Jack, chocolat et petit pistolet à vodka
Amélie
Assise sur le canapé vert du salon, j'attrape une énième poignée de pop-corn coulant de caramel et grignote devant un film de Noël bien pourri mais qu'on adore détester. J'entends mes parents discuter doucement dans le jardin, m'observent à la volée à travers la baie-vitrée, puis ils se détournent rapidement quand ils croisent mon regard. Je rabats la capuche de mon sweat pilou-pilou sur ma tête, m'enfonce un peu plus dans les coussins moelleux, et reporte mon attention sur le film.
Zut, c'est lequel le prince déjà ?
Deux semaines se sont écoulées depuis ma dernière victoire, ainsi que 4 entraînements — si l'on compte celui qui a eu lieu tout à l'heure — marqué sous le signe de la solitude. Un salut hâtif échangé avec ma meilleure amie, puis plus rien. Silence radio.
À la fac, pareil. Hormis en cours où personne ne parle tellement nous sommes concentrés sur les dire des professeurs, c'est à peine si elle me parle. Les inter cours sont paisibles car elle pianote inlassablement sur son téléphone et disparaît plus rapidement qu'elle n'est apparue lors de la fin des cours. Je la vois en coup de vent, par ci, par là, sans réussir à avoir une conversation en entier avec elle.
J'aime beaucoup Adam et se qu'il dégage, mais je commence à me sentir jalouse du fait qu'il me vole mon amie, l'une des seules aussi proches, sans que ça ne l'alerte. Elle ne m'a même pas dit explicitement qu'ils étaient ensemble ! Si je l'ai vite compris après la remise des médailles sur ce fichu podium et leur baiser passionné devant l'assemblée, je mérite un minimum d'être informée !
Je soupire au même moment que la baie vitrée fait du bruit, ouverte par ma mère qui pénètre dans la maison. Elle retire les chaussures à ses pieds pour éviter de faire des traces au sol, puis me rejoins en silence sur le grand canapé.
- Tu vas bien ? Elle me demande en passant une main dans ses cheveux emmêlés.
- Oui, et toi ?
Le mensonge me brûle la langue mais je ravale l'amertume qui remonte dans ma gorge avec une mine de dégoût. J'observe un instant la robe rose fluo que porte ma mère et sa ceinture ornée d'un lion en or, histoire de me changer les idées. Mais au final, ça me pique juste les yeux.
Elle replie ses fines jambes nues de côtés pour être entièrement assise sur le canapé, sans cesser de me regarder. Ses yeux bruns me fixent tellement que je n'arrive à comprendre qu'une réplique sur deux de mon film.
- Amélie, tu me mens, elle réplique d'un ton sévère qui ne lui va pas.
Je ris doucement pour appuyer mon détachement mensonger, mais elle se met à froncer des sourcils.
- Ça va, maman. Je suis juste fatiguée de ma semaine et des cours. On a pas mal de choses à rendre et les partiels arrivent à toute vitesse.
- Tu es sûre que c'est une bonne idée d'aller en compétition demain ? C'est quand même dans une semaine tes prochains partiels. Je ne veux pas que tu les loupes.
- Je réussirais. J'ai juste... Nan, rien.
Ma mère attrape la télécommande qui traînait entre elle et moi, et appuie sur le bouton d'arrêt. Je pousse un cri de protestation en tentant d'attraper la manette du saint graal, mais elle tend très haut les bras pour la mettre hors de ma portée. Je me redresse vivement pour essayer de l'atteindre, mais elle met trop d'intention quant à m'empêcher d'y arriver. J'entends la baie-vitrée s'ouvrir une nouvelle fois, devinant que mon père arrive à son tour dans la maison.
VOUS LISEZ
Contre vent et marées
RomanceAmélie Marceau n'a jamais été adepte de compétition. Si elle est brillante dans sa discipline, les courses ne sont qu'un passe temps qu'elle nourrit pour sa propre satisfaction. Pour une dernière année de sport intense, elle a un objectif : accéder...