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- J U S T  B E T W E E N  U S,  D O 
Y O U  R E M E M B E R  I T 
A L L  T O O  W E L L -


Comme souvent, Jeongin traînait des pieds.

Ses chaussures déjà abîmées frottaient contre le sol du couloir, crissant contre le carrelage dans un petit bruit désagréable. Porteurs de son manque de motivation, ses pieds tractaient difficilement sa figure qui finissait par se courber à coups de nuits sans sommeil et de pensées qui peinait à ne pas prendre des allures de drame shakespearien.

Si le temps était maussade ce jour-là, Jeongin l'était sans doute tout autant.

Il fallait dire que la soirée de la veille ne l'avait vraiment aidé à apaiser l'enfer de sensations qui se battait pour le monopole de son corps. Une bataille qu'il n'était pas franchement sûr de gagner, ni lui, ni son cœur.

Ce qu'il avait pu maudire Chan.

Lui et ses réponses incomplètes et exemptées de la moindre forme de développement. De ses confessions à demi-mots et de son pessimisme plus amer encore que n'importe lequel des alcools qu'il avait ingurgité pour parvenir à avaler la noirceur de la vérité.

De toute cette résiliation dont il ne savait plus quoi faire. A force.

Il se demandait s'il se rappelait seulement de ce qu'ils avaient vécu. S'il s'en rappelait comme lui s'en souvenait. Avec la même intensité frémissante, celle qui marquait au fer rouge le moindre de ses souvenirs en sa compagnie. Qui marquait toujours ses lèvres, avec une force indélébile.

Si lui se désolait seulement du funeste destin qui s'était écroulé sur leurs insouciances d'antan. Regrettait t-il au moins sa présence? De ses sourires à sa voix.

Des plus grands mots aux plus petits silences.

Était-il poursuivi par son ombre comme lui l'était avec la sienne, sur chaque photo, dans chaque blague attrapée à la volée, chaque petit détail qui ne prenait de sens que accolé à son nom.

Jeongin n'avait lui aucun mal à reconnaître la difficulté qu'il ressentait face à cette montagne de vérité plutôt déchirante. Pas que le fait avait arrangé quoique ce soit, bien au contraire.

Ce qui expliqua certainement le soudain sentiment de lourdeur qui l'accabla à la vue de l'australien en question. Lui qui se tenait à l'autre bout du couloir, loin devant, le remontant avec nonchalance, prêt à croiser son chemin dans l'indifférence la plus totale.

Jeongin sentit alors ce drôle de sentiment revenir. Comme une roche soudainement lâchée dans son estomac, lui coupant sa faim et l'entièreté de sa sérotonine.

A détailler son expression calme et ce fond de délicatesse qui s'y logeait, ses boucles d'or qui s'échouaient devant ses yeux qu'il avait toujours cherché à déchiffrer sans réellement y parvenir. Chose qu'il eut à nouveau bien de la peine à faire en les voyant croiser les siens, leurs regards se mélangeant le temps d'une poignée de secondes.

Indéchiffrable. Devenu terriblement inaccessible. Si soudainement inatteignable.

Lui qui le dépassa d'un coup, sans un mot. A peine un regard. Une compassion distante et un peu désolée, une tristesse légère que Jeongin peinait à ne pas trouver superficielle.

Rien que de vagues connaissances. Au mieux.

Le sourire crispé de Chan tomba pourtant aussitôt qu'il eut dépassé la hauteur de Jeongin. Un rictus plein de faux semblants qui ne parvint à survivre au-delà de son utilité, au-delà de ses yeux déçus, terriblement lisibles. Comme ils l'avaient toujours été.

Orange Wednesdays Lovers {SKZ}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant