Chapitre 25

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Vous vous souvenez de votre entrée en maternelle ? Vous aviez 3 ans, peut-être 2, et vous alliez quitter vos parents. Peut-être etiez-vous triste, malheureux, effrayés de vous retrouver seul, sans votre mère ou votre père que vous n'aviez jamais quitté auparavant. Vous aviez peur de vous retrouver avec des inconnus.

Ou peut-être etiez-vous heureux, parce que papa et maman vous avaient dit que tout ce passerait bien, que vous auriez pleins de nouveaux amis, que vous feriez la sieste et que de toutes manières, vous vous retrouveriez à la fin de la journée. Alors vous étiez fin prêts et impatients de les quitter.

Moi, je me souviens de mon entrée en maternelle.

J'étais en uniforme, devant mon école, mon cartable sur le dos et les deux mains emprisonnées dans celles de mes parents. Maman avait mis un tailleur, papa un costard. Mes mocassins avaient été parfaitement attachés, ma cravate parfaitement nouée, ma jupe parfaitement ajustée, ma chemise parfaitement boutonée et ma veste parfaitement cintrée. Mes cheveux avaient été attachés en un chignon parfait et rien, ni même un bout de tissus, n'était de travers. Le parfait parfait. Je n'avais pas peur. Je n'étais pas impatiente. Et mes parents ne m'avaient rien dit. Nous étions juste debout devant l'école, à l'heure et parfaits.

Nous étions rentré dans l'établissement d'une marche cadencés jusqu'à la salle de classe ou attendaient déjà les autres parents, assis sur des chaises en bois neuf.

Car tout était parfait.

L'institutrice avait parlé brièvement et avait mis les parents à la porte. Aucune parole inutile ne fut échangé. Mon père s'en alla sans me regarder et ma mère me critiqua encore sur mon manque d'expression.

Vint l'heure des présentations et tous les élèves y passèrent. Pourtant, à l'appel de mon nom, je restais planté pendant quelques minutes sans rien dire. Les autres, eux, avaient fièrement dit nom, prénom, et le métier de leurs parents. Moi, je restais devant les pupitres à regarder la place que j'avais quitter peut avant jusqu'à ce que l'institutrice ne m'intime d'aller m'asseoir.

- Livre premier de mathématique, avait-elle dit. Page 10 : les multiplications.

Des multiplications en petite section. Tout était parfait. Je connaissais les couleurs, je savais compter jusqu'à l'infini et savais additionner. Je savais qu'elle était la forme du soleil et celle de mon lit. Je savais que la vache faisait "meuh" et le chien "ouaf". Je savais aussi que la population mondiale s'élevait à 10 millions et que l'être humain était stupide. (Oui 10 million, c'est de la s.f)

Donc, les multiplications ne me posaient pas de problèmes. Je les avaient apprises la semaine précédente.

Le cours de français et le cours d'histoire des arts passèrent. La récréation fut brève, car j'étais restée assise sur le banc à manger ma pomme sans que personne ne vienne me voir.

À 15 heures, mes parents vinrent me chercher. Personne n'était venu me parler de toute la journée. Et pourtant, pendant que j'attendais, plusieurs enfants s'appelaient par leurs prénoms et se saluaient de la main en partant. Néanmoins, alors que je regardais une voiture s'en aller, je croisais le regard d'un petit garçon. Étonnement, il me sourit alors que j'avais toujours ma tête de poisson mort. J'allais lui rendre son sourire, mais ma mère me prit la main et m'entraina avec elle et je n'eu pas le réflexe de me retourner voir le petit garçon.

Arrivé à la maison, je fut directement mise assise à la table du salon, des feuilles de travaille devant les yeux jusqu'à 19h. Mais je m'en fichait. Je remplissait les feuilles et j'écoutais mes parents me gronder quand j'oubliais une retenue.

J'étais... passive. Complètement passive. Je m'en fichait de ne pas avoir compté le 2 à l'addition. Je me foutais de savoir que 8x9=72. Ça me passait par dessus la tête de savoir qu'à 3 ans, j'étais utilisé comme une machine de 8 ans. Je me balançait de ne pas avoir d'expression sur le visage. Et je n'en avais rien à faire de ne pas avoir d'amis.

A Sleepy World    [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant