𝑳𝒆𝒔 𝑶𝒎𝒃𝒓𝒆𝒔 𝑫𝒖 𝑫𝒆𝒔𝒕𝒊𝒏

Près du coeur...

Kenna

Je me remémorai ma visite au château, le sourire lumineux d’Ailee éclairant les couloirs majestueux. Les murs résonnaient encore de son rire, une mélodie douce et envoûtante. La lumière du jour filtrant à travers les vitraux colorés peignait des ombres dansantes sur le sol de pierre, rendant l’atmosphère presque féerique. Pourtant, au-delà de la beauté du lieu, c'était la présence d’Ailee qui m’obsédait, comme un doux poison coulant dans mes veines. Pourquoi, me demandai-je, ressentais-je ce besoin irrésistible de percer ses secrets ?

Ma chambre, un sanctuaire de rêve, m’accueillit. Au centre, un lit de princesse, drapé de satin soyeux, m’invitait à m’y plonger. Les rideaux qui flottaient doucement sur les côtés semblaient murmurer des promesses de nuits étoilées. Un secrétaire trônait majestueusement au milieu de la pièce, ses surfaces lustrées reflétant la lumière d'une bougie vacillante. Je m'y installai, mes pensées se bousculant, l'esprit tourné vers Ailee et les mystères qui l’entouraient.

Je l’observai chaque jour, analysant chacun de ses gestes. La façon dont elle s’animait en parlant de ses rêves, le frémissement de sa voix lorsque son regard se perdait au loin. Pourquoi cette fascination ? Pourquoi ces questions qui tourbillonneraient sans fin dans mon esprit ?

Le lendemain matin, le ciel s'éveilla avec une lumière douce. Mon cœur battait à l'idée de suivre Ailee. J’enfilai une robe simple, épousant mes formes sans entrave, et sortis en silence. Je la vis au loin, prête à monter à cheval. Elle s’en allait, sa silhouette élancée se découpant sur l’horizon. Mon cœur s’emballa à l'idée de la suivre. Je montai à mon tour sur ma jument, guidée par l'instinct.

Au galop, je la rejoignis près d'une clairière, là où la rivière serpentait paresseusement, ses eaux scintillant sous le soleil matinal. Ailee s'était déjà installée, un carnet sur les genoux, un crayon dans la main, plongée dans un monde qui lui était propre. Je descendis de mon cheval et m’approchai d’elle, m’asseyant sur l'herbe tendre à ses côtés.

« Pourquoi viens-tu ici en secret ? » lui demandai-je, ma voix brisée par l'hésitation.

Elle leva les yeux, surprise, puis un sourire furtif éclaira son visage. « C'est mon refuge, un endroit où je peux créer sans être dérangée, loin des regards curieux. »

« Et si je te disais que je suis curieuse ? » insinui-je, une légère provocation dans la voix.

Ailee rit doucement, un son qui résonna dans l’air frais. « Alors, tu devrais savoir que certains secrets sont plus beaux lorsqu'ils demeurent cachés. »

Je me penchai en avant, captivée par la profondeur de son regard. « Mais je ne veux pas que tu restes seule. Je veux comprendre ce qui se cache derrière ce sourire, derrière ces dessins. »

Elle me scruta un instant, puis répondit d’une voix douce. « Parfois, Kenna, les secrets sont ce qui nous rend humains. Ils sont fragiles, comme la beauté de ce paysage. Ils ne demandent qu'à être appréciés, mais pas forcément révélés. »

Nous restâmes là, enveloppées dans le murmure de la rivière, mes pensées dansant autour de ses mots. Je réalisai alors que mon obsession pour Ailee ne serait pas apaisée par des réponses faciles. Au contraire, elle ne ferait que grandir, s'épanouissant dans le mystère qui l’entourait.

Je scrutai le carnet posé sur ses genoux, la curiosité me dévorant. « Qu'est-ce que tu dessines, Ailee ? » demandai-je, désireuse d’en savoir plus sur le monde qui se cachait derrière ses yeux.

Elle hésita un instant, puis leva le regard, une lueur dans ses prunelles. « C’est un paysage que j'ai imaginé, un coin de ciel que j’aimerais voir. » Sa voix, douce comme un murmure, se mêla au chant de la rivière.