chapitre XV

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K R I S T E N

Quand je me suis réveillée, je retrouve mes mains pansées et les morceaux de cadres brisés retirés de mon lit. Les photos de Nathan et de mon père sont posées sur ma table de chevet.

J'aurais dû les déchirer.

Je me permets de sortir sur mon balcon avant de commencer une nouvelle journée ici. Journée qui allait être identique à toutes les autres. Il n'y a rien à dire, j'apprends bien plus vite que sur les bancs des amphithéâtres mais l'ambiance des couloirs de l'université me manque. Pour être 100% honnête, tout me manque mais je sais au plus profond de moi que rien ne sera pareil si Achille me rend ma vie. Je n'ai plus Nathan et mon père est parti rejoindre la femme qu'il n'a jamais cessé d'aimer. J'ai bien ma grand-mère mais celle-ci devient de plus en plus sénile et m'appelle souvent par le prénom de sa fille disparue.

Je laisse rarement les pensées sombres m'envahir mais le seul souvenir du corps de mon père me donne envie de passer par-dessus la barrière en pierre blanche. C'est peut-être la solution. Je suis prête à écouter cette idée quand le rire d'Achille me revient en tête. Je pourrais peut-être l'entendre encore une fois avant de partir.

Juste une fois.

Ingrid vient m'aider à me préparer une fois ma douche prise.

— Le prince voudrait que vous déjeuniez avec lui dans l'orangerie.

— Il y a une orangerie ?! je m'exclame.

— Bien sûr, c'est le lieu préféré du prince. Il y invite rarement des personnes.

Je deviens nerveuse comme lors d'un premier rendez-vous. Pour une raison qui m'échappe, je prends soin de choisir mes vêtements. Mon dressing se retrouve vite en désordre et je n'arrête pas de m'excuser auprès d'Ingrid qui semble plus dépitée à chaque vêtement sorti. La vampire rit quand j'insulte les paires de collants ou encore quand je n'arrive pas à bien faire ma queue de cheval.

— Et bien, je ne vous ai jamais vue dans cet état. Mais je préfère vous voir nerveuse que malheureuse.

Je remarque le regard d'Ingrid se remplir de nostalgie et de chagrin alors que cette dernière me brosse les cheveux pour les nouer et définir des boucles.

— Avez-vous des enfants Ingrid ?

— J'ai eu des jumelles dans une autre vie.

— Une autre vie ?

Ma curiosité a parlé avant que je n'ai le temps de réfléchir.

— J'ai vécu 50 ans de ma vie en tant qu'humaine. La vie m'a fait cadeau de deux magnifiques filles mais elle m'a aussi enlevé mon humanité.

Ma dame de compagnie ne raconte pas plus et je peux deviner qu'elle a vu ses enfants mourir sous ses yeux en sachant qu'elle vivrait pour l'éternité. Une fois coiffée, je la prends dans mes bras. J'ai mille et une questions à lui poser mais je ne veux pas la déranger avec ma curiosité mal placée. Il faudrait être idiote pour ne pas voir la souffrance toujours présente dans les pupilles de l'ancienne humaine.

Mes bottes marrons chaussées et mon manteau sur les épaules je pars en direction du lieu de rendez-vous en me répétant les indications que l'on m'a données. Un bâtiment entièrement vitré apparaît entre les haies et je tombe instantanément amoureuse de cet endroit. Un soleil matinal éclaire l'intérieur et les plantes et différentes fleurs donnent une atmosphère féérique. Une table est dressée en son centre, avec tout ce qu'il faut pour le petit-déjeuner. Mon estomac crie famine quand je remarque les roulés à la cannelle.

— Bonjour à toi aussi.

Je sursaute tout en plaçant une main sur mon cœur quand Achille apparaît dans un coin de la pièce. Il ressemble de nouveau au prince de tous les jours avec son pantalon beige et son col roulé noir.

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