Chapitre 3

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          Nous sommes désormais cachés derrière plusieurs arbres.

Près de la Citadelle, aucun gardien ne sortira, ils ont trop peur de ce qui se passe dehors, c'est l'inconnu.

La nuit est tombée, il fait froid. J'enlève mon masque, il m'étouffe et je le balance quelque part.

Contre toute attente Cornley serre sa fille dans ses bras et nous félicite de ce succès fulgurant. Il salue longuement son vieil ami, content de le revoir après tant d'années.

Nous ne l'avions jamais vu être aussi démonstratif.

Je garde ma main droite sur ma blessure, juste en dessous de mes côtes.

Je me jure intérieurement de travailler sur l'amélioration de ma vitesse, j'ai tendance à prendre trop de temps pour tirer et ça peut coûter très cher. Heureusement, je m'en sors en vie.

Cornley se tient devant nous, les poings sur les hanches.

- Les enfants, nous devons rentrer au plus vite. Ce que vous avez accompli aujourd'hui est phénoménal, cependant je crains que le campement ne soit envahi, je n'en suis pas sûr mais...

- Professeur, nous venons de passer la journée à exécuter cette mission pendant que vous, vous restiez caché dans les buissons sans rien faire. De plus, certains de nous sont blessés et ont besoin de repos, nous ne reprendrons pas la route aujourd'hui. Si vous vous ennuyez, vous n'avez cas vous occupez d'Ashley et de Jim, assène Hélène d'un ton autoritaire.

Je suis étonnée de sa réponse.

Habituellement elle se contente d'obéir. Je préfère nettement ce comportement ci. L'intéressé ne répond rien, la mine décomposée. Il se dirige vers nos sacs, désormais empilés les uns sur les autres, il sort une des trousses de secours trouvées et part s'occuper de la blessure par balle de Jim, Prost le rejoint à la hâte.

Brooke et Hélène vont vers Kai, pendant ce temps je ferme les yeux, emmitouflée dans les hautes herbes.

Je me repose.

Plus personne ne parle, l'accalmie présente est douce et régénérante. On savoure notre victoire.

Seul notre camarade lâche quelque cris stridents, ils me serrent le cœur.

J'imagine la réaction des gens de la citadelle, leurs expressions colériques. Aujourd'hui, nous avons abîmé la vie de nombreuses personnes.

Et bien évidemment, je m'en veux -la culpabilité fait partie intégrante de mes émotions quotidiennes- c'est horrible, mais au fond ils n'ont eu que ce qu'ils méritaient. Après que la grande invasion a commencé, un nouveau système de haute sécurité avait été mis au point. Des grandes murailles, formant une citadelle, ont été adoptées par le gouvernement.

Pas seulement ici, mais dans le monde entier.

En France, dès l'installation de celle-ci, il y a eu une sorte de purge. Ceux qui n'avaient plus rien se sont vus expulsés loin de la capitale.

Rien d'étrange jusque-là, la différence sociale entre les pauvres et les riches n'est pas une nouveauté. L'expulsion prévue était en fait hors de la citadelle, au-delà des murs. Ils nous ont amenés droit vers l'abattoir.

Les chefs d'État ont toujours approuvé ce genre de décisions, puisque nous étions devenus des déchets si nous n'avions plus de famille, de maison ou d'emplois. Ils ne voyaient aucun inconvénient à nous jeter de la sorte. Il y a quelques mois, nous avions rencontré une jeune femme dans la foret, Alice je crois. Elle nous avait parlé de ce qui s'était passé pendant toutes ces années, à l'intérieur des murs. Les nouvelles lois, la purge qui s'était instaurée.

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