L'INSOUPÇONNABLE [EN PAUSE]

17 ✰: Course

L'INSOUPÇONNABLE

MAYRA CHÀVEZ

À Dallas aux Texas, États Unis.

L'été a maintenant cédé la place à l'automne, ma saison favorite. Nous sommes déjà au milieu de septembre.

Lino ne le sait pas, mais j'ai surpris une conversation qu'il a eue avec les garçons. Alors, c'est vrai, il y a une fête masquée à laquelle je ne suis pas conviée.

Je suis déterminée à m'incruster sans qu'il s'en doute. S'il pense que je vais rester ici comme une prisonnière, c'est qu'il est vraiment naïf.

Hier, c'était mon anniversaire, j'ai eu 22 ans. Je n'ai jamais été particulièrement fan de mon anniversaire, pour quelle raison ? Tout simplement, c'est ce jour-là que j'ai quitté ma maison.

À chaque anniversaire, on me faisait des cadeaux que je n'avais pas vraiment envie de recevoir. La seule chose que je voulais, c'était attirer leur attention, qu'ils prennent du temps pour moi, qu'ils ne me laissent pas de côté.

Tout ce que je désirais, c'était qu'ils m'aimassent.

Je craignais de passer une journée aussi morose que toutes mes autres anniversaires ; la journée a peut-être mal commencé, mais elle s'est bien terminée.

Ils m'ont fait une surprise. Je n'ai pas vraiment réagi, car c'était une première pour moi.

Aujourd'hui, je les remercie de m'avoir si bien accueillie, même si je ne suis là que pour un court laps de temps. Ce sont les seuls à s'être souciés de moi depuis toutes ces années.

J'ai fouillé la chambre de Lino. Quand il me cherchait, je pensais que c'était pour cela, mais non, il n'avait peut-être pas encore remarqué. Pour me venger des petits désagréments que Lino a causés, j'ai décidé de l'ignorer. Vous allez dire que c'est trop simple, mais pas du tout, surtout pour lui ; il déteste être ignoré.

Hier, je n'avais pas l'esprit à l'ignorer, mais aujourd'hui, c'est différent. Que le jeu recommence, je compte bien gagner cette manche demain soir, car je ne suis pas prête à abandonner.

Dans la cuisine, je cherche quelque chose à manger. Je me sens ici aussi à l'aise que chez moi. Hmm, il n'y a rien d'appétissant. Et si je sortais faire des courses ?

Oh oui, je vais le faire, juste pour énerver Lino. Il ne sait pas, mais hier, je l'ai entendu dire aux garçons que j'avais l'interdiction de sortir seule, en fait, de sortir tout court. Non mais pour qui se prend-il ? Même mon père ne s'en souciait pas. Ce n'est pas lui qui va m'interdire de sortir.

Pourquoi ne pas proposer à Alzira de m'accompagner ? Je ne l'ai pas vue depuis l'autre jour, surtout après ce que j'ai découvert.

Je monte les escaliers et frappe à sa porte. Elle me demande qui c'est, et je réponds que c'est moi. Elle n'hésite pas et ouvre la porte brutalement.

— Oh, salut Evie...

Je fronce les sourcils. Pourquoi ne l'ouvre-t-elle pas complètement ? Et qu'est-ce que c'est que cette mine déconfite ?

Elle reprend.

— Écoute, au sujet de l'autre jour, ce n'est vraiment pas ce que tu crois, il ne se passe rien avec Aran.

— Pourquoi te justifies-tu alors, s'il n'y a rien ?

— Pour te faire comprendre qu'il ne s'est vraiment rien passé.

— Mais il s'est passé quelque chose, murmuré-je.

— Quoi ? dit-elle, perdue.

— Je peux entrer dans ta chambre ? lui demandai-je.