Chapitre 21 - Distance

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Jordan s'effondra après le départ de Gabriel. La froideur de leur échange le hantait. Il n'y avait plus rien dans son regard, il ne le regardait plus comme avant.

Il avait conservé toutes ses aptitudes et ses qualités intellectuelles mais concernant sa relation avec lui, il ne restait rien. Que de la fumée.

C'était comme si une partie de Jordan avait été arrachée, laissant un vide béant.

Comme s'il n'avait jamais existé.

Il avait gardé la face et sauvé les apparences pendant leur maigre - et froid - échange mais là c'était trop.

Il passa une main tremblante sur son visage, essayant de rassembler ses pensées. Il ne pouvait pas rester inactif. Il devait trouver un moyen de raviver la mémoire de Gabriel, de lui rappeler ce qu'ils avaient été l'un pour l'autre. Mais comment ? L'ancien Premier ministre n'avait pas l'avoir d'avoir envie ne serait-ce que de se trouver dans la même pièce que lui.

Jordan se redressa, une lueur de détermination dans les yeux. Il devait élaborer un plan. Un plan qui pourrait ramener Gabriel à lui. Il sortit un carnet de notes et un stylo, prêt à coucher ses idées sur papier.

Mais sa détermination fut de courte durée. Il ne pouvait pas l'emmener dans leurs endroits fétiches - chez lui, en Normandie, sur les toits de Paris - tout simplement parce que Gabriel ne se laisserait jamais faire. Il ne pouvait pas non plus le traîner en thérapie de couple avec un spécialiste, au risque de passer pour un fou. Les débats s'étaient terminés en même temps que les élections législatives, ils n'avaient aucun moyen de se retrouver face-à-face ou en loge.

Jordan laissa tomber son stylo sur la table, désemparé. Puis il lui vint une idée.

Il se leva et chercha un carton bien précis. Il était sûr de l'avoir vu quelque part. Après quelques minutes de recherches, il mit enfin la main dessus et l'ouvra avec précaution. Il sourit en redécouvrant le papier à lettre très précieux, qu'il avait reçu de sa mère et sur lequel il avait écrit un petit mot pour Gabriel la première fois qu'il avait dormi dans ses bras.

Il saisit un de ses stylos plume et se mit à griffonner sur le papier à lettre. Il réécrivit exactement le même message et signa. Satisfait, il le plia en deux et le glissa dans la poche de sa veste, priant pour avoir l'occasion de le donner à Gabriel aussi vite que possible.

Il n'eut pas à attendre longtemps. Le lendemain, après s'être réveillé la tête dans ses dossiers, il se doucha rapidement dans ses appartements privés et rejoignit l'Assemblée nationale pour la traditionnelle séance de Questions au Gouvernement.

Ce fut lorsqu'il se baladait seul dans un couloir qu'il vit Gabriel débouler de l'autre côté. Il remarqua l'ancien Premier ministre se raidir et serrer les dents en le voyant. Quant à lui, son coeur se remplit d'une force nouvelle et bondit dans sa poitrine.

- Monsieur Bardella, lâcha Gabriel en le saluant d'un signe de tête.

- Attendez Monsieur Attal, répondit Jordan en mettant un bras devant lui pour l'empêcher de s'en aller.

Il ignora les battements de son coeur qui se faisaient un peu plus forts à chaque instant et sa main qui ne pouvait s'empêcher de trembler légèrement. Le voir lui faisait toujours cet effet.

Gabriel s'arrêta brusquement et le jaugea du regard, sévère.

- Qu'est-ce que vous me voulez ? Me soudoyer ? Ça n'arrivera pas.

- Rien de tout ça, rassurez vous. J'ai quelque chose pour vous, dit Jordan, amusé, en sortant le papier de sa poche.

Il lui tendit et Gabriel le regarda quelques secondes avant de le saisir entre ses doigts fins.

NOTRE FRANCE - Bardella x AttalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant