Jordan fut accueilli en héros. Les gens dans la foule hurlaient, les drapeaux français lui cachaient la vue d'une partie de la salle. Les flash des appareils l'aveuglaient presque. Le parti nationaliste venait d'exploser les scores aux élections européennes et son jeune président venait de battre à la fois le parti présidentiel mais aussi toutes les forces de gauche, sans leur laisser la moindre chance.
Il était bousculé de toutes parts, chacun voulait une photo avec lui, tous attendaient un regard, un sourire. Lui, ne voyaient que des mines réjouies. Le retour de la France, c'était grâce à lui. Il avait le coeur serré, les yeux aux bords des larmes. Les Français lui avaient tant donné, maintenant c'était à lui d'agir.
Éreinté, fatigué par les derniers mois mais boosté par ces résultats, Jordan n'avait pourtant pas eu beaucoup de temps pour profiter de sa victoire. Moins d'une heure après la proclamation des résultats, le Président de la République avait décidé de dissoudre l'Assemblée nationale. Sa ferveur était retombée. Le RN avait demandé la dissolution pendant toute la campagne et ne pensait pas l'obtenir. Jordan avait accueilli la nouvelle avec un grand sourire mais au fond de lui, une part d'inquiétude. Allait-il tenir le coup ? Mentalement ? Moralement ? Après plus de 8 mois de campagne intense et sans pitié, il repartait pour sans doute les trois semaines les plus difficiles de sa vie, où il allait être sous le feu des projecteurs et subir attaque sur attaque.
Et on allait demander de lui une attitude irréprochable. Ni erreur, ni baisse de régime, ni capitulation. Rien. Le sans-faute.
Quelque chose se passait en France. Éternels sauveurs de Macron en catastrophe, les députés LR s'étaient lassés de ce rôle de baltringues et voulaient réellement renvoyer le Président chez lui. Ou lui faire traverser la rue. Ça lui ferait les pieds. Il pourra en profiter pour se confronter à la vraie vie, songea le jeune président du RN.
Dans un mois peut être, il serait Premier ministre de la France, à la tête d'un super groupe de plus de 300 députés. Et à seulement 28 ans. Cette pensée le fit frissonner.
- Et pour les débats, j'ai déjà eu TF1, France 2 et d'autres pour en organiser, Bardella - Attal par exemple, annonça la chargée de presse de Jordan en le tirant de ses pensées. J'ai déjà dit oui à tout, ça va être intense.
Gabriel Attal. Avec toute l'euphorie qui régnait depuis des heures, Jordan n'avait pas songé un seul instant au Premier Ministre. Le camp macroniste s'était pris une claque monumentale. Valérie Hayer avait aussitôt disparue des radars et Gabriel Attal était invisible. Rien sur les chaînes d'info, rien dans la presse. Aucune réaction. Le choc de la défaite, sans doute. Il imaginait le Premier ministre enfermé dans son bureau à Matignon, le teint livide, sonné par la décision brutale du Président de dissoudre l'Assemblée. Il avait presque de la peine pour lui.
Les deux hommes se connaissaient depuis des années. Ils avaient un profond respect l'un pour l'autre et malgré quelques conversations banales et presque même une certaine sympathie, une fois sur le ring, ils ne se faisaient pas de cadeau. Gabriel Attal était un excellent adversaire mais il devait défendre le bilan d'Emmanuel Macron et ça, personne ne pouvait s'en défaire. Depuis que Renaissance était au pouvoir, le RN avait triplé son score. Plus Macron ruinait la vie des Français, plus le RN remportait d'élections. Attal pouvait parler autant qu'il le voulait, il ne contrôlait rien et le parti de Jordan Bardella explosait dans les sondages.
- Très bien, Monsieur Attal pourra donc profiter de quelques corrections supplémentaires avant de devoir traverser la rue pour retrouver un emploi, répondit Bardella en souriant. Son attachée de presse sourit à son tour et pianota sur son téléphone.
Jordan eut un sentiment de vertige quand il pensa à tout ce qu'il fallait organiser pour les prochaines semaines. Le fait de reprendre le rythme effréné des débats télévisés le réconfortait quelque peu.
Il était un spécialiste dans l'art oratoire et il n'y avait que Gabriel Attal pour lui mettre parfois des bâtons dans les roues. Il n'y avait que lui qui osait lui répondre. Et lui tenir tête. Quelque part, il adorait ça. Ces derniers jours, les élections s'étaient résumée au duel Attal-Bardella. Au fond de lui, il avait presque hâte du prochain débat. Il en ressortait toujours galvanisé.
Après de trop longues heures de réunions du bureau national du RN et happé par la fatigue, Jordan rejoignit rapidement la voiture qui le ramenait chez lui. Il avait hâte de retrouver le confort de son appartement et n'avait qu'une envie : se coucher et dormir pendant des années.
En route, son téléphone vibra. Il le sortit nonchalamment de sa poche. Depuis les résultats, il avait eu des centaines de milliers de notifications et avait tout mis en sourdine. Sauf ses contacts triés comme urgents dont il ne fallait pas louper les messages. Alors quand le nom affiché sur la notification apparut, il fronça les sourcils.
"Gabriel Attal".
Tous les politiques avaient les numéros de leurs adversaires respectifs. Certains discutaient de temps à autre, d'autres très souvent mais pour Jordan non. Il laissait le côté technique à ses équipes, il lui était arrivé de répondre quelques fois mais uniquement pour du professionnel. Alors, curieux, il ouvrit le message avec un petit rictus. Que lui voulait le Premier ministre déchu ? En lisant le message, son rictus disparut aussitôt.
"Beau score ce soir M. Bardella. À mardi pour la suite, j'ai hâte de vous retrouver sur les plateaux"

VOUS LISEZ
NOTRE FRANCE - Bardella x Attal
FanficJordan Bardella caracolle en tête dans les sondages et est en passe de remplacer Attal au poste de Premier ministre. Débat après débat, confrontation après confrontation, les deux hommes se connaissent parfaitement. Ils occupent les plateaux depuis...