Gardienne

Chapitre XXXVIII

K R I S T E N

Un frisson me parcourt et me réveille. J'ai du mal à m'adapter à la pièce sombre dans laquelle je me trouve. L'humidité ambiante me fait trembler de tout mon être et une odeur métallique sature mon nez. Je ne sais pas où je suis et je n'entends rien. Alors que je souhaite faire un mouvement, ce dernier provoque un hurlement de douleur quand mes chevilles touchent un métal aussi froid que brûlant sur ma peau. Un rayon peine à percer la minuscule fenêtre salie par le temps illumine l'argent qui m'entoure.

Pourquoi je suis attachée comme une bête ?

Mes yeux finissent par se faire à la pénombre et je devine les bouteilles de sang vide sur une table en bois, avec un fouet encore poisseux qui y repose. Des flashs me viennent. Je me souviens avoir été battue par Connor mais je n'étais pas moi-même. Comme si une partie de moi que je ne connaissais pas avait pris possession de mon corps. Je me rappelle avoir hurlé à Connor que j'étais toujours là, qu'il n'avait plus besoin de me faire souffrir. Mais c'était comme si j'hurlais dans l'eau. La voix et les paroles qui franchissaient mes lèvres n'étaient pas les miennes mais aujourd'hui j'ai la sensation d'avoir gagné cette guerre contre moi-même. Mon seul souhait pour le moment est de me faire pardonner pour ce que j'ai pu faire et auprès des personnes que j'aime.

Comment va Juliette ? L'ai-je tuée ?

J'ai un haut le cœur et vomis le fond de mon estomac à mes pieds quand je repense à ses supplications alors que je la vidais de son sang.

Le lourd verrou grince et je gémis quand de la lumière me brûle les yeux. Je reconnais Connor alors que les néons grésillent au dessus de nous. Ses yeux sont cernés et ses lèvres ne forment qu'une fine ligne. Il est épuisé et c'est de ma faute. Un sentiment de culpabilité me fait monter les larmes aux yeux. Je ne suis qu'une moins que rien. J'aurais dû combattre mon envie de sang, cela aurait évité à mon ami de souffrir. Mais si Connor est dans cet état, comment est Achille ? Lui qui m'avait averti du risque. Je n'ai pas pu lui parler depuis ou alors quand mon autre moi le faisait, c'était par des insultes.

— Tu vas encore te la jouer dure à cuire aujourd'hui ?

Connor n'a toujours pas osé me regarder comme si m'adresser le moindre regard serait comme faire face au diable. Je peux l'entendre marmonner dans sa barbe en jouant avec le manche du fouet. Mon corps se contracte à sa vue comme s'il se souvenait de sa morsure sur ma peau. Connor inspire longuement avant de lever les yeux vers moi. Je ne me doutais pas qu'il m'ait autant manqué et pourtant, j'ai envie de pleurer au moment où je croise ses yeux bleus. La surprise se lit sur les traits du vampire alors que le cuir du fouet tombe sur le sol froid de la pièce.

— Kristen ? Tu es bien Kristen ?

— Oui, je crois que j'ai réussi à vraiment revenir.

Le faible sourire qui apparaît sur ses lèvres trahit le bonheur que provoque ma réponse. Comme s'il l'avait attendu depuis trop longtemps. Je lui demande de me libérer alors qu'il tire sur mes lèvres pour inspecter mes dents. Pas de canines, je ne les sens pas. En une milli seconde, mon ami vampire approche une poche de sang près de mes narines. Du sang animal. Mon estomac gronde et je peux sentir mes canines sortir.

Inspirer. Expirer. Ça va aller.

Conor sourit de plus belle avant de jeter la poche et de prendre mon visage entre ses mains et embrasser mes deux joues.

— Je pensais que tu n'allais jamais revenir à toi. Je commençais à m'inquiéter. Où étais-tu passé ?

— J'ai toujours été là. Mais elle m'empêchait de revenir. Le sang est une vraie drogue.