Sombre attirance

Chapitre 18 -Selena

Je reste figée un instant, les lèvres encore brûlantes de ce baiser. Mon souffle est court, mon cœur bat à toute vitesse. Je n'arrive pas à comprendre ce qui vient de se passer. Ce n'était pas juste un baiser. C'était plus. Un mélange de désir, de rage, et de quelque chose de plus profond que je ne veux même pas nommer.

Je reste assise sur le canapé, tentant de calmer la tempête en moi. Mes doigts frôlent mes lèvres, encore imprégnées de l'intensité de son baiser. C'était brutal, passionné, désordonné, et pourtant cela semblait juste.

Mais maintenant, il est parti. Et je déteste l'effet qu'il a sur moi. Je ne devrais pas être aussi... obsédée.

Je me lève d'un bond, incapable de rester immobile. L'air de l'appartement devient trop lourd, trop oppressant. Je ressens le besoin de faire quelque chose, de bouger, de retrouver un semblant de contrôle. Je me dirige vers la cuisine pour me verser un verre d'eau, espérant apaiser ce chaos intérieur. Mais son odeur est encore là.

Boisée et envoûtante, elle flotte dans l'air, comme une promesse inachevée. Je ferme les yeux et inspire profondément. C'est insupportable. Il est partout, même quand il n'est pas là.

Pourquoi suis-je comme ça avec lui ? Je me laisse glisser contre le comptoir de la cuisine, mon verre toujours à la main. Pourquoi est-il parti ? Est-ce qu'il a eu peur ? Ou est-ce moi qui l'ai effrayé ? A-t-il une copine ? Je me rappelle soudain de la blonde que j'avais vue la dernière fois, merde, merde, merde, j'ai été tellement impulsive sur ce coup !

Mon téléphone vibre doucement sur la table. C'est un message de Marianne :
"Je rentre dans une heure."

Je repose le téléphone et me dirige vers la salle de bain, espérant que l'eau chaude me lavera de cette confusion. Mais même sous la douche, il est là, dans chaque pensée, chaque battement de mon cœur.

Je suis foutue.

Je décide de faire un peu de ménage avant l'arrivée de Marianne. En mettant de l'ordre dans l'appartement, j'espère aussi mettre de l'ordre dans mes pensées.

Vingt minutes suffisent. Tout est impeccable, et je me permets un petit sourire en voyant la vaisselle.

— "Merci, dieu des lave-vaisselles," murmuré-je avec un rire discret. Sans toi, je serais toujours en train de récurer.

Une fois le ménage terminé, je me dirige vers la table du salon pour remettre tout en ordre. Mais quelque chose attire mon attention : la lettre d'Anne gît par terre, partiellement dissimulée sous une chaise.

Je me penche pour ramasser la lettre. Mon cœur s'emballe, je m'assieds sur le canapé, le souffle court, les doigts serrant légèrement le papier jauni. Je n'avais jamais eu l'occasion de la lire en entier. Entre la perte de grand-mère et la trahison de Kai, mon esprit avait été trop embrouillé. J'avais mis la lettre de côté, comme si elle pouvait attendre.

Mais maintenant que le chaos s'était un peu calmé, il était temps de la lire. Je déplie doucement la lettre, inspirant profondément. Les premières lignes sont déjà familières, celles où elle me léguait son penthouse. Je poursuis avec les lignes suivantes.

"Ma chère Selena,

Si tu lis cette lettre, c'est que je ne suis plus là. Écrire ces mots me fait mal, car je sais que je te laisse avec des questions sans réponses. Mais il est temps que tu découvrent la vérité sur ton héritage et ce que cela signifie pour ton avenir.

Sentinel. Cette entreprise n'est pas seulement une affaire familiale ; c'est un bastion de pouvoir. Elle a été fondée par tes parents avec une ambition claire : changer le monde. Quand tu es née, ils ont décidé de te confier à moi, pensant qu'ils auraient le temps de te retrouver. Mais le destin en a décidé autrement.

Ils t'ont toujours aimée, Selena, mais leur amour pour leur travail les a consumés. À trois ans, tu as perdu non seulement tes parents, mais aussi le droit de connaître qui tu es vraiment.

Aujourd'hui, je te lègue Sentinel et le projet Nexus. Ce dernier n'est pas qu'un simple développement technologique ; il a le potentiel de transformer des vies, mais il peut aussi être utilisé à des fins destructrices s'il tombe entre de mauvaises mains. Je te demande de prendre cela très au sérieux.

Nexus est ta responsabilité. C'est un fardeau que seule toi peux porter. Fais confiance à ton instinct, ma chérie. Les vérités que tu découvriras peuvent être dérangeantes, mais sache que les vrais ennemis se cachent souvent derrière de beaux sourires.

Souviens-toi, tu n'es jamais seule. Je serai toujours avec toi, peu importe où tu vas. J'ai fait de mon mieux pour te protéger, mais la vérité doit émerger, même si elle est douloureuse.

Avec tout mon amour,

Anne"

Je replie lentement la lettre, les mains tremblantes. Sentinel m'appartient. Nexus est sous ma responsabilité. Et je ne peux faire confiance à personne.

Le bruit de la clé tournant dans la serrure me fait sursauter. Je cache la lettre sous une pile de magazines sur la table, juste avant que Marianne n'entre.

— "Hey ! T'as survécu à ta soirée en solo ?" demande-t-elle avec un sourire, jetant son sac sur une chaise.

— "Ouais... tranquille." Je me force à sourire. "J'ai juste fait du ménage et... réfléchi."

— "Réfléchi, hein ? À quoi exactement ?" Elle arque un sourcil amusé.

Je prends une inspiration. Autant tout lui dire.

— "J'ai embrassé Christian."

Marianne écarquille les yeux, puis éclate de rire.

— "Attends, attends ! Toi ?! Madame timide a osé faire le premier pas ? Je rêve !"

Je ris doucement, mais je sens mes joues chauffer.

— "Je ne sais pas ce qui m'a pris."

— "Waouh !" Elle me donne une petite tape sur l'épaule. "Je suis impressionnée !"

Puis, son expression change légèrement, devenant plus sérieuse.

— "Mais fais attention, Selena. On ne sait rien de lui."

Je hoche la tête, consciente qu'elle a raison.

— "Madame Bourguignoff," ajoute-t-elle avec un clin d'œil malicieux. "Si ça devient sérieux, faudra vraiment penser à changer de nom. Parce que Selena Bourguignoff, c'est... hmm, disons particulier."

Nous éclatons de rire.
Je me sens un peu plus légère. Mais au fond de moi, le poids de la lettre est toujours là. Sentinel est mon héritage, mais aussi mon fardeau.