Chapitre 29

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Kara

Je ralentis en arrivant au bas de mon immeuble et regarde ma montre. Dix kilomètres en moins d'une heure, c'est pas mal, mais pas suffisant pour me sortir Lena de la tête. J'essuie la sueur qui perle sur mon front malgré la température glaciale de cette fin de mois de décembre. Mais maintenant que je me suis arrêtée, le froid commence à se faire sentir. Je rentre donc précipitamment à l'intérieur du bâtiment et grimpe jusqu'au troisième étage. À peine ai-je refermé la porte que Streaky s'avance vers moi. Il vient aussitôt se frotter à ma jambe en ronronnant.

— Essaie pas de m'attendrir, toi. Tu as déjà eu à manger et tu n'auras rien d'autre, espèce de glouton.

Alex me dit toujours que je déteins sur lui. Je ne sais pas s'il a adopté ma passion pour la nourriture ou si c'est autre chose, mais il semble avoir un appétit sans fin. Comme s'il avait compris que ses manœuvres n'aboutiraient à rien, le félin se détourne de moi et retourne au coin du canapé qu'il venait de quitter.

Je pose le sachet de viennoiseries sur la table et me dirige vers ma chambre. Après avoir pris de quoi me changer, je rejoins la salle de bain et me glisse sous la douche après m'être dévêtue. Je laisse l'eau brûlante me réchauffer, espérant ainsi chasser toutes mes pensées. Mais je ne me leurre pas. Le silence de Lena est à la fois assourdissant et envahissant. Il prend toute la place. Je sais, grâce aux discussions que nous avons eues, que sa mère adoptive exerce sur elle une influence des plus néfastes. Elle lui renvoie une image déformée, empreinte de toute la rancœur accumulée, ce qui pèse sur la confiance de la brune.

J'ai bien tenté de lui démontrer que tout cela n'était dicté que par la jalousie et la rancœur, mais je crains de ne pas y être parvenue. Je sors de la cabine et me sèche vigoureusement avant de m'habiller. Je passe la main sur le miroir pour en chasser la buée et découvre l'image peu flatteuse que celui-ci me renvoie : de larges cernes bien visibles sous mes yeux, signe évident de mon manque de sommeil. Et cette fois, ce n'est malheureusement pas dû aux longues conversations téléphoniques avec Lena. Depuis notre presque baiser et surtout son silence, mes nuits sont tout sauf reposantes. Je ne cesse de repenser aux événements qui ont conduit à cela : Adam, ma colère contre Lena, la compréhension de sa situation et notre rapprochement, inévitable, inexorable.

Pourtant, après les ravages qu'avait faits Cat, j'avais craint de ne plus jamais pouvoir faire confiance. Mais dès l'instant où j'avais croisé le regard envoûtant de Lena, j'étais perdue. Et plus j'apprenais à la connaître, plus ce que je ressentais prenait de la consistance. Lena était comme une drogue. Une drogue dure dont chaque dose me rendait plus accro. Bien loin de l'image froide et hautaine que j'avais eue d'elle au premier abord, c'était une femme douce et drôle. D'une intelligence et d'une culture qui m'impressionnaient à chaque fois. À ses côtés, je me sentais bien, à ma place.

Je me secoue. Je dois arrêter de penser à elle. Après la multitude de messages que je lui ai envoyés depuis lundi, j'ai fini par décider de lui laisser de l'espace. Après un dernier message hier, resté sans réponse, je n'ai plus insisté. Même si cela ne m'empêche pas de regarder mon portable toutes les cinq minutes.

Je me prépare un café et prends mon petit-déjeuner, réfléchissant à ce que je pourrais faire pour occuper cette journée de vacances. C'est à ce moment que mon portable m'indique l'arrivée d'un message. Je l'allume fébrilement, mais ce n'est pas ce à quoi je m'attendais.


De : Alex

À : 09 h 08

Comment tu vas aujourd'hui ?

Pas trop dur ?


Je ne comprends pas son message jusqu'à ce que je réalise quel jour nous sommes : le 18 décembre. Le jour où, il y a quelques années, elle m'a probablement sauvé la vie.

Le poids du passéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant