Entre Deux Feu

28.

Pdv Clémence

Le week-end touchait à sa fin, et malgré l’urgence de préparer les examens de français pour ses classes, Clémence n’arrivait pas à se concentrer. Ses pensées revenaient toujours à Milia : ses regards, son comportement étrange au brunch, et surtout cette envie qu’elle avait réprimée de l’embrasser lorsqu’elles s’étaient retrouvées seules à l’extérieur.

L’apparition de Marine à ses côtés au brunch ajoutait une couche supplémentaire à son trouble. Pourquoi étaient-elles arrivées ensemble ? Qu’est-ce que ça signifiait ?

Lucas et Juline, ses amis de toujours, voyaient bien son malaise. Elle les entendait murmurer à son sujet, mais elle se fermait à eux. Pourtant, ce fut Lucas, incapable de rester à l’écart, qui entra dans son bureau un soir.

— Ce n’est plus possible de te voir comme ça, déclara-t-il d’un ton ferme. Je t’emmène boire un coup. Tu as besoin de te détendre.

Elle tenta de protester, mais il ne lui en laissa pas le choix. Juline, complice dans cette entreprise, aida Clémence à se préparer. Vêtue d’un tailleur noir classique et d’un jean, ses cheveux relevés en un chignon impeccable, elle avait une allure élégante mais décontractée. Malgré tout, elle se sentait nerveuse.

Arrivés au bar, Clémence sentit immédiatement son cœur s’emballer en voyant Milia derrière le comptoir. Elle servait des boissons avec assurance, mais son visage trahissait une certaine gêne en apercevant le trio.

— Qu’est-ce qu’elle fait ici ? demanda Clémence à Lucas, à la fois surprise et troublée.

Lucas haussa les épaules.

— Aucune idée. Peut-être la nouvelle employée ?

Clémence sentit l’envie de repartir monter en elle, mais Juline la retint fermement par le bras.

— Reste, ça va bien se passer, dit-elle doucement.

À contrecœur, Clémence s’assit avec eux à une table près du comptoir.

Pdv Milia

Milia sentit son estomac se nouer en voyant Madame Mahieur entrer avec ses amis. Elle détourna les yeux, priant pour que quelqu’un d’autre s’occupe de leur table.

— Sarah, tu peux prendre cette commande ? demanda-t-elle à sa collègue.

— Désolée, je suis débordée, répondit Sarah, l’air blasé.

Milia soupira et, résignée, se dirigea vers leur table. Son cœur battait à tout rompre alors qu’elle sortait son carnet de commandes.

Lucas commanda un mojito, Juline un Captain Morgan, et quand vint le tour de Clémence, celle-ci demanda la boisson la plus alcoolisée de la carte.

— Ça va pas te tuer, lâcha Lucas à Clémence avec un sourire. Elle bosse bien, regarde.

Milia entendit le rire léger de Lucas et de Juline après une réponse qu’elle ne capta pas, mais elle sentit leurs regards insistants sur elle, ce qui la mit encore plus mal à l’aise. Elle posa les verres sur leur table et s’éclipsa rapidement pour prendre sa pause.

Milia sortit par la porte arrière du bar, allumant une cigarette pour calmer ses nerfs. La nuit était fraîche, mais elle préférait être dehors qu’affronter les regards à l’intérieur.

— Il me semblait que ton amie t’avait dit d’arrêter de fumer, fit une voix derrière elle.

Milia sursauta et se retourna pour voir Madame Mahieur, les bras croisés, son regard fixé sur elle avec une pointe de défi.

— Et il me semblait que vous n’étiez pas là pour me surveiller, répondit-elle, sur la défensive.

Clémence esquissa un sourire en coin, visiblement amusée par sa réponse.

— Tu aimes provoquer, n’est-ce pas ? lança-t-elle doucement.

Milia sentit la colère monter en elle, mais elle savait que répondre avec agressivité ne ferait qu’aggraver les choses.

— Peut-être, rétorqua-t-elle, soufflant la fumée de sa cigarette avec désinvolture.

Leur échange continua ainsi, des piques subtiles échangées dans la pénombre. Mais soudain, Clémence s’arrêta de parler. Son expression changea, passant d’amusée à quelque chose de plus intense.

Milia sentit le regard de sa prof descendre jusqu’à ses lèvres avant de remonter à ses yeux. Un frisson la traversa. Elle savait qu’il y avait quelque chose dans l’air, une tension qu’elle ne pouvait plus nier.

Elles se rapprochèrent, lentement, comme aimantées. Leurs visages étaient si près que leurs souffles se mêlaient. Milia pouvait presque sentir la douceur des lèvres de Clémence frôler les siennes.

Mais une voix brisa l’instant.

— Milia, on a besoin de toi au comptoir !

Milia recula brusquement, son cœur battant la chamade. Elle vit Clémence s’écarter à contrecœur, une lueur de frustration dans les yeux.

— On n’en a pas fini, souffla Clémence avant de retourner à l’intérieur.

Le reste de la soirée se déroula comme dans un brouillard pour Milia. Elle évita soigneusement la table de Clémence et se concentra sur son travail. Quand le bar ferma, elle rentra directement chez elle, mais le sommeil ne vint pas.

Allongée sur son lit, elle revivait chaque instant de cette soirée, surtout le moment où elles avaient failli s’embrasser. Elle se demandait ce qui se serait passé si elles n’avaient pas été interrompues.

Clémence occupait désormais toutes ses pensées, et cela la terrifiait autant que ça la captivait.

-----

À suivre....