If I can dream...
Amélie
Je baille en me redressant, étirant tous les membres de mon corps un à un. Après les courses d'hier et avant encore, mon corps n'est plus que douleur et tension. Nous sommes rentrés tard dans la nuit, alors une petite sieste dans l'après-midi était un passage obligé.
Je me lève et fonce dans la salle de bain tout en enlevant les cheveux roses qui traînent dans ma bouche. Je me passe un coup d'eau sur le visage, lave mes dents et brosse mes cheveux. On dirait que j'ai fait toute une nuit alors que ça fait deux heures que je dors seulement.
J'ai encore du mal à croire que hier était réel. Je suis bel et bien qualifiée pour les championnats du monde. Je ne pensais jamais atteindre ce stade, en réalité. Quand on a prononcé mon nom et que le déluge s'est déversé autour de moi, je pense que si Baptiste n'avait pas été là pour me faire garder les pieds sur terre, je n'y aurais jamais cru. En pensant à lui, un doux frisson parcourt mon corps.
Il m'a attendu. En quatre longs jours de compétition, il m'a attendu sans rechigner jusqu'à ce que je pose mon pied sur le podium. Le souvenir de notre baiser est encore frais dans mon esprit, je me retrouve à vouloir le rejoindre de suite pour réitérer l'expérience.
Je casse mes pulsions en secouant la tête et fonce vers l'escalier qui mène au salon. J'entends la télévision allumée, mais pas de trace des parents. Je cherche partout dans l'espoir de voir la tignasse de ma mère ou les grosses lunettes de mon père mais toujours rien. Bizarre.
Le bruit du micro-onde me fait sursauter. Puis se sont des dizaines de petits bruits de balles qui éclatent partout. Mon cœur se met à battre fort dans ma poitrine et je m'accroupis en cachant ma tête entre mes mains. C'est quoi ce bordel ? On dirait des balles mais en même temps, quelque chose dans mon esprit me dit que les balles font plus de bruit que ça. S'il y avait une fusillade dans la maison, je ne mettrai pas autant de temps à me dire que c'est ça.
Je me relève lentement, les mains tremblantes, puis me dirige vers la cuisine ouverte. Lentement, j'observe la pièce jusqu'à reconnaitre une tignasse blonde, mais bien loin de celle de ma mère. Les boucles descendent en cascade dans le dos de Charline, un vrai sac de nœuds. Ma meilleure amie sursaute quand elle me remarque, manquant de glisser et de finir au sol.
- Charline ! Putain mais qu'est-ce que tu fous, j'ai cru qu'on se faisait attaquer !
- Attaquer de quoi ? Elle demande en portant une main à son cœur. Tu m'as fait peur aussi je te signale ! Et j'ai entendu que tu étais réveillée alors je fais du pop-corn pour qu'on regarde un film !
Je tourne la tête vers le micro-onde qui tourne encore, et en écoutant mieux c'est vrai que c'est le bruit de maïs qui éclate.
- Ouais bah il fait du bordel le sac de pop-corn ! Ils sont mutants ou quoi... je bougonne en allant au frigo pour prendre un verre de jus d'ananas.
Charline éclate de rire en levant les yeux au ciel puis s'occupe de notre nourriture. Je me charge des boissons et des bonbons, et nous voilà dix minutes plus tard dans le canapé, un plateau au dessus de nous deux, regardant les anciens Deadpool en prévision de celui qui vient de sortir.
Pendant les premières minutes du film, on se contente de manger en riant face aux répliques idiotes du héros, puis Cha' pose sa tête sur mon épaule. J'hésite à lui parler de Noémie et de toute cette histoire, même s'il faudra le faire un jour. Ce moment avec elle est tellement précieux que je ne veux pas tout gâcher. En fait, hormis cette affaire qui plane encore comme un fantôme au dessus de nos têtes, tout semble aller bien.
Je vais aux championnats du monde, des sponsors commencent déjà à me contacter, Charline revit, Baptiste est avec moi, et mes moments plus compliqués psychologiquement s'éloignent. Rien de pourrait être mieux, sauf la situation de ma meilleure amie. Rien que d'y penser, j'ai envie de vomir. Et je m'en veux. Beaucoup.
Comme si elle avait lu dans mes pensées, comme avant, Charline ouvre la bouche naturellement pour parler de ça.
- Noémie m'a parlé, de...
Elle déglutit difficilement en souriant.
- D'Adam. Elle accepte de porter plainte avec moi. Elle aussi, elle veut tourner cette page définitivement.
- C'est génial, Cha'. Je sais qu'on n'est pas les plus proches de Noémie et tout ça, mais pour le coup elle me semble vraiment atteinte par la situation. On en avait parlé et... elle a l'air déterminée.
Je sens la tête de mon amie bouger pour acquiescer, puis plus rien.
- Charline ?
- Oui ?
- Je suis désolée.
- Pourquoi ma belle ?
- Je n'ai rien vu. Et parce qu'on s'est fait la gueule aussi.
Charline se redresse d'un coup pour planter ses iris dans les miennes. Elle fronce les sourcils.
- On en a déjà parlé, on est toutes les deux fautives, point. Je ne veux plus qu'on parle de cette merde, Amélie. Maintenant, c'est nous deux pour la vie. Je ne veux plus qu'un mec se mette en travers de notre chemin.
J'acquiesce et attrape un pop-corn au passage pour le glisser dans ma bouche.
- D'ailleurs...
Charline lève la tête en l'air, comme si de rien n'était mais elle en fait beaucoup trop. Je sais de quoi elle va ma parler.
- Avec Baptiste, c'est sérieux ?
Je soupire et ricane, attrape un coussin pour cacher ma tête. Je dois être rouge pivoine.
- J'en sais rien, je marmonne pour vite qu'on change de sujet. Je pense, oui. Il a fait tout ce que je lui ai demandé, alors je pense qu'il ne va pas voir ailleurs et qu'on est ensemble.
Charline ne répond pas, alors j'écarte le coussin pour voir son visage. Elle semble lointaine, pensive, mais au bout de cinq seconde, elle hoche la tête.
- Ok, c'est cool.
- C'est tout ? Super réaction la copine.
Elle éclate de rire en écrasant son dos contre le canapé.
- Que veux-tu que je te dise ? Je n'aimais pas Baptiste mais il s'est lavé en montrant qu'il s'occupe bien de toi. Je ne peux pas critiquer, je le tolère.
Mon cœur se serre dans ma poitrine. S'avoir qu'elle l'accepte comme ça me fait du bien. J'ai l'impression de faire le bon choix en allant avec lui en fait.
- Par contre, plus de mec entre nous ! Tu ne m'abandonnes pas, hein... J'ai besoin de toi en ce moment, Amélie.
- Moi aussi j'ai besoin de toi Charline, plus jamais on se dispute ou on s'éloigne.
Charline vient poser un baiser sur ma joue et on se reconcentre sur le film. Je me sens plus légère. C'est débile, je suis assez grande pour faire mes propres choix, mais savoir qu'on me soutient quand même, c'est un plus, je ne crache pas dessus. Si mon entourage ne s'entend pas avec mon mec, ça peut vite être un problème or là, tout semble parfait. Vraiment parfait.
Mon amie éclate de rire une nouvelle fois et je ne peux pas quitter des yeux son visage si lumineux. Enfin je la retrouve, la partie de moi qu'il me manquait.
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Contre vent et marées
RomanceAmélie Marceau n'a jamais été adepte de compétition. Si elle est brillante dans sa discipline, les courses ne sont qu'un passe temps qu'elle nourrit pour sa propre satisfaction. Pour une dernière année de sport intense, elle a un objectif : accéder...