Je le fixe une dernière fois avant de monter les escaliers et rejoindre Ayden. Je m'assois à côté de lui dans son lit et lui demande :

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Linked Fates
RomanceAllyson quitte l'Italie pour Southend-on-Sea, en Angleterre, emportant avec elle le poids d'un passé secret qui l'a lentement consumée. Dans cette nouvelle ville, elle s'enferme dans le silence, cherchant refuge dans des mondes imaginaires pour écha...