Chapitre 23

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-T'en lire un ? demanda Gabriel, surpris que le plus jeune s'y intéresse réellement.
  -Oui, s'il te plaît.

Cette demande était plus que sincère, cela se reflétait dans les yeux de son cadet. Cependant, partager ses écrits à quelqu'un était encore inédit pour le Premier Ministre. Accepter cette demande, c'était une façon bien particulière de se mettre à nu face à son amant. Lui, qui pourtant, connaissait si bien sa nudité.

  -Peut-être plus tard, ricana le plus vieux.

Il vit bien que sa réponse ne contenta pas son opposant et à vrai dire, ça ne le contentait même pas lui-même.

  -Si c'est plus tard alors tu auras le temps d'en écrire un à propos de moi, conclut l'italien.
  -Tu penses vraiment que tu vaux la peine de faire parti de mes écrits ?
  -Peut-être pas moi, Attal. Peut-être l'amour que vous me portez et cela vaut tous les recueils du monde.

Un long frisson parcourut l'échine du trentenaire. Bordel, c'est pas possible d'avoir une emprise aussi grande sur quelqu'un. Il dût fermer les yeux afin de se concentrer tellement les émotions qui l'assaillaient étaient intenses. Il sentit le monde trembler en dessous de lui, comme s'il n'avait plus de remparts, qu'il était désarmé. Bardella avait décidément le tour pour les déclarations aux allures innocentes et implicites.

Une fois qu'il s'était remis de ses émotions, se foutant bien d'avoir laissé la métaphore de son adversaire en suspens, il reprit la parole :
  -Ne vous la jouez pas romantique, Bardella. Vous n'échapperez pas à la peinture.

Jordan, qui était assis sur une chaise, tournée à droite de façon à être face au Premier Ministre qui se tenait debout, ne pouvait quitter ce dernier des yeux. Il posa des mains possessives sur les fines hanches de son amant lorsque celui-ci fut à sa portée, l'attirant tout doucement vers ses genoux.

Cependant, le trentenaire mît ses nerfs à rude épreuve, réprimant le désir qui lui brûlait les reins. Il disposa ses jambes de part et d'autres de son amant sans pour autant s'asseoir. Il se pencha pour poser ses lèvres sur ses jumelles et dansèrent dans un slow d'une lenteur calculée. Ensuite, il se détacha lentement, quittant à contre cœur ce contact.

Il se redressa, fier de lui. Il décela directement cette lueur instinctive, presque animale qu'il venait d'allumer dans le regard de son amant. Cela fit grandir encore un peu plus son égo, alimentant également la passion qui lui tordait le ventre et lui mit du baume au cœur. Gabriel était toujours surpris de voir à quel point une réaction, certainement anodine, pouvait entraîner tant de choses en lui.

L'interprétation de l'amour qu'on avait inculqué à Gabriel était celle d'un foyer aimant. Celle où chaque membre d'une famille trouve que l'amour réside dans chaque rire et moment partagé, peut-être aussi dans les pleurs. C'était un amour de tous les jours, que l'on ne pouvait voir seulement qu'avec du recul. Un amour posé, calme, ne créant pas plus de vagues que ça mais déplaçant bien des immeubles.

Cependant, Attal était désarmé face à l'amour qu'il portait et recevait. Vous savez, ça n'avait jamais vraiment été le genre du trentenaire de faire des vagues dans sa sphère personnel. Jordan et son sourire enjôleur le frappait, déroutant complètement les idées qu'il s'était faite. Il pensait l'amour passionnel réservé qu'aux livres, une sorte de légende à la même échelle que celle d'un chaudron au pied d'un arc-en-ciel. Pourtant, chaque fois qu'il pensait s'habituer à tout ça, son ventre se serrait encore une fois.

  -Alors ! dit le Premier Ministre en prenant place en face de son partenaire. Dis moi, qu'as-tu envie de peindre ?

Jordan hésitait la mine légèrement fermée et mécontente.

Au delà de la politique Où les histoires vivent. Découvrez maintenant