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Le liquide dansait dans la fiole. Depuis combien de temps Harry ne s'était-il pas endormi sans une potion ? Trop longtemps pour pouvoir s'en souvenir.

Mais ce soir-là était différent. Il y avait eu un long silence après qu'ils se soient rhabillés, durant lequel Harry avait fixé Drago non sans une admiration nouvelle dans le regard. Quoi qu'il advienne, il aurait toujours cette place-là ; le premier. Drago avait fini par chuchoter :

_ Pars, comme si je dormais encore. »

Harry avait passé sa cape sur ses épaules et s'était approché de Malefoy dont les yeux étaient fermés. Il avait embrassé ses lèvres immobiles avant de murmurer à son tour :

_ Rêve-moi fort. »

Et il s'était enfui.

Harry n'avait croisé personne dans les couloirs, ni dans la salle commune et dans son dortoir, chacun dormait. Il avait glissé sa main sous l'oreiller pour attraper le petit coffret de bois qu'il y cachait, toujours remis en place par les elfs de maison. Il avait attrapé, par habitude, la petite fiole, contenant un liquide ambré et sirupeux.


Mais ce soir-là était différent. Il ne voulait pas oublier. Il ne voulait jamais se défaire de l'image d'un Drago tordu d'un plaisir offert par son corps à lui. Il le sentait encore sur sa peau et ne voulait jamais perdre cette fragrance.

Harry voulait dormir simplement. Pour la première fois depuis longtemps, il voulait fermer les yeux et s'endormir. Etait-ce seulement trop demander ?


La pénombre ne l'était plus tant. Harry n'avait pas souvenir de s'être assoupi. Tout n'était qu'une obscurité soudaine et une fatigue semblable à un coup de massue qui avait fait disparaître les dernières heures. Le dortoir dormait encore. Des souffles lourds de sommeil paisible. Harry sortit de sa couette, soupira, hésita. Finalement, il avala la potion tonique, et sortit la carte du Maraudeur. Malefoy était toujours dans son dortoir.

C'était étrange. Harry n'avait connu ce sentiment de calme que si rarement. Cette façon qu'il avait de marcher, descendant vers la salle commune, et de ne penser soudain à rien. Seulement Malefoy.

Le repos fut de courte durée. Les feux allumés dans la pièce, et déjà, dans l'un des fauteuils de schintz rouge, Hermione lisait un épais volume relié de cuir. Il ne pouvait pas l'éviter. Il ne tenta pas. Sans rien dire, il s'assit un peu plus loin, sans la regarder.

« Tu es toujours en vie. »

Elle avait attendu plusieurs minutes d'un silence, durant lequel elle lui laissait le temps de s'enfuir. Mais Harry savait que s'il fuyait maintenant, il ne lui échapperait pas longtemps.

« Pas même une égratignure, souffla-t-il. »

Il y avait une sorte de rancueur dans sa voix et Hermione ne s'en formalisa pas.

« Ecoute Harry, je sais que Ron et moi ... N'avons pas été très honnêtes. Du tout, même.

_ Hermione, je m'en fous. Baisez tranquilles. Mais ne me faites pas de grands discours sur quelque chose que vous ne comprenez pas. Vous n'êtes pas moi, vous ne le serez jamais. Vous ne pouvez pas imaginer ma douleur, physique et psychique. Vous ne pouvez pas.

_ Mais Malefoy, si.

_ Malefoy ... »

Fermant les yeux, il inspira longuement. Malefoy nu. Malefoy dans ses bras. Malefoy couvert de sang.

« Malefoy, c'est quelque chose de nouveau. Que je ne comprends pas.

_ Je connais ça. »

Harry leva les yeux au ciel et Hermione tiqua.

« Non, Harry. Il faut aussi que toi tu comprennes. Tu n'es pas seul dans ce combat, même si notre place n'est pas la tienne. Mais nous vivons tous les mêmes évènements que toi, Harry. Nous éprouvons la même peur, celle de la mort, la nôtre et celle de nos proches, la peur du combat, des attaques. Nous vivons cette même urgence, ce besoin de nous exprimer. Nous n'avons pas le temps de nous poser des questions de savoir si c'est raisonnable ou non. Je comprends, Malefoy. Je ne peux sans doute pas imaginer l'ampleur, la résonnance de ce que vous vivez. Mais je comprends.

_ Merci, Hermione.

_ Non, tu n'es pas à dire merci. Nous sommes amis, et cela fait partie de l'amitié. Comme dans un mariage, il y a les bons et les mauvais côtés. Et comme dans un mariage, il faut que tu nous parles.

_ Ron n'est pas toi.

_ Certes. Et je sais qu'entre hommes, ce n'est pas la même chose. Mais il s'inquiète pour toi, crois-moi. »

Harry soupira lourdement, massant par réflexe la cicatrice de son front. Il savait qu'elle avait raison.

« Je lui en parlerai, mais pas maintenant, Hermione. Il y a encore trop de flou dans ce qu'il se passe. La seule chose dont je suis sûr, c'est que Drago ne me veut pas de mal.

_ Je suppose que je n'ai pas besoin de rappeler que vous jouez gros.

_ Non. Tu n'as pas besoin. »

Adava AmortentiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant