Le lendemain matin je décide de faire une promenade puisqu'il fait plutôt un beau temps. Je marche, perdue dans mes pensées, quand j'entends soudain une voix derrière moi.
-Dita !
Je me retourne, surprise. C'est une silhouette familière, mais inattendue. Katerina, la voyante, se tient devant moi. Mon cœur accélère légèrement. Je n'étais pas prête à la croiser, surtout pas ici.
-Je ne pensais pas vous voir, » ai-je dit, tentant de garder un ton léger.
Elle s'approche, une intensité dans son regard.
-Je dois te parler, Dita. C'est urgent.
Sa phrase me fige sur l'instant.
-Qu'est-ce qui se passe ? ai-je demandé, déjà consciente que ce qu'elle avait à dire.
-Tu veux bien qu'on aille prendre un café pour en discuter plus posément ? » a-t-elle proposé. L'idée d'une tasse chaude me réconforte, mais la méfiance me retient Il y a quelque chose dans son attitude qui m'alerte et cela a forcément le don de me donner la chair de poule.
-D'accord, ai-je finalement cédé.
Nous nous sommes dirigées vers un petit café au coin de la rue. Katerina s'est installée en face de moi, son regard ne me lâche pas.
-Tu le sais que j'ai vu que tu allais traverser quelque chose de difficile et je n'arrête pas d'y penser, a-t-elle commencé, son ton sérieux. Il y a un danger qui te guette mais tu ne le vois pas encore à part si tu as des soupçons.
Ses mots ont résonné en moi, comme un coup de tonnerre. Sans savoir pourquoi.
-Parfois, nos blessures passées peuvent resurgir, et je sens que cela te concerne particulièrement, on dirait que quelqu'un s'en sert car tu as une part de faiblesse en toi dès que tu repenses à tout ça. Cette personne en profite et cache un lourd secret.
Un frisson m'a parcouru le dos. Les souvenirs de mon enfance se bousculaient dans ma tête.
-Pour vous faire court Katerina. J'ai été placée en famille d'accueil quand j'étais enfant, avoué-je. Ce sont ceux-là les blessures de mon passé.
Un silence chargé de compréhension s'est installé entre nous. J'ai pris une gorgée de café, puis j'ai continué.
-Mon père est parti avant ma naissance. Ma mère était souvent absente, perdue dans ses propres démons. J'ai passé des années à me sentir invisible, comme si j'étais une ombre dans ma propre maison.
Katerina écoutait attentivement. Et tes frères et sœurs ? » a-t-elle demandé doucement.
-Ils ont été placés ailleurs, on était séparés, ai-je murmuré, une douleur sourde étreignant ma poitrine. Nous étions si proches, mais ils nous ont séparés. J'ai essayé de les retrouver, mais les visites étaient rares et finalement, j'ai perdu tout contact. C'était comme si une partie de moi avait été arrachée.
-Ça a dû être tellement difficile de se reconstruire sans eux. Dit-elle avec empathie.
J'ai hoché la tête, la voix nouée.
-Chaque famille d'accueil était une nouvelle tentative de trouver un foyer, mais aucune n'était vraiment... chaleureuse avec moi. Je me suis souvent sentie comme une étrangère. Parfois, je me demandais si j'étais vraiment aimée. Jusqu'à ce que je tombe sur Seren qui m'a fait oublier toutes ces mauvaises sensations que la vie m'a infligée.
Katerina a pris ma main.
-Tu as survécu à tout cela, Dita. Mais le danger dont je parle, il ne vient pas seulement de ton passé. Il est là, prêt à frapper à nouveau. Mais il est différent de tout cela.
La vie m'avait appris à rester forte mais cette phrase me fait tomber au plus bas.
-Je ferai attention, ai-je murmuré.
Dans ce café, assise face à Katerina, je comprends que cette rencontre n'est pas un simple hasard. Elle m'ouvre les yeux sur des vérités que je ne peux plus ignorer. Parler de mon passé, c'est comme déterrer des morceaux de moi que je croyais avoir soigneusement enterrés.
-Pourquoi est-ce si difficile ? ai-je murmuré, ma voix à peine audible. Katerina, attentive, a simplement incliné la tête.
-Tu dois affronter tes peurs, m'a rappelé Katerina, ses yeux plongeant dans les miens.
Je sentais que quelque chose en moi commençait à se fissurer. La colère, la tristesse, et la peur se mélangeaient en une bouillie d'émotions. À cet instant, je comprenais que le danger dont elle parlait ne provenait pas seulement d'un événement externe, mais aussi de cette partie de moi qui restait prisonnière des souvenirs qui m'empêche de voir le mal ou de le percevoir autour de moi, mes douleurs passées me rendent aveugles.
J'ai besoin d'écrire.
-J'ai besoin de temps, ai-je fini par dire. Mais je n'arrive qu'à vous croire.
Katerina a souri.
-C'estdéjà un pas important, Dita. L'important est d'être prête à ouvrir la porte,même si elle semble lourde. Pour pouvoir voir ce qu'il s'y cache derrière.
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Éclaboussures écarlates
Gizem / GerilimDita est une femme connue dans le monde de l'écriture. Depuis son adolescence elle connaît Seren, son mari, peintre. Lui, n'a pas de succès, alors il ne cesse de désespérer jusqu'à connaître la popularité dans son milieu. Un jour, il décide d'adopte...