Je m'avance dans les paddocks d’Haas avec ce sourire de façade, celui qui trompe tout le monde. Ma routine est bien rodée : je serre quelques mains, plaisante avec les ingénieurs, et m’occupe des interviews comme si de rien n’était. J’ai une réputation à maintenir, après tout. Kevin Magnussen est dans le coin opposé, plongé dans des discussions sérieuses avec son équipe, mais je sens déjà son regard peser sur moi.On se déteste, Kevin et moi. Depuis des années, c’est un jeu de provocations et de mépris, de regards glacés et de coups bas. Pourtant, il y a cette contradiction, cette chose étrange et incompréhensible qui se passe dans les ombres, quand personne ne nous voit.
On s’embrasse comme si c’était inévitable. Ce n’est même pas une question de désir ou de choix, c’est presque comme un besoin. Juste des moments volés, rapides, quand on est certains d’être invisibles. Je le déteste pour ça.
Les essais se passent dans une tension constante, avec chaque tour de piste comme une course l’un contre l’autre autant qu’une collaboration. On est dans la même écurie, mais on a toujours cette envie de prouver qu’on est meilleur, l’un comme l’autre. À la fin de la séance, alors que je sors de la voiture, Kevin arrive avec ce sourire arrogant qui me donne envie de serrer les poings.
- Pas trop mal pour un vieux, Hulkenberg.
Je lui lance un regard noir, et sans réfléchir, je réponds :
- Fais gaffe, Magnussen. La roue tourne, même pour toi.
Il rigole, me provoque, et je finis par lui donner une tape sur l’épaule, d’une force mesurée, mais presque familière. C’est la proximité du moment qui me perturbe. Quelques minutes plus tard, on se retrouve seuls dans une pièce vide, juste le temps d’un geste brusque, d’un baiser interdit. Et comme d’habitude, après ces quelques secondes d'oubli, je me redresse et le pousse en arrière, comme pour effacer ce qu’on vient de faire.
Je rentre chez moi, retrouve ma femme et ma fille de trois ans. Dès que je tiens ma fille dans les bras, tout semble reprendre un sens, tout devient plus simple, plus vrai. Elle babille des mots maladroits et m’offre ces petits sourires innocents. Avec elle, les tensions de la journée s’effacent un peu, et je me dis que c’est pour elle que je fais tout ça. Que c’est pour elle que je supporte la pression, les courses, les rivaux... Kevin.
Pourtant, l’ombre de ce qui se passe avec ce gars reste là, au fond de mon esprit, me ronge. Ma femme, qui est attentive, me lance parfois des regards inquiets, se demandant ce qui me rend si distant. Elle ne saura jamais, bien sûr. C’est inconcevable, impensable, inimaginable de lui avouer que mon pire ennemi est aussi celui avec qui je me perds le plus.
Kevin a lui aussi une famille, deux filles. Je le vois parfois avec elles, dans ces instants où il baisse la garde, où il est simplement un père, comme moi. On se ressemble peut-être plus qu’on ne voudrait l’admettre. Mais chaque fois que je le vois jouer avec sa fille cadette ou consoler la plus grande, mon cœur se serre. Parce que je sais que lui aussi, quand il rentre chez lui, il laisse ce secret entre nous dans un coin sombre de son esprit.
On est à Silverstone pour la course, et la nuit est tombée depuis longtemps. Je sors de la douche de la driver room, pensant être seul, mais Kevin est là, à l’entrée. Je fais comme si je ne l’avais pas vu, passe à côté de lui sans un mot. Pourtant, il me rattrape, et avant même que je comprenne ce qui se passe, il m’embrasse dans ce couloir sombre, ses mains glissant sur ma nuque. Ce baiser est plus long que d’habitude, presque désespéré, et je sens qu’il y a quelque chose de différent, une sorte de tristesse que je n’avais jamais perçue chez lui avant.
Quand il s’écarte, ses yeux ont ce reflet d’amertume.
- On n’est rien d’autre que des idiots, tu le sais, Nico ? murmure-t-il.
Je le regarde, et pour la première fois, je ressens autre chose que de la colère. Quelque chose d’indéfinissable, peut-être de la compassion. Parce que je sais que cette situation, ces baisers volés, ces moments qu’on ne peut ni comprendre ni arrêter, ça le ronge autant que moi.
Les semaines passent, et la tension monte. Je me sens de plus en plus coupable, de plus en plus perdu, à jongler entre ces deux vies, entre ces deux réalités qui n’ont aucun sens ensemble. Un jour, après une course où Kevin et moi nous sommes battus pour une place au classement, j’ai cette confrontation inévitable.
Je me retrouve seul avec lui dans le paddock, les lumières éteintes, les mécaniciens partis, et il me dit, avec un air résolu :
- On doit arrêter, Nico.
Je sais qu’il a raison, mais mon cœur se serre. On a toujours dit qu’on se détestait, mais au fond, je crois qu’on ne se déteste pas autant qu’on se déteste soi-même pour ce qu’on fait.
Les jours passent, puis des semaines, et Kevin et moi évitons soigneusement d’être seuls. On reste dans nos rôles respectifs, les rivaux, les collègues, les pères de famille. On se croise, on se regarde de loin, et il y a toujours ce silence lourd qui flotte entre nous.
Ma fille me demande souvent pourquoi je suis si pensif, pourquoi je souris moins. Elle est trop jeune pour comprendre, et je ne sais pas comment lui expliquer que parfois, même les adultes ne savent pas gérer ce qu’ils ressentent.
Un soir, alors que je la berse, je réalise à quel point je tiens à ma famille, à cette vie stable, à cet équilibre qui me donne une raison de continuer. Pourtant, l’ombre de Kevin reste là, une ombre que je n’arrive pas à chasser.
Un jour, lors d’une course décisive, on est côte à côte sur la piste, Kevin et moi. Les virages se succèdent, les dépassements s’enchaînent, et pour la première fois, on roule comme si on ne formait plus qu’un. C’est comme si, l’espace de quelques tours, on oubliait tout, nos querelles, notre haine, nos secrets. Juste nous, nos voitures, et cette passion qui nous consume.
À la fin, je nous finissons tout deux dans les poids, il est à côté de moi. On se regarde, sans dire un mot, mais je sais qu’il a compris. C’est notre adieu silencieux, notre pacte secret. Une façon de dire que, malgré tout ce qu’on a partagé, il est temps de tourner la page.
On continue de se croiser, dans le paddock, sur les circuits, dans les événements. Nos regards se rencontrent parfois, et il y a toujours cette tristesse sous-jacente, ce regret. Mais on sait tous les deux qu’il est trop tard pour changer les choses. Nos vies ont pris des chemins différents, et ce qui était entre nous restera dans l’ombre, un souvenir que personne ne connaîtra.
Et à chaque sourire de ma fille, à chaque moment passé avec elle, je trouve un peu de réconfort. Parce qu’au fond, je sais que certaines choses, même si elles nous hantent, doivent rester là où elles sont : dans le passé, et à jamais cachées.
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OS F1 (multiship)
FanfikceSalut salut ! Je fais ces os car je voulais écrire quelque chose d'un peu différent de d'habitude (ne jugé pas les ship, certains sont tirés au hasard 😅) Voilà voilà ! Si vous tenez à lire alors bonne lecture !