Iris
— Bonjour Tatiana.
Reposée, ma main gagne mon œil qui ne s'adapte toujours pas à la lumière du Brésil. Le soleil semble plus chaud, comme si ses rayons venaient se poser délicatement contre ta peau.
— Bonjour ma douce, l'odeur des gaufres t'a réveillé ?
Mon ventre grogne, répondant tout seul à sa question. Nos rires fusent au même moment, l'atmosphère de la maison a l'air moins tendue. Je m'entends de plus en plus avec les personnes qui travaillent pour nous. Bien que ce soit tout nouveau pour moi, ils forment tous une véritable famille. Ça réchauffe mon cœur qui en a toujours manqué d'une.
— Andrea...
Mes yeux épient les environnements mais aucun homme aux cheveux bouclés et au teint mate se tient proche de moi.
— ...est retourné travailler ? demandé-je finalement.
Les mains de Tatiana s'arrêtent de cuisiner, les mains couvertes de farine, elle s'essuie dans le torchon posé à côté d'elle. Son regard capte le mien et je redoute la réponse à ma question. J'avais espoir qu'il ne travaille pas trop en voyage. J'avais espéré qu'on puisse passer un peu de temps ensemble, rien que pour apprendre à se connaître.
— Andrea a simplement été faire son footing.
La boule dans mon ventre s'évapore en millier de petites bulles.
— Oh.
— Vous savez Iris... c'est la première fois que je le vois faire autant d'effort.
Dans le plus grand des calmes, elle lâche cette bombe et retourne finir les gaufres. Seule, avec mon cœur qui bat la chamade, je tente de me contrôler. Cela semble impossible quand les papillons à l'intérieur de mon ventre décident de tous s'envoler au même moment.
— Vous en voulez une ?
— Avec grand plaisir.
La vapeur s'échappe du gâteau mais l'envie de croquer dedans est trop forte. La douceur englobe mon palais. Mes yeux se ferment, me ramenant à ce goût d'enfance. Le même que quand la mère de Nelly nous en faisait. Je ressens l'apaisement envahir mon corps. J'ai l'impression d'être revenue le jour où j'en ai goûté pour la première fois. Seuls certains moments sont associés à des éléments externes, comme un gâteau, et que c'est beau de s'en souvenir des années plus tard, avec le recul d'un adulte. Ce jour-là, si j'avais su, j'en aurais mangé bien plus. J'aurai savouré nos rires, nos pieds nus dans l'herbe et cette chaleur qui nous collait à la peau.
— Vous allez bien madame ?
Mes paupières s'ouvrent, Tatiana m'adresse son sourire rayonnant.
— Merci, trouvé-je simplement à lui dire.
Tant de sentiment déferle dans ma tête que j'en suis submergée.
— Votre fils a de la chance d'avoir une maman qui cuisine autant.
— Il faudrait lui rappeler, plaisante-t-elle avant de s'asseoir en face de moi, monsieur trouve cela normal.
Loin de là. Je me rappelle toutes ces fois où mes copines avaient des gâteaux fait maison, confectionnées par les mains de leurs maman, ça n'a jamais été mon cas. Mon cœur avait mal à cette époque. Il était impossible d'expliquer à une petite de cinq ans pourquoi sa maman ne lui montrait jamais le moindre amour.
Pourtant, je me rappelle d'un jour, le seul qui a marqué mes souvenirs... C'était mon anniversaire, je venais d'avoir trois ans et ma mère, bien qu'elle ne cuisinait jamais, avait essayé de faire mon gâteau. Ça a été le meilleur des anniversaires pendant de nombreuses années. À chaque fois, j'espérais qu'elle le refasse, mais j'étais toujours déçue. Pourtant, je le savais, à partir du jour où Magnolia a pointé le bout de son nez, je n'étais plus personne. Juste un poids dans cette famille. La ratée.
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Too Busy for Love - ONE SHOT
DragosteDepuis cet accident qui lui a coûté la mémoire, Iris Jones ne sait plus qui elle est. Passionnée de cinéma, elle imaginait sa vie remplie de couleurs. Pourtant, à son réveil, elle est bien loin des paillettes. Seule, entourée de sa famille, elle réa...