Chapitre 15

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Je viens de lâcher une bombe. Lancaster est sous le choc. Sonné. Sidéré.

Je dispose de quelques secondes, minutes tout au plus, avant qu'elle ne m'explose au visage.

J'appuie sur le bouton et déclenche l'ouverture des portes. Je jaillis de la voiture et me précipite à ma porte. Sa portière claque... Non, non, non... je tape le code à toute vitesse... j'entends ses pas... Non, non, non... je rentre... et referme la porte.

Merci mon Dieu !

Et je respire enfin.

Le dos collé contre le battant, je l'entends m'ordonner de lui ouvrir. Il est malade ou quoi ? Je ressens les vibrations des coups qu'il donne. Mon cœur reprend un rythme normal. C'était limite. Un peu plus et... et quoi ?! Merde !

Après tout, le contrat n'était pas encore signé. J'étais en droit de faire ce que bon me semblait et avec qui je voulais.

Je grimpe les escaliers en pensant à Lancaster, furieux, sur le trottoir, et je souris, toute fière de ma petite victoire. Quand mon portable m'avertit d'un SMS, je pouffe de rire, déjà certaine de l'expéditeur.

DESCENDEZ IMMÉDIATEMENT !!!

Tout en ouvrant la porte avec précaution pour ne pas réveiller mon père, je tape ma réponse :

ALLEZ AU DIABLE !!!

Je file dans ma chambre, dépose mon sac sur le lit et enlève ma veste. Tout est silencieux. Calme. J'ai encore quelques heures de tranquillité pour dormir et récupérer de cette soirée éprouvante.

JE VAIS DÉFONCER LA PORTE !!!

Je me lève en grognant et ouvre ma fenêtre. Lancaster est sur le trottoir et balance des coups de pied dans la porte. Qu'est-ce qu'il croit ? Qu'il va arriver à... Merde ! Est-il capable d'y arriver ? Non, mais quel con ! D'abord, l'idée de lui balancer un seau d'eau bien glacée me vient. Je me dirige vers la cuisine, quand une autre, bien plus sympathique, me traverse l'esprit. Je retourne alors dans ma chambre et attrape mon téléphone.

JE VAIS APPELER LA POLICE !!!

Ça devrait le faire réfléchir. De la fenêtre, je le vois lire le message, se reculer et taper sur son clavier. Tant mieux, il a enfin compris à qui il avait affaire, me dis-je, quand sa réponse arrive.

JE VOUS LAISSE ENCORE LE TEMPS DE RECTIFIER VOTRE ERREUR, BARBIE !!!

Mais j'y crois pas !

PLUS QUE 10 SECONDES !!!

Je le vois regarder sa montre et lever son visage vers moi. C'est clair qu'il est furieux. On est deux.

5 SECONDES !!!

Alors là, s'il pense que je ne vais pas oser. S'il croit que je vais me défiler.

1 SECONDE, BARBIE !!!

Il file un coup sur la porte. Bien fort. Je compose aussitôt le numéro du commissariat du quartier. Décrochez ! Décrochez ! Un autre coup sur la porte. Allez ! Vite ! Vite !

Plusieurs sonneries résonnent dans mon oreille. D'une voix affolée, et je n'ai pas besoin de beaucoup me forcer, j'explique à l'agent que mon fiancé, avec qui je viens de rompre, m'a suivie jusqu'à mon domicile depuis ma sortie du travail et qu'il est actuellement en train d'enfoncer la porte de mon immeuble. Je donne mon adresse. L'agent m'assure qu'une voiture sera là dans les 3 minutes. De la rue me parvient le boucan que fait Lancaster. J'en rajoute, je sanglote en lui assurant qu'il faut vraiment qu'ils fassent vite, très vite, pendant qu'il me garantie que ses collègues sont déjà en route, et de ne pas bouger de chez moi. Gentiment, il continue à me réconforter jusqu'à l'arrivée de ses collègues.

Je raccroche et me laisse tomber sur le lit. Par la fenêtre, des éclats de voix arrivent jusqu'à moi. Je ne bouge pas. Je songe que j'y suis peut-être allée un peu trop fort... Non, avec un peu plus de temps, j'aurais même pu trouver pire. Donc, il peut s'estimer chanceux.

Une deuxième sirène résonne dans la rue. J'entends les voisins demander ce qui se passe par les fenêtres, des portes claquent, des cris. Finalement, le calme semble revenir.

Des coups secs frappés à ma porte me font sursauter. Je cours et ouvre.

— Mademoiselle Beaumont ?

— Oui, c'est moi.

Les deux agents qui me font face m'informent que l'individu, actuellement menotté - j'ai envie de sourire, mais je me retiens - assure que je suis sa fiancée.

— Ex-fiancée, dis-je tout doucement pour ne pas réveiller mon père. J'ai rompu cette nuit et il m'a suivi du travail jusqu'à la maison. Je ne pensais pas qu'il se mettrait dans un tel état. J'ai cru qu'il...

— Il vous a frappé ?

— Non, non, il ne m'a pas frappée. Je ne pense pas qu'il serait allé jusque-là, mais j'ai eu tellement peur quand il a défoncé la porte.

— Vous avez bien fait de nous appeler. Bon, écoutez, il va passer le reste de la nuit au poste, le temps pour lui de reprendre ses esprits. Si vous souhaitez déposer plainte, vous pourrez venir demain matin, mais comme il n'y a pas eu de violence physique, ça n'ira pas loin. Il sera juste poursuivi pour les dégâts matériels causés et qu'il devra régler.

— Je pense qu'une nuit chez vous lui remettra les idées en place. Je ne souhaite pas porter plainte. Je pense qu'il... a dû boire un peu trop de téquila et qu'il ne s'est pas rendu compte. Ça n'était jamais arrivé avant... c'est la première fois, ça doit être... le choc... le choc de la rupture. Il ne s'y attendait pas du tout, le pauvre.

— On ne s'attend jamais à une rupture, dit l'un des agents avec un sourire. Et ne vous inquiétez pas, généralement, le lendemain tout est rentré dans l'ordre et vous n'entendrez plus parler de lui.

Je regarde les deux policiers avec des larmes dans les yeux et en insistant pour qu'ils ne soient pas trop durs avec lui.

Après leur départ, je referme doucement la porte. Par chance, mon père dort toujours. Pour une fois, je bénis son audition défaillante. Je n'ai même pas le courage de me démaquiller. Quelle soirée ! Je me déshabille et me glisse dans le lit. Bien au chaud, sous la couette, je me demande à quoi pense Lancaster. Il a sûrement envie de me tuer. J'ai un frisson incontrôlable en pensant à sa réaction. Quelques heures au poste devraient le calmer.

Et puis zut ! Il ne peut pas dire que je ne l'avais pas averti, non plus.

Cette dernière pensée me réconforte. Un peu.



Le Contrat - {Sous contrat d'édition}Sortie le 18 juillet avec TéléStar...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant