RAD ( SF, Romance, IA, futur)

Les murmures des vents

Le soleil de LuxenValis baignait l'île flottante d'une lumière douce, presque irréelle. Après leur épreuve au lac, Rad, Kael, Oris, Ira, et Nimbus prenaient un moment pour se reposer dans un village niché entre des collines verdoyantes. Les maisons, bâties à même les arbres, semblaient respirer avec la forêt elle-même, et des ponts suspendus en lianes reliaient chaque habitation comme une toile délicate.

Rad s'était assise sur un banc de pierre recouvert de mousse, contemplant le fragment de Luxem posé dans les pattes d'Oris. Le renard mécanique le tenait fièrement, sa lueur dorée réfléchissant dans ses yeux artificiels.

— "Alors, maintenant, je suis une relique vivante ?" plaisanta-t-il en levant une patte dramatique.

Kael, adossé contre un arbre, sourit en coin.
— "Une relique peut-être, mais vivante, ça reste à débattre."

Rad ne répondit pas. Elle observait le fragment, toujours fascinée par sa lumière. Pourtant, son esprit était ailleurs. Quelque chose dans l'air de LuxenValis lui semblait... perturbé, comme un murmure lointain qu'elle ne parvenait pas à saisir.

Nimbus, couché nonchalamment sur une branche basse, rompit le silence.
— "Vous ne pouvez pas rester ici éternellement. LuxenValis est un refuge, mais le monde d'en bas continue de s'effondrer."

Rad leva les yeux vers lui.
— "Et si nous échouons ? Si nous trouvons tous les fragments mais que cela ne suffit pas ?"

Nimbus, un sourire félin sur les lèvres, répondit calmement :
— "L'échec n'est qu'un autre chemin vers la vérité. Mais ce que vous choisissez de faire avec vos erreurs... voilà où réside votre véritable pouvoir."

Alors que le groupe se préparait à quitter LuxenValis, une réunion inhabituelle dans le village attira leur attention. Les habitants se rassemblaient autour d'un grand feu central, où un aigle majestueux portant un collier scintillant prenait la parole. Sa voix était grave, solennelle, et semblait porter un poids ancien.

— "Des rumeurs montent des profondeurs de Tervaniss," déclara l'aigle. "Les opprimés commencent à se soulever. Une rébellion se forme contre les IA qui contrôlent la ville. Mais leur colère est aveugle, et ils risquent d'être écrasés avant même de comprendre ce qu'ils affrontent."

Le cœur de Rad se serra. Les souvenirs de leur fuite de Tervaniss étaient encore frais dans son esprit. Les rues étouffantes, les drones omniprésents, les visages fatigués de ceux qui n'avaient jamais connu la liberté. Une rébellion était peut-être inévitable, mais si elle échouait, les conséquences seraient terribles.

Kael s'approcha du feu, croisant les bras.
— "Ils ne savent pas ce qu'ils font. Une rébellion contre ces machines... c'est du suicide."

L'aigle tourna son regard perçant vers lui.
— "Et pourtant, ils agissent. Parfois, ce n'est pas le résultat qui importe, mais le cri de défi."

Rad, les poings serrés, intervint :
— "Nous devons y retourner. S'ils échouent, Tervaniss sombrera encore plus profondément dans la peur. Peut-être que nous pouvons les aider, leur donner une chance."

Nimbus, sautant de sa branche, s'approcha du groupe.
— "Très bien. Mais avant de partir, il y a quelque chose que vous devez voir. Suivez-moi."

Guidés par Nimbus, le groupe quitta les sentiers du village pour s'aventurer dans une forêt plus dense, où la lumière du soleil peinait à pénétrer. L'atmosphère changeait à mesure qu'ils avançaient, devenant plus lourde, presque mystique. Les arbres eux-mêmes semblaient se recourber, leurs branches formant des arches naturelles au-dessus de leurs têtes.

— "Où est-ce que tu nous emmènes ?" demanda Kael, jetant un regard méfiant autour de lui.

Nimbus, sa voix étrangement sérieuse, répondit :
— "À la Porte des Mondes. Un endroit que peu connaissent, même ici. C'est un lieu ancien, un pont entre les réalités."

Rad sentit un frisson lui parcourir l'échine.
— "Un pont entre les réalités ?"

— "Des mondes multiples coexistent," expliqua Ira pour la première fois depuis longtemps. "Certains sont proches du nôtre, d'autres infiniment éloignés. Une porte pourrait offrir une échappatoire... ou un péril encore plus grand."

Après une marche qui sembla durer une éternité, ils débouchèrent sur une clairière entourée de pierres levées couvertes de glyphes. Au centre, un immense anneau d'un métal inconnu se dressait, légèrement incliné, flottant au-dessus du sol sans le moindre support visible. L'anneau pulsait d'une lumière éthérée, changeant doucement de couleur.

Oris, les yeux écarquillés, murmura :
— "C'est... magnifique."

Nimbus s'approcha de l'anneau et posa une patte sur une pierre gravée.
— "Cette porte est l'un des plus grands secrets de LuxenValis. Elle permet de voyager, mais seulement à ceux qui en comprennent le coût. Ce n'est pas une fuite. C'est une responsabilité."

Kael se tourna vers Rad.
— "On pourrait l'utiliser. Aller quelque part où les fragments seraient en sécurité, loin de ces IA."

Rad secoua la tête.
— "Ce n'est pas la solution. Nous ne pouvons pas fuir nos responsabilités. Tervaniss a besoin de nous, et les fragments doivent rester ici."

Nimbus hocha lentement la tête, satisfait.
— "Une décision sage. Mais souvenez-vous de cet endroit. La Porte des Mondes pourrait un jour devenir votre salut... ou votre perte."

Alors qu'ils retournaient au village pour préparer leur départ, les pensées de Rad tourbillonnaient. Les fragments, la rébellion, la Porte des Mondes... tout semblait se resserrer autour d'eux comme un filet invisible. Pourtant, au fond d'elle, une étincelle d'espoir persistait. Ils n'étaient pas seuls. Cette équipe improbable, faite de guerriers, d'un renard mécanique, et d'un chat philosophe, pouvait peut-être accomplir l'impossible.

Avant de quitter LuxenValis, Nimbus s'arrêta devant eux.
— "Quand vous retournerez à Tervaniss, ne sous-estimez pas le pouvoir des rumeurs. Elles sont comme le vent : invisibles mais capables de faire basculer des montagnes. Utilisez-les avec sagesse."

Avec un dernier regard vers l'île suspendue, Rad inspira profondément. Elle savait que leur prochaine étape les rapprocherait du danger... et de la vérité.