Chapitre 28

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Une Charline dans l'œil

Amélie

-    Tu peux m'aider ? Je demande à Achille en tenant ma planche à bout de bras.

Il se précipite pour m'aider à la mettre sur une place de la remorque bien trop haute pour moi et je le remercie. Habituée, je monte à l'avant pour sangler l'arrière de ma planche tout en faisant attention que personne ne monte sur le côté ce qui risque de faire pencher et tomber le tout. Je fais de même à l'avant de ma planche vers l'arrière de la remorque et c'est un peu plus laborieux. Lissandre m'aide rapidement sans un mot, lui qui passait par là, avant de repartir aussitôt engueuler des garçons qui se battent avec un mât cassé. Je ris doucement en les voyant imiter un combat digne de Star Wars, ayant même l'audace de menacer Lays. Le pauvre se recule, méfiant du bout cassé bien coupant et plein de débris en carbone. Croyez-moi, ce genre de truc est pire qu'une écharde.

Je les rejoins pour récupérer mon wishbone et ma housse contenant ma voile pour mettre le tout dans la remorque, et comme d'habitude c'est le même débat pour rentrer les wishbones. Quelques parents nous aident comme ils peuvent pour être plus rapides tandis que d'autres nous observent, un peu gênés de ne pas savoir comment faire.

Souvent, deux ou trois parents des plus jeunes viennent avec nous pour accompagner la troupe et soutenir les coachs qui sont vite dépassés quand il y a trop de monde mais cette fois, ils ont décidé d'emmener une seule maman. Quand il m'a dit ça, je n'ai même pas eu besoin de demander laquelle parce qu'il n'y en a qu'une qui est activement là tous les dimanches et les jours d'entraînements. Elle met une pression de zinzin sur son fils qui veut juste s'amuser avec ses amis, mais chacun son problème.

-    Pas comme ça, se permet de dire un homme alors que je pose ma housse dans la remorque.

-    Pardon ?

Il prend ma housse orange et la change de sens pour mettre l'ouverture de fermeture éclair vers l'arrière de la remorque. Outrée, j'attends qu'il termine pour remettre ma voile exactement dans l'autre sens.

-    Pour votre gouverne, si la housse doit s'ouvrir, il vaut mieux qu'elle ne soit pas vers l'arrière de la remorque. Parce que vous voyez, j'appuie avec insolence sur chaque mot, si mon mât glisse avec les vibrations de la route, c'est dans ce sens-là qu'il risque de s'échapper. Alors que comme je l'ai mis maintenant, il ne rencontrera que du tissu et ne risquera pas de partir.

L'homme ouvre la bouche pour répliquer, les sourcils froncés et le nez rouge de colère mais je le coupe.

-    Si jamais je perds un mât sur la route parce que vous avez décidé de changer mon rangement dans mon dos, je me ferai un malin plaisir à vous envoyer la facture d'un mât en carbone. Presque 400 balles pour ce petit truc. Eh ouais, rien que le mât, alors je vous laisse imaginer si la voile disparaît aussi sur la route.

Je me détourne, le menton haut, avant de me tourner une dernière fois.

-    Oh, et vous savez, je vais sûrement aller aux championnats du monde. Je ne veux pas me vanter, mais je n'ai pas quinze ans comme vos enfants, je suis une adulte et je sais mieux que vous comment gérer mon matériel.

Tout le monde nous regarde en ricanant, mais je n'en ai rien à foutre. Je me détourne pour aller vers le conteneur mais un camion m'interpelle en klaxonnant. Le club du Vent d'Ouest arrive dans son minibus avec une autre voiture qui tire la remorque. Je souris en saluant Jocelyn qui conduit l'un des véhicules puis elle se gare négligemment sur un côté. De toute façon, c'est un parking privé.

Pour le national, Lays et Sacha ont jugé bon de regrouper nos deux clubs pour le voyage. Si nous concourrons pour des établissements différents, rien ne nous empêche de passer les quatre jours ensembles dans un camping qui plus est. Lucas descend en premier, secouant ses boucles brunes dès qu'il en a l'occasion. Derrière lui, Noémie sort avec son attitude de princesse habituelle tout en râlant sur son collègue. Quelques autres sortent aussi de la voiture et du minibus mais ils ne sont pas plus de sept en tout, pas grand-chose mais normal au vu de leur petit club. Jocelyn se dépêche de rejoindre mes coachs pour les derniers détails alors j'en profite pour aller voir Lucas qui discute avec la connasse. Son regard se pose sur moi et je perçois une pointe de tristesse qui me transperce le cœur.

Contre vent et maréesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant