New York - Coup de pouce

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Dans un autre registre que le chapitre précédent...  (Si vous souhaitez une analyse d'un de vos écrits semblable à celle ci, contactez moi ici ou sur mon Babillard !)

Analyse de Coup de Pouce (one shot, science fiction) de @Etircomed

Bien qu'il s'agisse d'un One Shot, j'en analyserai le début, pour des questions de suspense, de "New York" à "ne perdons pas trop de temps". 

Il s'agit, d'après les dires de l'auteur, d'une "petite nouvelle sans prétention", qui traite de la technologie, et de sa domination sur l'être humain, "avec légèreté". L'histoire se déroule à New York, en avril 2034, ce qui en fait une nouvelle d'anticipation (cela se déroulera dans dix ans, car nous sommes en 2024, mais l'auteur l'a écrite en 2019, époque où Chat-GPT n'était pas encore grand public (il l'est devenu en 2022 et, pour l'anecdote, il m'a un peu aidée à apprendre l'italien). Chat-GPT, l'agent conversationnel qui réalise des devoirs d'étudiants. Sauf que le personnage de Dimitri n'est pas étudiant, mais occupe un poste à l'ONU, quoi qu'il doive rédiger un discours. Le "coup de pouce" du titre est donc celui de la technologie, à un détail près que l'expression désigne une légère aide. Chantal, la compagne de Dimitri, joue le rôle du proche lucide mais extérieur à la situation. 

Humour et crédibilité 

Stylistiquement, l'écrit est assez simple, phrase courtes, temps présent, j'aurais peut être mis davantage de virgules mais je ne suis pas l'auteur, et puis, cela sied bien au rythme rapide et à la légèreté voulue par l'auteur. A mon sens, ce sont les réactions des personnages (ex. évocation de Cro Magnon, surnom de Jules César "jules", ils me prennent pour un livreur de pizza... ?) et ce rythme rapide qui rendent la nouvelle de SF crédible. Parce qu'au fond, j'en profite pour dire que la SF ne sert pas forcément à tenter de prédire le futur, ce n'est pas un service à rendre au genre (j'ai écrit la même phrase dans mon livre "d'encre et de pixels", d'ailleurs, sur ce genre littéraire). Au fond, la crédibilité est plus importante que le réalisme. 

Le rôle de l'humour, outre faire passer la pilule pour dédramatiser et ainsi permettre le dialogue, est donc d'incarner un peu les personnages, de rendre le tout moins solennel et ainsi de donner du relief. Les personnages nous ressemblent, le mari qui mange un sandwich à la va vite pour terminer son travail. Je dirais même que toutes ses notifs, même si l'ordinateur ne charrierait pas dans notre monde, font terriblement écho à aujourd'hui, lorsque les cadres ou les employés de bureau sont sans cesse sollicités. Ici, l'homme est sûrement cadre, il travaille hors de ses heures, comme s'il n'y avait pas de frontière entre vie privée et vie professionnelle. Comme cela se déroule à New York, je vais éviter d'orienter l'analyse sur le droit  du travail (français) mais le droit à la déconnexion est désormais un thème de négociation pour les conventions collectives, preuve que le sujet préoccupe. 

Le dialogue avec l'ordinateur, très direct et forme de dialogue "intérieur", a aussi une fonction narrative, et, il faut le dire, est amusant à lire. Possédant moins de clefs en science fiction qu'en littérature "blanche", je ne saurais dire à quel point ce type de dialogue est courant.  Il s'agira ensuite d'assistants personnels, d'abord décrits "scientifiquement" (c'est à cela qu'on reconnaît la SF : la présence d'explications se voulant scientifiquement crédible, même si le délire est plus ou moins poussé selon qu'on soit en Hard ou non). L'ordinateur est quantique (mon frère connaît un peu l'informatique quantique et aimerait éventuellement approfondir), et, autre preuve d'humour décalé, la voix qui le présente est celle d'un "bateleur de foire", ce qui sonne un peu médiéval, sauf que l'on vend un ordinateur, qu'il recevra en 4 minutes et 50 secondes. 

Un monde "immédiat" 

Dans ce monde, que l'on observe à partir de la soirée de travail de Dimitri, tout semble pratique, rapide, immédiat, ce qui est souvent associé à la modernité. Si je prends ma philosophie classique, immédiat se réfère à quelque chose sans médiation. A l'inverse, imaginons une séance de spiritisme : je parlerai aux esprits à travers un "médium", un intermédiaire. Ici, la livraison est immédiate, le pc est pratique, il remplace l'homme dans les tâches quotidiennes, parle des centaines de langues (alors, certes, on est loin de C3PO même si ce n'est pas comparable, car le monde de Star Wars est complètement fantaisiste et que Star Wars se classe parfois en fantasy - notamment par l'absence d'explication scientifique). On est bien au delà du "coup de pouce" promis. 

Et puis, il est un peu espiègle. A son apparition, il change sans cesse de déguisement, et cette séance pleine de métamorphose (que l'on trouve dans Merlin l'Enchanteur de Disney, ou plus récemment dans Vaïana avec les transformations de Maui) évoque un dessin animé. On se croirait face à quelqu'un qui découvre un jeu en ligne où il faut déguiser son personnage, ou bien qui découvre Power Point et utilise toutes les transitions possibles même si c'est too much. On a un peu cet effet de too much, notamment avec le sexe faible, la sorcière au chaudron, on se demande quand il arrêtera pour rentrer dans le vif du sujet, mais au fond on est ravi, parce que c'est assez drôle. 

Sauf que la tâche de Dimitri, elle, demande un effort, beaucoup de pages à lire, une synthèse à effectuer, des objectifs de conviction d'un public, et ce, pour l'ONU. La conversation téléphonique du début, dont on entend les bribes de Dimitri, et la conclusion du couple (il se laisse faire), et le point de départ de cette tâche colossale. Sans prendre (pas du tout) un ton réactionnaire, sur l'effort, la nouvelle montre ainsi une forme de contraste, avec un travail à expédier. Au lieu de tenter, Dimitri choisit la solution "de facilité", à condition d'en avoir les moyens : s'acheter un nouvel ordinateur quantique. Il faut dire que le texte est très bavard, loin des phrases concises décrivant l'ordinateur. Les paroles de Dimitri, "ne perdons pas de temps", recadrent et renvoient à cet état d'esprit : il faut être synthétique. Cela m'évoque les épreuves de contraction de textes pour certaines écoles de commerce, que pour ma part je n'ai jamais faites.

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Dans cette nouvelle, ce qui est synthétique et efficace, c'est aussi l'écriture. La forme privilégiée est le dialogue : au fond,  cela pourrait presque être une pièce de théâtre (je jouerais bien un ordinateur !). Au théâtre, il y a de brefs échanges de répliques, les stichomythies : je les surnomme "effet ping pong". A mon sens, le futur présenté ici est une forme de présent étendu, de présent hyperbolique, ce qui est cohérent avec le temps présenté (dix ans après). 

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Du même auteur, j'ai apprécié "couleurs", quand on aime la "psychologie de comptoir" comme il le dit lui même. 




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