Châtel, le 14 octobre 1994
Mon Marc,
Mon Dieu ! Je ne reçois ta lettre qu'aujourd'hui, le jour de ton anniversaire en plus ! Je m'apprêtais à t'envoyer quelques douceurs de chez Praline, mais tu as besoin de bien plus. J'ai appelé la prison, je vais passer te voir jeudi (le 20). Le Dr Franz ne travaille pas le jeudi. Oh mon Dieu.
Et ne dis pas de bêtises. Bien sûr que je vais continuer à t'écrire ! Tout est arrangé. Brigitte est venue me présenter ses excuses en début de semaine et on a passé la soirée à rire. Elle me soutient, elle m'a dit que l'amour n'avait rien à faire du casier judiciaire. J'ai bien aimé sa formule.
J'espère que ces sales types seront bien surveillés maintenant. Tu sais, c'est ce que les gens disent aussi ici (c'est Brigitte qui me l'a confié). Que tu as caché l'argent quelque part pour le retrouver à ta sortie de prison. Mais moi, je ne les crois pas. Et même si c'était vrai, ça ne changerait rien.
Je suis allée voir mon amie Marie hier soir, tu sais, celle qui habite une très vieille maison dans le vieux Châtel. Il y faisait froid, mais elle a une grande cheminée et j'ai passé un bon moment devant le feu. Nous avons refait le monde en buvant du thé. Je lui ai tout raconté. Elle savait déjà bien entendu, mais elle avait eu la politesse de ne pas m'en parler en premier. Elle m'impressionne, Marie. C'est la fille d'une grande famille de Châtel, elle est très éduquée et elle lit beaucoup. Beaucoup plus que moi. Elle lit même des livres en anglais ! Parce qu'elle aime beaucoup Jane Austen, par exemple. Elle dit que ce n'est pas la même chose de lire les traductions. C'est possible, mais heureusement qu'elles sont là, sinon, moi, je n'y comprendrais rien. Enfin bref, elle m'a dit que ce que je vivais était digne d'un roman anglais ! Je pense qu'elle a raison. Tu ne te rends pas compte, Marc. Tu mets du roman dans ma vie, à plus d'un titre !
Je sais que les circonstances ne sont pas idéales, mais je suis quand même heureuse de venir te voir. Si tu m'y autorises, bien sûr. Je ne suis pas sûr que tu puisses me répondre à temps de toute façon. Alors, je viens quoi qu'il arrive et si, là-bas, on me dit que tu ne veux pas me voir, je ne me vexerais pas.
Je t'embrasse en faisant attention à tes blessures,
Ta Rose
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Cher Marc
General FictionRose vit dans un village de l'est. Un jour, elle prend son courage à deux mains et se décide à écrire une lettre à son écrivain préféré, auteur de best-seller, Marc Delta. Elle aurait pu le faire depuis longtemps, mais elle n'a jamais osé. Maintena...