25. Le chasseur

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Eyeliner – Cxldface

Elle est tombée enceinte d'un autre mec.

Cette putain de phrase tourne en boucle dans ma putain de tête. Je l'associe à la main de Rob que j'ai surpris se faufiler l'autre matin sous le t-shirt de Madelyn pendant qu'il l'agressait, et... la jointure de mes doigts devient blanche tellement je serre le volant.

La vérité est pire que tout ce que j'ai pu imaginer.

— Rends-le-moi, c'est pas un jouet, merde !

Je jette un coup d'œil à Steven dans le miroir central de la caisse. Madelyn, qui a préféré s'asseoir à l'arrière plutôt qu'à côté de moi, lui a volé l'un de ses gadgets. Elle l'agite en l'air loin de sa portée tout en rigolant comme une gamine insouciante qui ne réalise pas à quel point elle est diabolique.

Ce putain de rire... il fait battre mon traître cœur un peu plus vite chaque fois. Je bloque la sensation avant qu'elle ne se répande jusqu'à mon âme.

Elle semble de meilleure humeur depuis que nous avons quitté l'entrepôt, mais je ne suis pas un imbécile. Au fond, elle est furieuse contre moi. Je le devine aux flammes qui dansent dans ses yeux océan quand nos regards se croisent dans le miroir, et à la manière dont son expression se tend chaque fois. Je dois me préparer à subir ses représailles dans les prochaines vingt-quatre heures, parce qu'apparemment, c'est tout ce qu'on est capable de faire : se déchiqueter coup pour coup, sans relâche, jusqu'à ce que nos corps soient dépouillés de toute chair.

— Attention, l'agite pas comme ça !

— T'es tout rouge, on dirait que tu vas exploser. T'es constipé, ou quoi ?

Je jette un nouveau coup d'œil à Madelyn dans le rétroviseur. Elle emmerde Steven qui crie plus fort que la musique. Mais la blonde, imperméable à sa colère grandissante, s'évertue à lui rire au nez.

Je me mords la langue pour réprimer un sourire.

Ça me flingue que mon cœur affectionne ce son. Il n'a existé qu'une seule femme capable de me faire ressentir ça, et ça a viré au cauchemar. Je ne peux pas me permettre de l'éprouver de nouveau.

L'amour.

Tournant le dos à mes émotions, je me concentre sur le paysage urbain qui défile à toute allure. Les devantures des boutiques fermées sont squattées par des sans-abri. De nombreuses putes se tiennent sous les réverbères, et un groupe de jeunes titube d'un bar à un autre en chantant « God Save The Queen », si fort que je les entends malgré la musique qui résonne dans l'habitacle.

Je bifurque à droite pour m'éloigner du centre et, deux minutes plus tard, la voiture fait halte au pied de notre immeuble. Je n'ai pas le temps de rentrer dans le garage que Madelyn bondit hors du véhicule.

— Viens la chercher !

— Sérieux, putain ! s'écrit Steven qui s'élance à sa suite. Tu vas tous nous buter ! C'est pas marrant !

Alors que je coupe le moteur en tentant désespérément de conserver mon sang-froid, Steven chasse la blonde qui galope autour de la caisse.

— T'as dit que ça faisait des feux d'artifice, je trouve ça plutôt marrant !

— C'est une grenade qui fait des feux d'artifice. Une grenade, merde !

Je claque la portière et manque de percuter Madelyn. Elle se fige entre Steven et moi, aussi pétillante qu'une boule disco, et s'exclame d'un ton espiègle :

— Faisons-la péter.

Je me pince l'arête du nez et soupire :

— Rends son jouet à Steven avant que je te le fourre dans le cul, et on le fera péter.

RavagésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant