𝟏𝟔 ¦ 𝐂𝐄𝐑𝐂𝐋𝐄 𝐕𝐈𝐂𝐈𝐄𝐔𝐗

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     — Lorsque je suis entré au collège, poursuivait Marco, le même schéma s'est répété. Au début, je laissais couler. J'espérais que mes harceleur·se·s se lassent d'elleux-même. Je leur donnais une chance de se repentir sans mon aide. C'était rarement le cas. Alors je commençais à rendre les coups, mais en dix fois plus forts, et on me fichait la paix. Jusqu'à ce que d'autres élèves prennent la relève.

     » J'étais moi-même étonné qu'aucune rumeur ne coure à mon sujet. Mais à bien y réfléchir, on avait tou·te·s intérêt à ce que personne ne soit au courant. Mes harceleur·se·s ne voulaient pas devenir la risée du bahut. Et moi, je pouvais continuer de jouer le rôle du petit garçon sage. Mais cette comédie ne pouvait pas durer éternellement. Il y a quelques mois, tout a fini par voler en éclat.

     » L'année dernière, il y avait un groupe de gars qui me faisaient la misère. La situation était un peu délicate, car ils étaient plutôt populaires. J'avais peur que des rumeurs s'ébruitent si je leur infligeais ma correction habituelle. Alors j'ai essayé d'encaisser sans rien dire... Mais ça ne m'a pas vraiment réussi. J'ai fini par perdre mon sang-froid. Je me suis battu avec eux au beau milieu d'un couloir. Je les ai tous envoyé au tapis, bien sûr, mais tout le monde m'a vu le faire.

     » Ce fut un bordel sans nom. Je me suis retrouvé dans le bureau du proviseur, avec mes parents convoqués d'urgence. Et pour la première fois depuis très longtemps, j'ai arrêté de prétendre être ce garçon bien sage qu'iels voyaient en moi. Je leur ai dit tout ce que je pensais de leur pédagogie à la con. Que c'était à cause de leur incompétence que j'étais contraint de me faire justice moi-même. Mon discours ne leur a pas plu du tout. Je suis passé en conseil de discipline. Mes parents ont décidé de me retirer du lycée avant que je suis renvoyé.

     » Iels ont passé les derniers mois à me faire la leçon. Je consulte même un psy pour gérer ma colère. Tu parles ! Je n'ai pas le sentiment d'avoir changé d'un iota. Mais mes parents m'ont supplié de ne pas faire de vagues pour cette dernière année au lycée. Alors j'ai serré les dents et j'ai repris ce rôle de premier de la classe qu'iels aiment tant. Mais il a fallu que je tombe sur un énergumène comme Reiner... J'ai déjà secoué trois de ses copains. Cette fois-ci, c'est fichu.

     Marco se rallongea sur le dos en soupirant. Il fallu plusieurs minutes à Jean pour digérer les confidences de son ami. Mais une fois la surprise passée, son cerveau se mit à fonctionner à plein régime.

     —Reiner n'en parlera jamais. Il aura trop honte pour le faire.

     — Tu ne peux pas en être certain. Et puis, ce n'est pas tant ça le problème. S'il ne parle pas, un·e autre le fera. Ou alors je finirais par péter les plombs devant tout le monde une seconde fois. Parce qu'on continuera de me chercher des noises et que je continuerais de rendre les coups. Mais ce sera encore ma faute, parce que je ne suis pas une victime parfaite.

     — Cela n'arrivera pas, affirma Jean. Parce que je sais comment briser ce cercle vicieux.

     Cette fois-ci, Marco fut toute ouïe. Ce fut au tour de Jean de se pencher vers lui, l'air très sérieux.

     — Reiner ne parlera pas, répéta-t-il. S'il parle, je le ferais passer pour un imbécile. Pire encore, j'en profiterais pour balancer tout ce que je sais sur lui. Il en est parfaitement conscient.

     — Admettons, fit Marco. Et ensuite ? Qu'est-ce que tu fais des mini-Reiner en puissance ?

     — Pour commencer, tu devrais arrêter de prétendre être quelqu'un que tu n'es pas. Navré pour tes parents, mais tes fausses lunettes et tes chemises repassées font de toi une cible visuelle idéale. Si tu laisses transparaître ta vraie personnalité, je pense que les autres élèves y réfléchiront à deux fois avant de s'attirer tes foudres.

     Marco ouvrit la bouche, prêt à rétorquer quelque chose. Jean le coupa d'un doigt contre ses lèvres.

     — Pour le reste, c'est exactement la même logique. Tu n'as qu'à profiter de moi.

     Marco haussa un sourcil. Jean le sentit sourire contre son doigts. Il ferma un instant les yeux pour retenir la chaleur qui lui montait aux joues. Cette dernière phrase n'était pas tout à fait sortie comme il l'avait imaginée... Il poursuivit néanmoins :

     — Tu crois vraiment qu'on peut harceler mes ami·e·s en toute impunité ? L'idée ne leur viendra même pas à l'esprit ! Je crois te l'avoir déjà dit : avec moi, personne n'osera te toucher.

     Jean avait toujours considéré sa popularité comme un fardeau. Il était grand temps qu'il apprenne à l'utiliser à ses fins.

 Il était grand temps qu'il apprenne à l'utiliser à ses fins

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NOTE DE LYA
mes salutations, camarade.

La conclusion de cette histoire prend beaucoup plus de temps que je ne l'avais imaginé !! Promis, le prochain chapitre sera le dernier...

𝐋'𝐎𝐌𝐁𝐑𝐄 𝐄𝐓 𝐋𝐄 𝐑𝐄𝐅𝐋𝐄𝐓Où les histoires vivent. Découvrez maintenant