Allyson:
Cela fait des jours que les mots de Marius tournent dans ma tête, sans jamais me laisser en paix.
– Tu sais... on devrait peut-être arrêter de faire semblant d'être ensemble. La fille que je voulais... elle m'aime. Et j'aimerais vraiment sortir avec elle. Donc, on devrait peut-être s'arrêter là. Tu sais très bien que tu es mon amie, que je tiens à toi, et que je serai toujours là si tu as besoin d'aide... mais on ne peut plus continuer à se mentir.
Sa voix était douce, presque tendre. Il ne voulait pas me blesser. Il voulait juste être honnête. Peut-être qu'au fond, il avait raison. Peut-être que ce mensonge entre nous avait assez duré. On faisait semblant. Lui pour oublier son obsession, moi pour oublier le vide que m'a laissé Ewen.
Autour de nous, les élèves passaient dans les couloirs du lycée comme des ombres pressées, mais leurs regards s'arrêtaient tous sur moi. Ils murmuraient dans mon dos, comme si je portais une pancarte invisible : « Regardez-la, c'est celle qui s'effondre en silence. »
Depuis qu'Ewen n'est plus dans ma vie, je dors mal. Très mal. Mes nuits sont des cauchemars, mes journées un brouillard. Je bois trop pour une fille de mon âge. Je ne mange presque plus. Et Ayden l'a remarqué. Il a caché toutes les bouteilles d'alcool de la maison, toutes les lames, tous les couteaux. Il pense que ça suffira. Il ignore que le vide trouve toujours un moyen de faire mal autrement.
Je suis en train de sombrer, et je ne vois personne tendre la main pour me retenir.
– Je comprends, Marius. Va vers elle. Rends-la heureuse. Donne-lui ce que personne n'a su lui offrir. Et... sois heureux, surtout. Moi, je vais bien.
Mensonge. Encore un.
Il m'a serrée contre lui, sincère, et il est parti rejoindre cette fille dont il rêve depuis longtemps.
Il a droit à son bonheur.
Moi, je n'ai droit à rien.
Peut-être que je ne suis pas faite pour être aimée.
Une silhouette familière approche. Pendant une seconde, mon cœur bondit. Ewen ? Non. Loris.
– Comment tu te sens ? me demande-t-il doucement.
Il le sait. Il lit dans mes yeux ce que je cache aux autres.
– Je vais mieux, je réponds avec un faux sourire.
Mensonge. Encore.
Je m'éclipse. Je marche, incapable de respirer normalement. Mes larmes brûlent mes joues. Je n'essaie même plus de les cacher.
Je suis fatiguée. Trop fatiguée.
Je continue à marcher, jusqu'à bousculer quelqu'un. Je m'excuse machinalement, mais une main attrape mon bras.
– Est-ce que ça va ?
Cette voix.
Ewen.
Je lève les yeux. Il est là, ses yeux plantés dans les miens, inquiet.
– Oui... je vais bien, je murmure. Je suis juste un peu malade. Je vais rentrer me reposer.
Il ne me croit pas. Mais je tourne les talons. Je ne veux pas qu'il voie dans quel état je suis.
Je fais pourtant quelque chose d'impulsif : je m'approche de lui et je l'embrasse. Comme si ce baiser était la seule chose réelle dans ma vie qui s'effondre.
Il reste figé, surpris. Puis il me serre. Fort. Trop fort. Comme s'il avait peur que je disparaisse.
Mais je repars. Je monte chez moi, seule, vidée. Je m'effondre sur mon lit, incapable d'arrêter de pleurer. Ma gorge brûle, ma respiration est hachée. Je me replie sur moi-même, tremblante, étouffée par un trop-plein d'émotions.
Je ne veux pas mourir.
Je veux juste que ça arrête de faire si mal.
Je ne sais pas combien de temps je reste là. Peut-être quelques minutes. Peut-être une heure.
Puis j'entends des pas précipités dans l'escalier.
La porte de ma chambre s'ouvre brutalement.
Ewen.
Il s'avance d'un pas hésitant, puis s'arrête en me voyant recroquevillée, le visage inondé de larmes.
– Allyson...
Sa voix se brise.
Je tourne la tête, incapable de parler.
Il vient s'asseoir au bord du lit, doucement, comme s'il avait peur de me casser encore plus.
– Je suis désolé, murmure-t-il. Je suis tellement désolé... Je n'aurais jamais dû partir comme ça. Je n'aurais jamais dû te laisser seule. Je... je t'aime, Ally. Et ça me fait peur. J'avais peur de tout gâcher. Peur de te blesser. Peur d'être comme... lui.
Il baisse les yeux, honteux.
– Et j'aurais dû te dire pour mon frère. Je voulais te protéger, et j'ai fait pire. Je comprends que tu me détestes, mais je suis là. Je reste. Je ne pars plus.
Je tremble. Je renifle. Je n'arrive pas à trouver mes mots. Alors je fais la seule chose que je peux faire.
Je me jette dans ses bras.
Il me serre contre lui comme si sa vie en dépendait. Ma joue contre son torse, j'entends son cœur battre à toute vitesse.
– Je suis là, répète-t-il. Je suis là, je suis là...
Il me caresse les cheveux, pose un baiser sur mon front, puis un autre sur mes joues mouillées, comme s'il voulait effacer toutes mes larmes.
Je relève la tête.
Nos regards se croisent.
Il m'embrasse. Lentement. Avec une douceur que je ne lui connaissais pas. Un baiser qui dit tout ce que les mots n'arrivent plus à contenir.
Je m'y accroche comme à un dernier refuge.
C'est à ce moment-là que la porte s'ouvre une nouvelle fois.
Ayden.
Il s'arrête net en nous voyant. Son souffle se coupe.
Je m'écarte légèrement d'Ewen, essuyant mes larmes du revers de la main.
Ayden avance, le regard inquiet, perdu.
– Allyson... tu m'as fait peur. J'ai cru que... enfin... je...
Il n'arrive pas à finir sa phrase. Ses yeux brillent.
Je me lève et je vais vers lui. Il hésite, puis me serre dans ses bras, un câlin fort, protecteur, presque désespéré.
– Je suis désolé, souffle-t-il contre mes cheveux. Désolé de pas avoir vu que tu allais aussi mal. Désolé de pas avoir été là. Mais je suis là maintenant. Et je te lâche plus.
Ewen se lève à son tour. Les deux frères se regardent. Il y a des choses à régler, mais ce n'est pas le moment de hurler.
Pas ce soir.
Ce soir, on respire.
Tous les trois.
Ensemble.
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Linked Fates
Любовные романыAllyson quitte l'Italie pour Southend-on-Sea, en Angleterre, emportant avec elle le poids d'un passé secret qui l'a lentement consumée. Dans cette nouvelle ville, elle s'enferme dans le silence, cherchant refuge dans des mondes imaginaires pour écha...
