Je tenais toujours la main de Caleb quand mon ventre se mit à gronder sourdement. Il lâcha ma main et passa une énième fois sa main sur sa mâchoire. Voyant que je faisais de même, il se leva.
-Suis moi. On va à la cuisine. Mais ça ne veux pas dire que je te permet de faire quoi que ce soit. Tu es chez moi.
Je pris mon sac et le rejoignis sur le pas de la porte, où il m'attendait. Avec tout ça, je n'avais même pas pu me laver. Arriver à son niveau, il commença à marcher et me lança un regard que j'interceptais.
-Quoi ?
-Pourquoi tu as pris ton sac avec toi ? et devant mon regard, il ajouta : C'est juste une question. J'ai encore mal à la mâchoire après ton coup de poing, je ne vais pas me risquer à le toucher.
-C'est mon sac, c'est tout.
Le reste de la route se déroula en silence. Il n'ouvrait la bouche que pour m'indiquer où aller ou pour me prévenir. Nous sommes passés devant énormément de porte, et d'ouvertures qui laissaient apparaitre des salons magnifiques, des salles de jeux ou encore une salle constituée entièrement d'écrans et de jeux vidéo. Il y avait aussi des photos. Je rencontrais souvent celle d'une femme, toujours la même à plusieurs âges différents. Venait ensuite celles d'un homme au visage strict, mais détendu avec les cheveux rejetés en arrière. Plusieurs des deux en même temps, mais aucunes qui ressemblaient de près ou de loin à Caleb.
-La cuisine est là, dit-il en me laissant entrer la première.
Je pénétrais dans la cuisine high-tech, loin de celle que j'avais vue en bas, dans la partie de service. Avec de grandes fenêtres en verre d'où les premiers rayons du soleil inondaient la pièce d'or, un ilot central en verre trempé, des tiroirs et meubles intégrés aux murs, dans un espace extrêmement bien dégagé. Un des murs était entièrement recouvert de bois écorché design. Je n'étais pas experte, mais j'en avais beaucoup vu dans les magazines déco dans les appartements et les maisons que je visitais.
-Si ça c'est une cuisine, qu'est-ce que sera le salon ? Dis-je à voix basse.
-Il fait deux fois cette pièce avec un écran plat, un bar et un canapé, si on peut appeler ça comme ça. Du moins, entre autre.
Il alla jusqu'aux placards et je me dirigeais sur l'ilot où je m'installais sur une des chaises en hauteurs. Je déposais mon sac sur le plan de travail et étirais mes doigts.
-Mais ce n'est pratiquement rien par apport à la terrasse sur le toit, où la piscine...continua-t-il en ouvrant le placard.
C'est en l'ouvrant que je me rendis compte que ce n'était pas un placard, mais un immense frigidaire dont la porte se confondait à celle des autres placards. Il était géant et bien rempli. Caleb tira le tiroir du côté réfrigérant et en sorti un paquet d'haricots verts et le posa sur sa mâchoire. Puis il se retourna vers moi en m'interrogeant de son regard. Je lui montrais mon poing et il m'apporta un paquet de petits pois.
-Il y a une piscine ? Lui demandais-je en saisissant le paquet de petits pois. Je ne l'ai pas vu.
-Il y en a deux : une à l'intérieur et une sur un pavillon à quelques kilomètres plus bas dans le jardin.
-Ton jardin se mesure en kilomètres, toi.
Il haussa les épaules et vint s'asseoir en face de moi. Je fixais le paquet de petits pois en m'amusant avec. La propriété était plus grande que je ne le pensais et ne s'arrêtais pas seulement à la villa. Je pourrais profiter d'un pavillon et de deux piscines quand il aura disparu. Super !
-Maintenant dit moi ce qu'il se passe. Et ne me double pas.
-Tu n'a aucun droit sur moi, alors pas de menaces.
Il me lança un regard qui m'arracha un sourire. Ce garçon était vraiment frappant. Et il m'amusait beaucoup. Mais plus je lui en disais, mieux je profiterais de son absence, vous ne croyez pas ? Je m'amuserais après. Je me mis droite sur ma chaise et inspira profondément.
-Tout d'abord, il faut que tu me dises depuis combien de temps tu es seul. A quel moment tu tes rendu compte qu'il n'y avait plus personne avec toi ?
-Avant-hier soir. Dans les environs de 18h. Je me suis réveillé et il n'y avait plus personne, plus aucun signal à la télévision, plus internet, et plus de réseau.
Avant-hier soir, donc ça faisait déjà plus de deux jours qu'il était apparu. 48heures et des poussières. Il devait bientôt disparaitre alors.
-La première chose que tu dois savoir, c'est qu'en générale –de mon point de vue - les personnes qui apparaissent ne restent jamais plus de trois jours. Ils ne disparaissent pas quand ils s'y attendent, ni à l'heure à laquelle ils sont apparus. Ça m'est déjà arrivé d'être en pleine conversation avec quelqu'un quand il a disparu.
Il resta silencieux un moment, semblant digérer l'information, ou l'analyser. Il posa le paquet d'haricots verts sur le plan de travail et s'appuya sur ses avant-bras pour me fixer. Il devait faire dans les environs de 10°C à l'extérieur et le chauffage ne canalisait pas totalement le froid. L'ilot était froidet le garçon était torse nu. Comment faisait-il ? Il remonta ses lunettes sur son nez et remonta ses cheveux.
-Et ensuite ?
-Quoi ensuite ?
-Quand ils ont disparu, où vont-ils ? Est-ce qu'ils retournent chez eux comme si de rien était ou ils deviennent...
-Ou ils deviennent comme moi ? Continuais-je à sa place voyant qu'il bloquait. Si la définition de « quelqu'un comme moi » a changé depuis hier, évidement.
Un autre regard du « c'est bon j'ai compris ». Mais à présent nous étions tous les deux sérieux. Comme des adultes qui doivent signer un contrat et qui vérifient les closes ensembles.
-Honnêtement je n'en sais rien. Je n'ai jamais rencontré une personne deux fois. Alors je suppose qu'ils retournent chez eux et qu'ils font comme si il ne s'était rien passé.
-D'accord, j'aurais d'autres questions...
Mon ventre grogna et je me sentis vraiment faible d'un coup. Comme un coup de barre qui s'abattait sur moi. Mon estomac se contractait dans mon ventre et d'énormes bruits de gargouillis. C'est vrai qu'au début, nous étions montés dans la cuisine pour manger, pas pour un questionnaire.
-Tes questions, tu peux me les poser en me donnant quelque chose à manger ?
-Je vais tenir un journalier pour que tu sache tout ce que tu me dois avant que je ne retourne dans ma réalité. Me dit-il en se levant de son tabouret.
-Fait ce que tu veux, mais nourris moi, dis-je en feintant d'être aux portes de la mort.
Ça lui arracha un sourire et il se retourna vers les placards.
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A Sleepy World [EN PAUSE]
Sci-fiAlex est une adolescente prise dans un monde alternatif. Elle doit se débrouiller seule dans un monde où les personnes n'apparaissent que rarement et dans des périodes irrégulières. Pourtant, après sept ans d'irrégularités, quelqu'un reste à ses côt...