Chapitre 19 - Christian

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Je suis sorti de son appartement, coupant court à ce moment . Pas parce que je ne la désirais pas, bien au contraire. Si nous étions allés plus loin, il n'y aurait plus eu de retour possible. J'aurais franchi une ligne, et une fois de l'autre côté, il aurait été impossible de revenir. Selena ne savait rien de moi. Elle méritait quelqu'un de meilleur. Quelqu'un qui ne portait pas le poids des ténèbres , car moi , je préfèrerai être le méchant à ses côtés plutôt que le héros qui risquerai de la perdre à cause d'un sens mal placé de la morale.
Qu'aurait-elle fait si elle savait l'être que j'étais vraiment ? Si elle connaissait la vérité sur les choses que j'ai faites ? Les hommes que j'ai tués sans une once de regret ? Son regard changerait-il, se ternirait-il de dégoût ? C'est la pensée qui m'a poussé à me retirer. Mon amour pour elle est trop vaste, trop
sauvage. Un amour dangereux. Je suis une force destructrice, un tueur froid, et elle est trop délicate pour ça. Mais quelque chose en moi se brise à cette idée , car en dépit de tout, je veux la posséder entièrement.

Je n'ai jamais ressentit cela pour  quelqu'un et ça me terrifie. Perdu dans mes pensées, j'avance machinalement vers mon salon. C'est seulement alors que je remarque la silhouette assise dans le fauteuil du fond, tapie dans l'ombre. Mon cœur se serre, et je me fige, les sens en alerte.

— "Bonsoir, fils."

Sa voix est basse, posée, avec cette gravité familière que je reconnaîtrais entre mille.

Je plisse les yeux. Père.

— "Que fais-tu ici ?" demandé-je d'une voix tendue.

Il croise les jambes avec une aisance calculée, un léger sourire au coin des lèvres.

— "Je suis venu prendre de tes nouvelles."

Je reste immobile, une tension glaciale s'installant entre nous. Ce n'est jamais un bon signe quand mon père décide de venir en personne. Il ne se déplace jamais sans raison.

— "Alors, comment avance ta mission ?" demande-t-il en faisant semblant d'être intéressé.

Je serre les dents. Il ne me demande jamais cela sans arrière-pensée. Chaque mot, chaque geste chez lui est une manipulation bien huilée.

Puis, il se redresse légèrement, et son sourire s'élargit.

— "On dirait que mon plan marche mieux que prévu."

Je le fixe, mon estomac se nouant à ses mots.

— "Quel plan ?" demandé-je, le cœur battant plus vite.

Il laisse échapper un petit rire, un son qui m'irrite au plus haut point.

— "Tu crois que je t'ai logé ici par hasard ?"

Mon sang se glace. Je le savais. Tout est toujours calculé avec lui.

— "Il y a une clé, Christian." Il parle lentement, savourant chaque mot. "Quand le projet Nexus sera finalisé, une seule chose pourra le déverrouiller : l'ADN de Selena Woods."

Mes poings se serrent. Une vague de rage monte en moi. Il poursuit, impassible :

— "D'après le rapport de ton frère, vous vous êtes bien rapprochés." Son sourire devient carnassier. "Tu as dépassé mes attentes."

Je reste figé, dégoûté par ses paroles. Il savait. Il savait depuis le début, et il a planifié tout cela sans m'en informer. Ce n'était pas seulement une mission pour voler Nexus ; il voulait également Selena. Mon estomac se tord de colère. Je me force à garder mon visage impassible. Si mon père savait à quel point Selena comptait pour moi, il n'hésiterait pas une seconde à s'en servir contre moi. Chaque fibre de mon être me crie de la protéger, mais je sais qu'il ne doit rien soupçonner. Je ravale la tempête intérieure qui menace de me submerger.Je dois faire passer Selena pour une simple conquête. Juste une distraction. Si je montre que je tiens à elle, il en fera une arme contre moi.

Mon père, toujours aussi froid et calculateur, croise les bras, un léger sourire sur les lèvres.Je soutiens son regard, mes poings serrés. Je ne peux pas lui donner cette satisfaction.

— "Selena ?" Je hausse les épaules avec indifférence, bien que chaque mot me coûte. "C'est juste une fille parmi d'autres. Un passe-temps, rien de plus."

Mon père sourit légèrement, mais ses yeux luisent d'une satisfaction malveillante. Il croit mes paroles.

— "Un passe-temps, hein ?" Il arque un sourcil, amusé. "Alors, tu n'auras pas de problème à la sacrifier si nécessaire."

Je serre les dents, luttant pour ne pas laisser transparaître ma rage.

— "Bien sûr. Elle ne compte pas." Les mots me brûlent la gorge, mais je les prononce d'une voix plate, contrôlée. "Je peux m'en débarrasser quand je veux."

Il laisse échapper un petit rire satisfait, sa posture détendue comme si je venais de lui confirmer ce qu'il voulait entendre.

— "Parfait. Ne te laisse pas distraire alors. Nexus doit être sécurisé, et je compte sur toi."

Il se redresse, ajustant nonchalamment le col de son manteau.

— "Je savais que je pouvais te faire confiance, fils. Tu es comme moi, après tout."

Ces derniers mots me frappent avec plus de force qu'il ne le pense. Comme lui ? Non. Je refuse de devenir comme cet homme.

Il sort un objet de sa poche et le dépose sur la table basse avec un sourire fin.

— "Petit cadeau. J'espère que ça t'aidera à rester concentré."

Je le regarde partir, son pas assuré et léger, comme s'il venait de gagner une partie bien orchestrée. Le silence retombe dans la pièce, mais je sais que la bataille ne fait que commencer.Je m'approche de la table et fixe le cadre photo qu'il a laissé. Je souris, mais ce n'est pas un sourire d'amusement. Il pense vraiment que je suis un amateur.Avec précaution, je démonte le cadre. À l'intérieur : une caméra et un micro. Évidemment. Mon père, fidèle à lui-même. Toujours à jouer avec les apparences, toujours à manipuler. Il croit pouvoir me surveiller et me contrôler comme un enfant.Je passe le reste de la nuit à fouiller l'appartement. Je ne veux rien laisser au hasard. Mais il n'y a rien d'autre. Soit il n'a laissé qu'un seul appareil, soit il veut que je pense qu'il en a d'autres ailleurs.

Je m'assois au bord du lit, épuisé. Mes pensées tourbillonnent : Selena, Nexus, mon père. Rien ne semble avoir de sens. Chaque choix semble conduire à un piège.Je passe une main sur mon visage, tentant de rassembler mes idées. Selena... mon père. Je ne peux pas la laisser entre ses griffes. Elle est devenue mon point faible, et je ne sais pas comment gérer ça.Je me laisse tomber sur le lit, le regard fixé sur le plafond. L'odeur de vanille de Selena flotte encore sur moi, douce et entêtante. Cela me fait sourire malgré moi.
Tout ce que je sais, c'est que je dois la protéger, coûte que coûte. Mais comment ? Je suis pris dans une toile tissée par mon père, et le temps joue contre moi.

Je ferme les yeux, essayant de calmer le chaos dans mon esprit. Je dois trouver un moyen de garder Selena en sécurité, sans qu'elle ne découvre ce que je suis vraiment. Et surtout, sans que mon père ne puisse l'utiliser contre moi.

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