Chapitre quatre

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« Yvan Bakounine a écrit : "Le besoin de détruire est également un besoin de créer." Je crois que j'ai besoin de me détruire pour pouvoir me recréer. Toucher le fond pour pouvoir remonter. J'ai le sentiment de tomber sans jamais m'écraser. Une chute sans fin. Je ne veux plus tomber, je veux remonter. » - Harry

Il est 23 heures. Ce soir non plus, je n'arrive pas à dormir. Comme hier et avant-hier. Je suis assis à mon bureau devant mon ordinateur, je fixe le mail que je viens de lui envoyer.

✉ 20.

Je sais qu'il ne me répondra pas. Deux jours que je ne l'ai pas vu. Deux jours qu'il me laisse sans nouvelle, encore une fois comme à chaque fois qu'on dort ensemble et qu'il se tire dans la nuit. Sauf que cette fois-ci, quand je me suis réveillé seul dans son lit, je n'ai pas fait comme la dernière fois. Je ne suis pas parti directement. Je crois que j'aurais dû finalement, ça aurait été mieux car depuis je ne peux plus dormir. En me réveillant, j'avais besoin d'aller aux toilettes et... et j'ai fouillé dans sa salle de bain. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris car ce n'est pas mon genre de faire ça, de violer l'intimité des gens comme ça, mais ça a été plus fort que moi. Je n'avais pas de mauvaises intentions. Je voulais seulement regarder dans les placards, voir ce qu'il utilisait comme produits. Ce genre de choses, rien de plus, rien de mal. J'étais seulement curieux. Je n'aurais jamais dû. En même temps, jamais je n'aurais pu imaginer tomber sur ce genre de choses. Sur ça. Les placards comportaient des serviettes, des gants, plein de produits de marque. Enfin tout ce qu'on trouve généralement dans une salle de bain, puis il y a eu l'autre placard. Le placard. Celui que je regrette d'avoir ouvert. La première étagère était remplie de produits féminins. Brosse à cheveux, peigne, maquillages, produits de beauté, etc. Enfin la parfaite panoplie de la fille de base. Je suppose que tout ça appartenait à Samantha et qu'il n'a pas eu le courage de s'en débarrasser ou peut-être qu'il a envie ou besoin de garder ses affaires. Je comprends et ça n'a pas d'importance. Non. C'est ce que j'ai trouvé ensuite qui me... je... ce...

Putain mais merde, l'étagère était remplie de médicaments en tout genre et surtout, le pire de tout c'est... J'ai l'impression que je vais vomir tellement la boule que j'ai dans le ventre me fait mal. Les lames, bon sang. Il y avait des lames de rasoirs et une dizaine de scalpels médicaux encore dans leurs emballages stériles pour certains. Et le sang... Les gouttes de sang sec sur le métal et qui tachaient la blanc de l'étagère. Putain. Est-ce qu'il... Oui. J'ai essayé de me voiler la face pendant deux jours mais ça ne sert à rien. Il ne faut pas être con pour comprendre. Je... je n'arrive pas à l'accepter. Comment j'ai pu ne rien voir ? Où ? Les bras ? Les poignets ? Putain j'en sais rien et ça me rend dingue. Deux jours que je revois ses bras dans ma tête, que je cherche les marques dans mon esprit. Parce que c'est là non ? C'est aux poignets que les gens font ça en général non ? Je sais qu'il a des bracelets et des tatouages mais je n'ai... je n'ai pas vu de coupures ni de... enfin je n'ai rien vu. Son corps ? C'est peut-être pour ça qu'il n'a pas voulu se changer devant moi. Putain je ne veux plus y penser. C'est trop... Je ne sais pas. C'est trop, juste trop. Je ne veux pas imaginer qu'il puisse se faire ça. Je ne peux pas. J'ai mal pour lui. Je l'imagine le faire et... STOP. Putain je ne peux pas. Je crois que je vais vomir.

Je n'ai toujours pas quitté mon écran des yeux, comme si une réponse de sa part pouvait arriver à tout moment. C'est beau l'espoir. Je crois que je suis en colère après lui. Pas parce qu'il est parti une fois de plus, non. Ça, j'ai compris qu'il ne le faisait pas volontairement et que ça lui faisait sûrement plus de mal à lui qu'à moi. Non, je crois que je suis en colère après lui car... des scalpels, nom d'un chien. Il détruit son corps aux scalpels. Des scalpels, bordel. Pourquoi ? Pourquoi il fait ça ? Il n'a pas le droit de faire ça, putain. Est-ce qu'il va aussi mal que ça, pour faire ça ? Non. Il ne peut pas. Il ne peut pas faire ça.

DEGRADATION Tome IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant