mai

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jeff, je le déteste de m'avoir fait détester le mois de mai
dans mon enfance, mai était printemps
le ciel d'un bleu net et éclatant
mai, c'est les fleurs
c'est ma mère
et maintenant, mai,
c'est lui qui arrive,
il y a quatre ans,
qui prend mon corps d'enfant
et qui le déchire
qui attend que je reparte
en lambeaux
mai, c'est moi qui ne pars pas
et qui reviens toujours
mai, c'est des litres de larmes sur mon oreiller
que le temps n'absorbe pas
aujourd'hui, lorsque je me couche
je sens l'oreiller rempli de l'eau
qui ne s'est jamais évaporée
mai, c'est mes yeux fermés
pour arrêter de le voir
c'est ses paroles qui me tiennent les jambes
c'est ses bras qui coupent les miens
mai, c'est lui
c'est lui partout, alors qu'il n'est pas là
mai, c'est moi et ma honte dans les bras
c'est moi qui porte mon cadavre
c'est moi qui me suicide et c'est moi qui nettoie

jeff, mai est une toile qu'on a saccagée
un printemps au goût d'enfer
une enfant enterrée

mai est une enfant morte
une enfant sale qu'on a traînée dans la boue
à qui l'univers donne des fleurs
pour soigner les bleus sur ses genoux

mais jeff, je suis une fleur pourrie
qu'on essaie de faire revivre
je suis une fleur noyée attachée à ta guitare
une fleur noyée qu'on a arrachée de toi

jeff, je ne veux pas de mai
je veux d'un printemps où tu fleuris
gentiment, à côté de moi

je donnerais tous les soleils du monde pour une respiration de toi
je vivrais l'hiver
je vivrais dans le froid

jeff, je veux m'échapper d'ici
renaître où mai n'existe pas
jeff, je veux mourir dans tes bras
je veux partir comme ça

les fleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant