LE GRAND FROID/Chapitre 7 : Intrusion dans la salle de réunion

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Je me réveille quelques heures plus tard par des voix que j'entends au loin. Je regarde autour de moi et il semblerait que je sois resté dans la même position toute la nuit et Raph aussi : sa main est toujours sur moi. Étonnement j'ai plutôt bien dormi, j'espère que lui aussi et que j'ai pas trop gêné. Je l'observe et je peux voir qu'il dort encore, je n'ose pas me relever et risquer de le réveiller alors je reste là et apprécie le moment d'être contre lui, sentir sa chaleur. C'est un peu comme si nous étions dans un petit cocon et je ne veux interrompre ça pour rien au monde. Et c'est surtout que j'ai la flemme de bouger. Comme tous les matins il me faut une bonne grosse demi-heure pour sortir de mon lit, c'est d'ailleurs pour ça que j'arrive régulièrement en retard au travail.

J'en profite pour le contempler dormir, il est tellement beau. La lumière matinale qui passe par les quelques fenêtres vitrées du toit passent entre ses bouclettes rousses et leur donne une teinte semblable à celle d'une carotte. Les muscles de sa mâchoire sont relâchés, lui donnant un air paisible et serein. Je me demande s'il est en train de rêver, et si c'est le cas à quoi cela ressemblerait. J'avoue que les miens sont relativement spéciaux, et encore le mot est faible. Une fois, j'ai rêvé que je participais à un concours du meilleur potager. Seulement mon arrosoir me disait qu'il ne voulait pas m'aider, donc tous mes légumes sont morts en me criant que c'était de ma faute. Je n'oublierai jamais le visage rempli de haine et de tristesse de la pauvre petite aubergine au fond du jardin. Depuis, dès que je vois ce légume dans les rayons du magasin, je me sens presque obligée de m'excuser.

Est ce que lui aussi fait ce genre de rêve ? Je donnerai tout pour me transformer en marchand de sable et me glisser dans ses songes. Perdu dans mes pensées, je ne remarque pas qu'il a ouvert les yeux et qu'un petit sourir se dessine sur son visage avant qu'il me murmure :

-Bonjour toi...


Il remarque sa main posée sur ma tête et il dégage les quelques mèches qui sont tombées sur mon visage avant de reprendre les délicates caresses dans mes cheveux qui m'ont bercé la nuit dernière.

Si seulement tous les matins pourrais être comme celui ci je serai là personne la plus heureuse du monde. La plus en retard car j'aurai encore plus de mal à sortir du lit mais la plus heureuse quand même.

Dans un élan de courage je me relève en poussant un petit grognement. Je me met assise en tailleur en prenant ma tête entre mes mains pour ensuite me frotter les yeux comme une enfant qui a encore sommeil.

-Bonjour Raph, bien dormis ?

-Ouais mais le sol est vraiment dur par contre, j'ai le dos en compote.


On se dirige vers les machines à café et pour une fois je bénie mon sac lourd rempli de monnaie. J'insère les pièces, je prends un expresso et lui un café au lait. Puis on s'installe au réfectoire, à la même place que la veille.

Je regarde par la fenêtre et il y a désormais quarante centimètres de neige environ. Heureusement, ça s'est arrêté de tomber. Je peux remarquer un petit thermomètre numérique posé sur le rebord de la fenêtre qui indique qu'il fait moins dix degrés à l'extérieur.

Je bois mon café en une fois, souffle un coup, prend ma blouse que j'avais jeté dans un coin de la pièce et passe la porte de dehors pour rejoindre l'espace fumeur.

Évidemment je suis seule, personne à part moi ne se risquerait dans ce froid. Sauf que le manque de nicotine sur mon humeur est plus dangereux que me retenir à l'intérieur et ça, Raph le sait très bien donc il ne m'a pas retenue.

Au bout de même pas cinq minutes je suis de retour au réfectoire, complètement frigorifiée. Mon rouquin préféré m'attend là, avec une tasse de thé fumante dans les mains qu'il me tend.

-J'aurais pas pu rêver mieux ! dit-je en lui prenant la tasse


Il me sourit et on se demande ce qu'on va pouvoir faire aujourd'hui car personne n'est revenu travailler pour l'instant. Je me sens comme ces jours d'hiver où on attendait le bus en espérant qu'il ne viendrait pas à cause de la météo. Sauf que dans ce cas précis nous serions coincé dans l'école.

Finalement, la journée passe plutôt vite, nous sommes restés dans une salle de réunion qui possède un énorme téléviseur et avec mon ordinateur portable nous avons projeté des vidéos youtube. Impossible d'aller sur d'autres sites de streaming car le réseau informatique les bloque.

Actuellement, et après avoir fait le tour des nouvelles vidéos que nous n'avions pas encore vu, je me décide à aller sur une chaîne youtube qui a marqué mon adolescence et je sais que c'est la même chose pour Raph. Je clique sur une vidéo au hasard et me rassis à côté de lui. Nous sommes assis en face de l'écran, sur deux gros fauteuils en faux cuir empruntés dans la zone d'attente des visiteurs à l'accueil. Nos plaids noir sur notre corps, comme si nous étions au cinéma mais qu'il n'y avait que nous dans la salle.

-Ouahhh ça fait une éternité que je ne l'avais plus vu ! Clairement à l'époque c'était une masterclass !

-C'est toujours une masterclass, Raph !


Nous rions devant ce que nous diffuse la télé et nous regardons plusieurs épisodes, souvent en sortant les répliques en même temps que la personne à l'écran. Il est clair que même après plusieurs années nous les connaissons encore par cœur. Après une bonne dizaine de fous rire je décide de me lever en priant Raph de m'attendre.

Les fins du monde d'ElieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant