Chapitre 16

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Dans l'après-midi, la pluie tambourine encore contre les fenêtres, qui donne une atmosphère disons triste et cela me rend quelque peu mélancolique. Mon esprit reste ailleurs tandis que je me prépare des tartines au chocolat. En ce moment je ne reconnais pas Seren, je le vois moins, j'ai l'impression de le perdre et rien que cette pensée pourrait me donnait l'emprise d'une crise d'angoisse.

Après la visite de monsieur Légon il est reparti travailler en bas.

Je me tourne vers lui qui remonte de la cave, les mains pleines de peinture.

- Seren, ces derniers temps... je me sens un peu seule. Tu es souvent dans la cave, et j'ai l'impression que tu m'échappes.

Seren lève les yeux, surpris par ma franchise inattendue. Il se frotte le cou, hésitant.

-Je suis désolé, Dita. J'essaie de me concentrer sur mes toiles, mais ce n'est pas une excuse.

Je me rapproche, le cœur battant plus fort.

-J'aimerais juste comprendre ce qui se passe. Tu sembles si... distant. Parfois, j'ai l'impression que tu es là physiquement, mais que tu n'es pas vraiment présent.

Il baisse les yeux, un léger sourire triste sur les lèvres.

-Ce n'est pas facile d'expliquer. Quand je peins, je me perds dans mes pensées. Mais je ne veux pas que tu penses que tu n'es pas importante pour moi.

Je secoue la tête.

-Ce n'est pas seulement ça. Je veux te voir, te sentir près de moi. La peinture est importante, mais nous le sommes tout autant.

Seren se rapproche de moi. Il pose une main sur mon épaule, cherchant mon regard plein de larmes.

-Je promets de faire des efforts. Je suis là pour toi, mais parfois, j'ai besoin de cet espace créatif. Ça ne veut pas dire que je ne t'aime pas.

Je lui rends son regard.

-Je sais que l'art est essentiel pour toi, mais je crains que ce besoin de solitude ne nous éloigne. Je veux que tu partages ça avec moi, même un peu. »

Il soupire, puis se penche vers moi pour m'embrasser tendrement.

-D'accord. Je vais essayer d'être plus présent. Mais je ne peux pas t'inviter à me rejoindre dans la cave, je te monterai quelques toiles.

Je lui souris, apaisée par ses mots, mais une part de soupçon reste ancrée en moi.

-J'aimerais ça. Mais n'oublie pas, Seren, je suis là, toujours. Ne te cache pas derrière tes toiles.

Il hoche la tête, son regard intense.

-Je te le promets. Je ne veux pas construire un mur entre nous. Mais il y a des choses que je dois encore comprendre moi-même.

Puis nous sommes restés là, enlacés.

Une ombre de doute planait toujours, une tension délicate entre l'amour et la peur de l'inconnu.

***

Alors que je continuais d'admirer ses toiles éclatantes de rouge, mon mari avait l'air stressé. Seren observait mes réactions, il avait mélange de fierté et d'angoisse quand je levais les yeux vers lui. Je me rapproche d'une toile qui m'a particulièrement saisie.

-Cette toile... elle est vraiment...intéressante. Dis-je. On dirait que chaque coup de pinceau raconte une histoire. Mais... je ne peux m'empêcher de me demander, qu'est-ce qui t'a poussé à choisir uniquement cette couleur ?

Seren déglutit, on dirait que la question la prend de haut.

-Je... je voulais capturer des émotions brutes. Il se reprend. Des sensations fortes. Le rouge représente tant de choses : la passion, la colère, même la douleur.

Je fronce légèrement les sourcils, mon regard toujours fixé sur lui.

-Mais est-ce que ça ne t'évoque pas des choses plus personnelles ? Comme si tu cherchais à exprimer quelque chose qui te tourmente ? Je sais qu'il y a certaine chose que tu ne m'as jamais dite, mais s'il t'arrive quelque chose de grave tu devrais m'en parler.

-Non, pas du tout, c'est juste de l'art. Une exploration de ce que la couleur peut transmettre.

Je ne suis pas convaincue que ce soit la réelle vérité mais je ne vais pas forcer. Je m'approche d'une autre toile, où les éclaboussures de rouge évoque, pour moi, presque une tempête.

-Seren, je sais que tu es passionné par ton travail, mais parfois, il faut aussi être honnête sur ce qu'on ressent. Si ces toiles sont le reflet de ton état d'esprit, je veux que tu me le dises.

-C'est juste une phase créative, répondit-il, une nervosité sourde dans la voix. Je ne veux pas que tu te fasses du souci pour moi.

Je soupire, presque frustrée mais aussi inquiète.

-Je ne peux pas m'empêcher de me poser des questions. Je veux te soutenir, mais il faut que tu me laisses entrer.

Mon mari détourne le regard.

J'hésite, mais je me rapproche de lui, posant une main réconfortante sur son bras.

-Si ces toiles te représentent, alors je suis là pour t'aider à comprendre ce que tu ressens vraiment. Ne t'enferme pas dans le rouge. Laisse-moi être ta lumière.

-Tout va bien pour moi mon cœur, ces toiles ne sont que l'ombre de ma créativité et d'un besoin personnel pour réussir. 

Éclaboussures écarlates Où les histoires vivent. Découvrez maintenant