Chapitre 13

10.5K 729 25
                                    

— Dis-donc, c'était chaud, me souffle Céline en me donnant un coup de hanche. J'en connais beaucoup qui aurait aimé être à ta place. Moi, la première.

Je suis toujours furieuse et sa réflexion m'irrite encore un peu plus. J'ai besoin de me calmer et j'attrape un verre à ma cartouchière tout en jetant un œil au bar. Éric nous interdit formellement de boire de l'alcool pendant le boulot. Sauf que là, j'en ai besoin.

— Cas de force majeure ? me demande-t-elle en jetant un regard circulaire. C'est bon personne ne nous regarde.

— Tu n'as pas idée, dis-je après avoir bu. Mais je suis toute disposée à te laisser ce côté de la salle et à prendre le tien.

— T'es sûre ? demande-t-elle les yeux ronds.

— Certaine, et profites-en bien.

Je plaque un sourire sur mon visage et me dirige vers son carré de tables. L'avantage avec ce boulot c'est qu'il n'exige pas une grande concentration et je peux ainsi réfléchir.

Point numéro 1 : ce type est le roi des connards au pays des emmerdeurs !

Point numéro 2 : il m'a achetée ! J'ai beau retourné ça dans tous les sens...

Point numéro 3 : mon corps a été envoûté, possédé... a subi une pulsion incontrôlable et totalement indépendante de ma volonté ! TOTALEMENT !

Point numéro 4 : je ne vais pas me laisser pourrir la vie par ma fabrique d'hormones femelles !

Point numéro 5 : il pense avoir acheté un chien qui obéit à son maître, une esclave qui se soumet au doigt et à l'œil ? Je ne suis ni l'un, ni l'autre ! Monsieur va vite se rendre compte que son investissement à haut risque est à... très haut risque !

Soudain, je me sens de meilleure humeur.

Du coin de l'œil, j'aperçois Céline qui se place entre les jambes d'Aïdan pour un « Baiser de la Mort ». Lancaster quant à lui ne me quitte pas du regard, même de loin. Je continue mon travail sur le qui-vive en m'attendant à le voir débarquer. Mais il reste à sa table et quelques minutes plus tard, je vois Céline déposer une bière devant lui. Il est presque minuit, et le groupe ne va pas tarder à faire un petit break. Enfin, j'entends la cloche, signal qui m'indique que je peux rejoindre les vestiaires pour une pause de cinq minutes. Je dépose mon sac de téquila et la recette au bar sous l'air étonné, et comblé, d'Éric.

— Angie, fais-moi des recettes comme ça tous les week-ends et je t'épouse, s'exclame-t-il en rangeant l'argent dans la caisse. Ça mérite bien dix minutes de plus pour ta pause.

— Génial ! Mes pieds t'en sont infiniment reconnaissants.

— Pour ce qui est de l'épouser, ce n'est malheureusement plus d'actualité, annonce une voix grave. Je me présente Geoffrey Lancaster, le futur époux.

Il se place derrière moi, tend une main à mon Boss, de l'autre enlace ma taille puis dépose un baiser sur mes cheveux. Je me retrouve ainsi coincée entre lui et le bar. Je lui fracasserais volontiers une bouteille sur le crâne. Mais je me contente d'étouffer un cri de rage et de serrer les poings... tout en m'évertuant à écraser l'insurrection de mes hormones femelles en folie...

— Je plaisantais, répond Éric en lui serrant amicalement la main et en lui montrant son alliance au passage. Angie ne m'avait pas annoncé la bonne nouvelle. Toutes mes félicitations à vous deux !

— Je lui ai fait ma demande aujourd'hui. Elle est encore sous le choc et se demande si ce n'est pas un rêve, n'est-ce pas, Barbie ?

— Barbie ?!

Éric me regarde avec une énorme envie de pouffer de rire. Respire Angeline...

— Qui a dit que les hommes n'étaient pas romantiques ?

— Et vous avez déjà fixé une date pour le mariage ?

Je me crispe, et avant même de pouvoir ouvrir la bouche, Lancaster répond :

— Oui, dans deux mois. À ce sujet, avec tous les préparatifs, et en si peu de temps, Angeline et moi, avions pensé que ce soir serait sa dernière nuit de travail, lance-t-il sûr de lui et avec un sourire complice à Éric. Je sais que c'est rapide et soudain. Alors, si vous avez la moindre difficulté à trouver une remplaçante, n'hésitez pas à m'appeler.

Il sort une carte de visite qu'il donne à Éric. J'avais l'intention de donner ma démission, mais qu'il en prenne l'initiative, seul, et sans même me consulter, me met hors de moi. En plus, il fout tous mes plans en l'air. Moi qui pensais pouvoir me servir de mon boulot pour éviter de le voir trop souvent jusqu'au mariage, c'est raté.

C'est sûr. JE. VAIS. LE. TUER !

— Je peux très bien me charger de l'organisation du mariage et continuer à travailler, dis-je en fronçant les sourcils. Le temps de te laisser te retourner Éric.

La pression sur ma taille s'intensifie fortement, mais je continue sur ma lancée :

— Et puis, ça ne me dérange pas du tout...

— Angie, tu n'imagines pas la charge de boulot et surtout de pression que représente un mariage, m'interrompt Éric. Et je suis bien placé pour le savoir. J'ai cru que j'allais devenir fou pour le mien, et franchement, Sandrine n'était pas loin de craquer, elle aussi. Ce sera mon cadeau de mariage, en quelque sorte. N'ai aucun souci pour moi, ta place ne restera pas libre plus d'une journée.

— Je vous dois une fière chandelle. Je me voyais mal me charger de tout... tout seul. Et j'apprécie à sa juste valeur votre cadeau de mariage.

— Ne me remerciez pas. Ce serait stupide d'engager quelqu'un pour organiser votre mariage si vous pouvez vous en charger tous les deux...

Le pauvre s'il savait. Comme si Lancaster allait s'occuper lui-même de ce mariage.

— On ne se rend pas compte des dépenses que ça entraîne, continue Éric, mais on serait prêt à dépenser des sommes folles quand on a trouvé sa tendre moitié, n'est-ce pas ?

— Si vous saviez, rétorque Lancaster puis se penchant vers moi, n'est-ce pas Barbie ?

Sa bouche est à quelques centimètres de mon oreille. Sa joue contre la mienne. Peau contre peau. J'ai un frisson. Puis soudain, il mordille le lobe de mon oreille, tout doucement, une fois, je crispe mes poings, puis il mord plus fort et murmure :

— Tout va bien Barbie ? Nerveuse ?

Il se relève, un sourire de vainqueur sur le visage, et avec une voix rauque qui envoie direct ma fabrique à hormones sur orbite il ajoute :

— Oui, vous avez raison, on serait même prêt à dépenser des millions.

— À condition de les avoir.

Ils se tapent la main, comme deux vieux potes et éclatent de rire.

Rectification. JE. VAIS. LES. TUER. TOUS. LES. DEUX !

— Bon, même si c'est ma dernière nuit de boulot, j'ai encore quelques heures à assurer, non ? Et ma pause est presque terminée.

Je balance un coup de coude dans l'estomac de Lancaster et me dégage prestement.

— Vous voyez, c'est ce que je vous disais. Et plus le jour va approcher...

Je n'entends pas le reste de la phrase de mon Boss. Je me faufile entre les clients, et une fois arrivée dans le bureau, je m'effondre dans le fauteuil, la tête entre les mains.

Je ne le supporte déjà plus au bout de quelques heures.

Et mon corps, lui, n'a qu'une envie, un seul désir... et plus il s'amplifie...

Plus le dégoût de moi-même s'intensifie.

Alors, comment vais-je pouvoir tenir cinq ans ?



Le Contrat - {Sous contrat d'édition}Sortie le 18 juillet avec TéléStar...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant