Lettre 44

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Châtel, le 9 janvier 1995

Mon Marc,

Je me fiche bien de ce que les gens penseront ! Ceux qui y voient un inconvénient, je ne veux rien avoir affaire avec eux. Tant pis pour eux. Mais tu sais, ici, les gens finissent par accepter les choses. Au début, peut-être y aura-t-il quelques mauvaises langues, mais elles se tairont vite. Mes amies, elles, approuvent complètement cette idée. Je n'ai pas pu résister à l'envie de leur en parler. Elles ont très envie de te rencontrer. Pour elles, tu as payé ta dette, tu as le droit de vivre normalement, où il te plait et avec qui il te plait.

Bien sûr qu'il y a un vidéo-club à Châtel ! Tu nous prends pour des sauvages ? La station-service, à l'entrée du village, proposent plein de vidéos. Le patron aime bien le cinéma, il y a sans arrêt des nouveautés, même si en général, je choisis souvent des vieux films. Mais on prendra tout ce que tu as raté et on passera des soirées à s'en empiffrer, quitte à griller le magnétoscope ! Je vais t'acheter un plateau pour pouvoir manger sur le canapé, j'en ai un pour moi déjà, c'est très pratique. Il y a des supports qui se déplient en-dessous et on peut le poser juste au-dessus de ses cuisses.

Veux-tu que je prenne les choses en mains ? Voilà comment j'imagine le jour j... Attention, on a du temps à rattraper ! On va peut-être un peu courir après au début ! Et puis, finalement, j'ai l'impression de te connaitre depuis toujours. Mais en vérité, on se connait mal, on n'a jamais passé plus de trente minutes ensemble ! J'espère que tu ne me trouveras pas nulle une fois dehors. Je peux être casse-pieds, par moments, tu sais ?

Alors, donc, mon idée, c'est de venir te chercher à 11h le 19 janvier. Je ne sais pas si on peut rentrer, mais je préfère t'attendre dehors, sur la terrasse de la brasserie où j'avais déjeuné la première fois que je suis venu te voir. Ça s'appelle « Brasserie Arago », c'est facile. Et puis, c'est bon. On pourrait boire un verre et déjeuner là. Ensuite, on irait faire une petite balade parisienne, si le cœur t'en dit. Je voudrais refaire le chemin que j'avais arpenté sans toi. Enfin, avec toi, mais seulement dans ma tête à ce moment-là. Ce serait comme un rêve qui se réalise...

On partirait ensuite, vers 18h, pour être à Châtel vers 22h. Et on dinerait là-bas. Qu'en penses-tu ? Je ne veux pas confisquer ton premier jour de liberté, on fera comme tu voudras.

Ensuite, tu t'installeras chez moi. Je vais demander une semaine de vacances au Dr Franz pour pouvoir rester avec toi et t'emmener un peu partout. On pourrait même aller à la mer un jour ! Ce n'est pas très loin, il faut un peu plus d'une heure en voiture et on y est ! J'aime bien les plages en hiver. Elles sont désertes et la mer est belle. On pourrait manger des huitres, qu'en penses-tu ?

Bon, je m'emballe. Ça ne va pas m'aider à tuer mon impatience.

Je t'embrasse si fort,

C'est là, c'est maintenant, mon amour, on y est !

Ta Rose

Cher MarcOù les histoires vivent. Découvrez maintenant