12 - Premiers pas en ville

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Flavio sort une veste, un jean et une casquette de l'armoire qu'il vient d'ouvrir. Il a intérêt à changer un peu d'apparence avant d'entrer en ville. Sa combinaison de vol a beau être noire, elle ne passe pas inaperçue, ce n'est vraiment pas un vêtement à porter en ville.

Changé, il sort de la petite salle de bain pour rejoindre Rébecca qui l'attend juste à côté, dans la chambre de bonne qui lui sert de cache. Il en a plusieurs pour plus de sûreté ; celle-ci se trouve au quatrième étage d'un bâtiment miteux non loin du Canard Boiteux. La pièce est totalement impersonnelle, ni décoration ni effets qui pourraient conduire jusqu'à lui. Seulement le nécessaire pour se changer, dormir et se ravitailler.

Alors qu'il prend également des chaussures confortables pour la marche qui les attend, le jeune homme regarde un instant les petites ballerines que Rébecca a aux pieds. Elles ont déjà bien souffert dans la forêt, elles ne vont sûrement pas tenir très longtemps.

― Tu n'avais pas d'autres chaussures ? demande-t-il en laçant les siennes.

― Non, je... je n'en ai pas besoin, chez moi, bredouille la jeune fille en constatant les dégâts.

― Ah oui, c'est vrai...

― Celles-ci sont à ma mère. Les autres avaient des talons hauts, ajoute-t-elle avec un petit sourire contrit.

Evidemment, vu comme ça, ce choix était le meilleur.

― On va s'occuper de ça en premier. Ensuite, direction le château. C'est de là qu'on verra le mieux les feux d'artifices. Allez, viens.

Rébecca le suit en silence, la tête basse, et Flavio remarque intérieurement qu'il la préférait toute joyeuse et fofolle. Ce qu'ils viennent de vivre au bar à dû la traumatiser et il se promet d'y remédier, s'étonnant lui-même de sa toute nouvelle sollicitude envers une autre personne que lui-même.

La jeune fille ne sait en effet plus trop où elle en est. Elle n'avait pas imaginé un seul instant vivre une telle mésaventure en sortant de chez elle. Elle voulait juste voir les lumières ; pas tomber face à face avec un gros méchant comme l'Ogre ! Mais sa mère ne l'avait-elle pas prévenue des dangers de l'extérieur ?

Sa mère...

Peut-être devrait-elle rentrer et oublier son rêve fou ? Être raisonnable et obéissante ? Retrouver sa petite vie tranquille, en sécurité, et...

― Et alors ? fait la voix enjouée de Flavio. Tu n'apprécies pas ? C'est quand même mieux que dans les bas-quartiers, non ?

Rébecca lève la tête. Son sourire refait tout de suite surface quand elle voit la position théâtrale qu'a prise son guide pour lui montrer la rue dans laquelle ils viennent de pénétrer sans qu'elle s'en rende compte.

La route pavée est propre ; les façades sont belles, colorées, mais surtout décorées. Des guirlandes courent le long des murs : elles sont constituées d'une myriade de pétales roses, ou bien est-ce des papillons, des oiseaux ? Non seulement sur les murs, mais également au-dessus de leurs têtes, formant comme un plafond féérique. A perte de vue. Les pétales sont tellement légers que les rayons de soleil passent à travers et viennent se refléter sur le pavé en milliers de tâches roses et brillantes. Une légère brise fait frémir les guirlandes, rendant le tableau vivant et encore plus magique.

La jeune fille n'a jamais rien vu d'aussi beau. Elle avance enfin gaiement, la tête en l'air, un sourire béat illuminant son visage. Son cœur déborde de nouveau de bonheur. Elle court presque, comme si elle voulait s'envoler parmi les papillons de couleur, saute et rit toute seule.

Flavio ne peut s'empêcher de sourire également en la suivant. L'agacement qu'il ressentait devant cette joie enfantine, quelques heures plus tôt, s'est transformée en amusement. Pas un amusement moqueur, mais gentil et appréciateur. Une sensation qu'il n'a pas éprouvée depuis longtemps.

Une tour et des réponsesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant