𝟎𝟔 ¦ 𝐋𝐄 𝐁𝐎𝐍 𝐂𝐇𝐎𝐈𝐗

38 15 15
                                    

     Jean était en retard. La ponctualité n'avait, pour ainsi dire, jamais été son fort. Il n'était pas vraiment question d'un manque d'organisation de sa part. Jean accordait tout simplement trop d'importance à son sommeil. D'autant plus qu'il n'était pas du genre à se presser. Ce qui expliquait pourquoi il semblait aussi serein. En l'absence de voiture à l'horizon, n'importe qui d'autre se serait engagé sur le passage piéton. Mais Jean, lui, attendait tranquillement que le bonhomme lumineux devienne vert.

     Il était près de huit heures cinq. Jean n'avait donc que quelques minutes de retard. Pas de quoi en faire tout un fromage. Quoi que Monsieur Dork ne risquait pas d'être du même avis que lui. Bon. Le temps pour Jean de monter les escaliers jusqu'au quatrième étage, il était probablement huit heure dix. Un retard qu'il jugeait toujours raisonnable. Et puis, on n'avait pas idée de commencer les cours à huit heures. Jean était rarement opérationnel avant dix heures... M'enfin. Là n'était pas le sujet.

     Au moins, à cette heure-là, les couloirs étaient presque désert. Pas une seule âme ne viendrait l'importuner. Jean songea que ce ne serait pas plus mal, si le lycée était toujours aussi silencieux. Il se sentirait certainement beaucoup plus léger. Jean traîna des pieds pour profiter un peu plus de ce moment d'accalmie. Bientôt, la voix de Monsieur Dork lui agresserait les oreilles avec des réflexions philosophiques moyenâgeuse. Il avait besoin de s'y préparer mentalement...

     Des voix étouffées raisonnèrent à ses oreilles. Jean fronça les sourcils. Qui donc osait briser le silence sacré qui l'entourait ? Le bruit provenait des toilettes, situés au bout du couloir. Des élèves faisaient probablement la queue pour entrer dans l'unique cabine. Mais avaient-ils vraiment besoin de discuter aussi fort ?

     Jean continua d'avancer. Il n'allait pas les engueuler pour si peu, bien sûr. Il se contenterait d'entrer dans sa salle de classe et de s'assoir à sa place. Arrivé devant la porte, il ne se pressa pas pour toquer. Jean entendait déjà la voix grave de l'enseignant qui faisait cours de l'autre côté. Il entendait aussi beaucoup plus distinctement qu'avant les bruits qui s'échappaient des toilettes adjacents. La voix qui s'élevait était insistante. Presque menaçante.

     Jean jeta un regard hésitant à travers le petit carreau qui ornait la porte. À l'intérieur, ses camarades ne semblaient pas emballé·e·s. La plupart étaient avachi·e·s sur leurs tables, à deux doigts de bailler. Jean lui-même n'était pas vraiment presser d'entrer. Il tourna la tête vers les toilettes. Quelque chose de louche semblait s'y dérouler. Et même si Jean n'aimait pas mettre son nez dans ce qui ne le regardait pas... Il songea qu'il ne perdait rien à jeter un coup d'œil.

     Le jeune homme s'approcha en longeant le couloir. Sans un bruit, il glissa sa tête dans l'encadrement de la porte. Jean ne fut pas très surpris de voir Reiner. Il lui semblait bien avoir reconnu sa voix un peu plus tôt. En revanche, le rugbyman n'avait pas l'air de faire la queue pour aller aux toilettes. La porte de la cabine était en effet grande ouverte, au fond de la pièce. L'attention de Reiner était dirigée sur une personne qui ne disparaissait pas complètement derrière son imposante carrure. Jean fut un peu étonné de reconnaître Marco.

     Son voisin de classe ne semblait pas à l'aise. Il avait même l'air un peu paniqué. Il s'était retrouvé acculé dans un angle, fait comme un rat. Des scènes comme celle-ci, Jean en avait vu des tonnes et des tonnes. Reiner y jouait toujours le rôle du grand méchant loup. Il s'était déjà interposé une fois, ce qui expliquait l'hostilité du rugbyman à son égard. Et il s'était promis de ne jamais recommencer. Mais...

     — Reiner ! Je peux savoir ce que tu branles !?

     L'intéressé s'écarta d'un bon. Jean avait crié drôlement fort. Il était même probable qu'on l'ait entendu depuis la classe adjacente. Reiner n'avait pas l'habitude qu'on le reprenne de la sorte. Il resta immobile, ses gros sourcils froncés sur ses minuscules yeux. Armé d'un courage dont il ne se croyait pas capable, Jean s'approcha en trois grande enjambées. Il attrapa l'avant-bras de Marco.

     — On s'en va, déclara-t-il d'un ton sec.

     Les deux garçon arrivèrent devant leur classe moins d'une seconde plus tard. Jean toqua et, sans en attendre l'autorisation, ouvrit la porte à la volée.

     — Désolé pour le retard, lâcha-t-il. J'ai dormi trop longtemps.

     Une trentaine de paires d'yeux le dévisagèrent en silence. Un peu décontenancé, Monsieur Dork s'éclaircit la gorge.

     — Et Marco ? les interrogea l'enseignant.

     Jean répondit à sa place. Non sans un brin d'humour.

     — Disons qu'il a fait une mauvaise rencontre.

     — Disons qu'il a fait une mauvaise rencontre

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

NOTE DE LYA
mes salutations, camarade.

Entre Reiner qui joue les brutes de service, Marco qui se fait victime dans les toilettes et Jean qui vole à son secours tel un preux chevalier, je crois qu'on peut difficilement faire plus cliché !!

𝐋'𝐎𝐌𝐁𝐑𝐄 𝐄𝐓 𝐋𝐄 𝐑𝐄𝐅𝐋𝐄𝐓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant