La tension était inexorablement palpable dans l'air. Les deux et bien d'autres siégeaient au parlement européen. Gabriel n'avait, en théorie, rien à faire là mais il ne s'agissait pas d'un rassemblement normal. Jordan, lui, était tout à fait à sa place bien qu'il ne s'y soit pas présenté souvent.La discussion était préoccupante, un sujet des plus à l'actualité écopait l'attention des députés. Chacun débattait, défendait ses idées comme si leur vie était en jeu, comme s'ils allaient réussir à faire changer quelqu'un d'avis.
Gabriel était concentré, prenait des notes bien que son esprit soit embrumé d'un léger brouillard. Comme si il était moins vif et rapide qu'à l'accoutumée. Il se faisait discret, laissant les autres représentants de son parti mener la guerre. Il notait, examinait, passait chaque parole au peigne fin, voulant tout savoir. Rien ne devait passer à l'attrape, aucun potentiel facteur trahissant la faiblesse d'un ne devait passer inaperçu.
Il luttait pour garder son attention, sentant le regard de son amant lui ronger la peau. Il lui avait laissé la victoire, n'ayant trouvé aucune réplique face au dernier message qu'ils avaient échangé. Jordan ne se faisait pas discret, il feignait être dans la lune alors qu'en réalité tout son être était tourné vers le Premier Ministre.
Une certaine frustration inexprimée régnait en chacun d'eux. Le désir n'avait jamais eut cette saveur. La saveur de la privation, de l'inaccessible. Ils avaient plongé tous les deux sans réfléchir dans ce jeu qui allait mettre leurs nerfs à rude épreuve. Maintenant, leur seule préoccupation était de lutter contre eux-mêmes, face à leur instinct bien trop dominant.
En écoutant d'une seule oreille, Jordan trouva une faille dans les paroles de Valérie Hayer. Il se leva alors, sans aucune hésitation, pris d'une énergie comparable à celle d'un débat et sans plus attendre prit la parole :
-Non mais est-ce que vous vous entendez ?! Pardonnez moi de faire interruption de la sorte dans votre mascarade mais sérieusement, Madame. Dites moi que vous plaisantez. Il est bon pour nos agriculteurs ? Ce sont des circonstances aggravantes pour une fille d'agriculteur comme vous le prétendez ! Nos agriculteurs valent de l'or, de l'or en barre ! Depuis que votre politique douteuse est au pouvoir, le nombre n'a cessé de diminuer !Gabriel ne put s'empêcher de sourire face à cette réplique. Le plus jeune savait parfaitement ce qu'il faisait. Il attaquait Valérie Hayer, jouait avec le feu étant donné que sa liaison du week-end passé n'était pas un secret pour elle. Il savait pertinemment qu'elle ne prendrait jamais le risque de mettre son ami en danger, malgré toute la rancœur qu'elle pouvait éprouver envers le président du RN. Il s'amusait, exerçant une pression de plus. Valerie ne pouvait déjà pas blairer le plus jeune en tant normal, mais Jordan s'amusait de sa domination écrasante. Son attitude voulait tout dire, trahissant la fierté et la confiance débordante qui façonnaient son image. Le Premier Ministre voyait le message destiné à son amie très clairement, une guerre silencieuse se déroulait devant une foule incroyable.
J'ai couché avec le Premier Ministre qui est aussi ton meilleur ami, je suis l'opposé de tes idées, comment vas-tu m'attaquer ?
Il avait réfléchit à chacun de ses mots, bien conscient que Gabriel daignerait enfin le regarder. Il avait profité pour y glisser une petite allusion à leur échange électrique qui avait eut lieu quelques instants plus tôt. Attal ne pourra pas passer à côté de ça, c'était une certitude.
Son sourire ne le quitta pas. Le trentenaire egardait l'homme qu'il aimait se battre, défendre des idées qu'il ne partageait pas. Tous s'étaient ligués contre lui, comme si malgré leurs différences Jordan était la cible principale à abattre. Il ne s'abstenu même pas de le dévorer du regard, voulant laisser une trace indélébile sur le corps du plus jeune rien qu'avec un coup d'œil. Il était conscient de l'intensité et de la signification de son œillade, également sagace de la lutte que Jordan menait pour ne pas céder.
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Au delà de la politique
Fiksi PenggemarOn dit souvent qu'il y a deux types d'amour : 1) "le coup de foudre", un amour transperçant, inévitable, présent à la première seconde. 2)"tomber amoureux", une chute lente et fracassante, nourrissant l'amour qui grandit au fur et à mesure des jou...